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Las Vegas as you’ve never seen it before: photographer Jeff Burton dives into the heart of the city of boundless desire
Célèbre photographe de mode ayant fait ses débuts sur des tournages porno gay, l’Américain Jeff Burton a été invité par Louis Vuitton à porter son regard sur l’incandescente et troublante Vegas. Ces clichés forment un voyage impressionniste éblouissant à travers les buildings et les célèbres shows de la ville (des combats ultra violents d’Ultimate Fighting à la poésie du Cirque du Soeil). Entre peinture expressionniste et voyeurisme à la Brian de Palma, le livre qui en est issu (édité par Patrick Remy) est l’une des plus belles réussites de la collection de beaux-livres Fashion Eye de Louis Vuitton.
Par Thibaut Wychowanok.
Thibaut Wychowanok : Votre livre sur Las Vegas s’ouvre sur 3 images presque abstraites où l’on distingue, dans un flot d’effets visuels, une présence aquatique. Comme si votre expérience de Las Vegas était avant tout liée à des sensations et des couleurs plus qu’à des lieux précis que vous chercheriez à documenter.
Jeff Burton: Quand je faisais mes repérages, j’ai choisi de réserver une chambre au 50e étage du Cosmopolitan Hotel. Parce qu’en l’occurrence, ça fait 34 jours que j’ai arrêté la cigarette, mais au moment où j’ai fait ces photos, je fumais énormément, et cette chambre avait un balcon. C’était l’une des raisons de mon choix, très légèrement égoïste. Mais je me suis dit aussi que ce serait génial d’être aussi haut, aussi loin du sol, sans vis-à-vis, sans vitrage et avec une infinité de possibilités pour les prises de vue. Ce que vous voyez sur ces premières images, ce sont les fontaines du Bellagio. Cette sensation de… flottement était assez extraordinaire. L’impression de flotter là-haut, cinquante étages au-dessus de la ville, comme si je la survolais. La fontaine était l’objet le plus spectaculaire que je pouvais voir à ce moment-là, sous cet angle-là. Comme un truc venu de l’espace, comme si elle s’était extraite ou dissociée de son environnement. Elle vous attirait à elle, vous hypnotisait. C’est la première chose que je me suis mis à photographier. La mise en page du livre suit un ordre chronologique, parce que cela me paraissait logique : une progression qui suit celle de ma propre expérience. Pour moi, cela était aussi pertinent du point de vue narratif : j’arrive, je suis attiré par ce je remarque d’abord, puis je passe à la phase suivante, avec presque la sensation d’accoster dans un nouvel espace. Je réagissais effectivement aux sensations, aux couleurs, à la beauté.
Cela m’évoque l’expressionnisme abstrait de Joan Mitchell, présenté en ce moment à la fondation Louis Vuitton. Mitchell disait que ces peintures exprimaient des “feelings”, là où Monet parlait de sensations.
En lisant ce matin l’article de Numéro art sur Joan Mitchell, j’imaginais justement l’effet que ça pourrait faire d’absorber Las Vegas comme ça, de rentrer à la maison, et de se mettre à peindre. Complètement différent. Ce qui est intéressant dans la photographie, par opposition à la peinture, c’est sa totale immédiateté. C’est une lecture instantanée, une présence au monde, une réaction à ce qui est en train de se produire – et que l’on capture. Personnellement, j’aime bien me perdre dans l’instant avec l’appareil, qui s’interpose comme un tampon entre moi et le sujet. Par exemple, lorsque j’ai photographié pour ce livre les adversaires de combat d’Ultimate Fighting, ce qui me plaisait, c’était la perfection des corps, l’intensité, la virilité. Mais j’avais aussi un peu peur de cette ambiance. Peur de l’effet que ça me ferait de voir des gens se balancer des coups de poing au visage. Et puis je me suis vraiment pris au jeu. Photographier les combats m’a rappelé l’époque où je suis arrivé, encore tout jeune, sur les plateaux de tournages pornographiques – la façon dont j’étais émoustillé par le côté physique, le côté hardcore. À Vegas, j’ai donc retrouvé une forme de familiarité. Et j’ai essayé de m’abstenir de tout snobisme, en prenant conscience que, lorsque mon travail porno a commencé être remarqué, certaines personnes ne s’intéressaient qu’à sa dimension sexuelle, sans accepter de l’ouvrir à quoi que ce soit d’autre. Je me suis dit que qu’il pouvait y avoir le même risque avec ce matériau-là. Vegas, c’est Vegas. Et le porno, c’est le porno. Mais c’est aussi davantage, selon la manière de regarder les choses, la façon de traduire son expérience. Disons que l’abstraction est pour moi un moyen d’aborder cet aspect, pour éviter une description si littérale qu’elle ne laisse plus la moindre chance à l’esprit d’aller voir ailleurs.
« Photographier les combats m’a rappelé l’époque où je suis arrivé, encore tout jeune, sur les plateaux de tournages pornographiques – la façon dont j’étais émoustillé par le côté physique, le côté hardcore. » Jeff Burton
Une autre stratégie dans vos photos est de toujours laisser entendre que quelque chose se passe hors-du cadre. L’imaginaire peut s’y déployer au-delà des limites de la photo.
Oui, et on retrouve d’ailleurs cette approche à mes débuts, lorsque je cherchais à réinterpréter ou à bousculer la narration. Pendant une prise de vue, je suis tout excité lorsque différents messages me parviennent : qu’est-ce que je suis en train de regarder ? De quoi s’agit-il, et qu’est-ce qui est beau là- dedans ? Et j’essaie en quelque sorte de m’abstenir de tout jugement. Je me contente d’absorber la beauté.
Dans votre entretien avec Patrcij Remy, publié dans l’ouvrage, vous expliquez que l’un des meilleurs conseils que l’on vous ait donnés est qu’il n’est pas question de morale dans l’art. Et que la beauté peut être n’importe où. Je crois que c’est ce que vous dit votre mère lorsqu’elle découvre que vous êtes photographe sur des tournages de porno gay.
Je chéris véritablement ce qu’elle m’a dit ce jour-là, parce qu’il m’avait fallu un bon moment pour admettre auprès d’elle que je travaillais dans le porno pour gagner ma vie, que c’était mon boulot – je pensais que ça lui ferait peur, qu’elle allait s’inquiéter pour son petit garçon. Elle a d’abord été surprise, et puis elle m’a dit que la beauté pouvait venir d’endroits inattendus. J’ai été très fier d’elle à ce moment-là.
« la beauté peut venir d’endroits inattendus. » Jeff Burton
Après vos photos pour l’industrie pornographique, vous avez été rapidement repéré par l’industrie de la mode. Deux milieux qui fonctionnent finalement sur une même mécanique : créer du désir. La ville entière de Las Vegas semble elle-même se nourrir de désir, vouloir créer toujours plus de désir, un désir de consommation, le désir de jouer… Le désir semble d’ailleurs être le moteur de toutes vos images. Quel est celui qui vous a poussé à photographier des ultimate fighters ?
Quand j’étais jeune, j’avais envie de voir du porno, ça m’intéressait. Et au Texas, il n’y avait pas beaucoup de représentations de l’homosexualité, ni quoi que ce soit d’autre qui aurait pu entériner l’idée que c’était une expérience possible, dans la réalité. Ensuite, je suis parti vivre à L.A. et j’ai vu passer une annonce dans un magazine qui recherchait un photographe pour des tournages pornos. Je me suis dit que j’en étais capable, mais je me demandais si j’arriverais à gérer ça du point de vue psychologique. Lorsqu’on n’a pas une expérience personnelle des choses, on projette très facilement ce que la culture nous en dit. Donc, j’avais un peu d’appréhension : « Ouh là, ça va être lourd à porter. Pour moi. Beaucoup de drogues, beaucoup d’instabilité, des histoires tristes. Mais vous savez, pour revenir à ce que disait ma mère sur le fait que la beauté peut aller se loger dans des endroits étranges, j’ai encore des amis, des amis très proches, avec qui je travaillais à cette époque-là. J’avais un peu le même sentiment, et des craintes comparables, pour l’Ultimate Fighting Championship. J’étais émoustillé, j’étais attiré, mais je me disais aussi que ce n’était pas vraiment mon univers. Je ne suis pas quelqu’un de violent. Lorsque je suis arrivé, j’ai passé cinq jours à faire la connaissance de certains des concurrents, et j’ai assisté à leurs conférences de presse. À partir de ce moment-là, on les voit comme des êtres humains, qui ont consacré des années et des années de leur vie aux arts martiaux. Ils sont en totale résonnance avec leur corps, ils pratiquent leur art en s’efforçant de le perfectionner. Et ils sont gentils les uns avec les autres. Ils se prennent dans les bras. Ils peuvent se tabasser à mort, mais lorsque le combat est fini, ils s’étreignent avec beaucoup de sincérité. Et ça, c’est très touchant, vraiment.
On retrouve cette idée de la performance à travers toutes vos photos des shows à Las Vegas, les fighters, le Cirque du Soleil, etc. Une idée aussi de jouer un rôle devant un public, d’une situation artificielle….
J’apprécie que vous évoquiez cet aspect de la performance, qui est l’expression d’un mélange de différents talents – finalement assez proche de ce qu’était à mes yeux le porno. On se moque souvent des porn stars… Mais l’exhibitionnisme dans lequel il faut aller puiser pour arriver à ça, c’est quelque chose d’assez incroyable… D’arriver à sexualiser cette situation. Vous êtes face à une trentaine d’inconnus, avec des caméras, vous savez que les séquences vont être montées, et que des millions de personnes vont voir ces images. J’ai ressenti la même chose avec les combattants de l’UFC. Et avec les artistes du Cirque du Soleil. Avoir une telle maîtrise du corps et de l’esprit, être capable de faire ça devant une foule, en sachant que l’action va être enregistrée et diffusée. J’ai un respect incroyable pour celles et ceux qui font ça, parce que je suis à l’exact opposé. J’imagine que c’est aussi ce qui crée l’attirance entre les exhibitionnistes et les voyeurs. J’aime que mon appareil, ma caméra, me mette à distance. Mais pour être en mesure de capturer ces instants, de les saisir avec justesse, c’est vraiment pour moi un luxe – et un véritable privilège – que les gens me laissent approcher et les saisir au plus près.
« On se moque souvent des porn stars… Mais l’exhibitionnisme dans lequel il faut aller puiser pour arriver à ça, c’est quelque chose d’assez incroyable… » Jeff Burton
Je faisais référence à Joan Mitchell et à la peinture, mais vos clichés évoquent aussi un certain cinéma hollywoodien, une vision panoramique, mais aussi le voyeurisme à l’œuvre chez Hitchcock ou chez De Palma.
Je photographie presque toujours en plan horizontal, en tout cas chaque fois que j’en ai la possibilité – c’est mon format instinctif. Il doit donc effectivement exister un ancrage cinématographique dans ma façon de réagir à ce que je vois. Très souvent, dans mes photos, il y a trois ou quatre choses qui se passent en même temps. Et j’essaie de donner le sentiment qu’elles se produisent simultanément. L’enjeu n’est pas de décrire avec précision, mais plutôt de forcer votre esprit à imaginer ce qui n’est pas montré. Parce que l’image va créer une confusion, qui vous pousse à vous demander « Mais qu’est-ce que je vois ? Qu’est-ce qui se passe, là ? » Ces choses-là m’excitent lorsqu’il s’en dégage une vraie séduction, mais qu’on ne peut pas s’empêcher de vouloir aussi en savoir davantage.
« L’enjeu n’est pas de décrire avec précision, mais plutôt de forcer votre esprit à imaginer ce qui n’est pas montré. Parce que l’image va créer une confusion, qui vous pousse à vous demander « Mais qu’est-ce que je vois ? » Jeff Burton
Quelle est votre manière de travailler avec votre appareil photo ? Est-ce que vous capturez un instant, ou vous travaillez une mise en scène ?
Au départ, pour évoquer ce que je faisais, les gens parlaient souvent de snapshot aesthetics, d’esthétique de l’instantané. J’ai souvent entendu décrire mon travail de cette façon. Et je n’aimais pas ça du tout, parce que dans mon travail, les formes et les sujets sont en réalité assez étudiés. Ça me rappelle une formule que j’ai utilisée avec des amis qui me connaissent et qui connaissent ma façon de travailler – je parle de « photos au premier, deuxième, troisième et quatrième degré ». Au premier degré, j’ai tendance à m’ennuyer assez vite. Par exemple, si je photographie un portrait, et que pendant toute la séance, il y a cette connexion qui s’établit, ça peut être fantastique, et le résultat peut être très réussi. Mais de temps en temps, j’aime redevenir le voyeur. C’est là qu’on passe au deuxième, troisième ou quatrième degré – c’est selon… Quand on commence à montrer les mécanismes et le dispositif de fabrication de la photo – ah, tiens, le est là, etc. En révélant le caractère artificiel de la situation. J’aime bien avoir ça en tête quand je me trouve dans ce genre d’environnements, et c’est ce que je faisais d’ailleurs sur les tournages pornos – pas tellement un commentaire « depuis les coulisses » sur la partie cinématographique, mais juste livrer quelques indices, assez pour donner à réfléchir. Et ça peut vite devenir déroutant. Dans une sorte d’entre deux, je dirais. Ce qui m’excite, c’est lorsqu’on a le sentiment que ça ne ressemble pas à l’image de quelqu’un d’autre.
Las Vegas Jeff Burton, collection Louis Vuitton Fashion Eye. Disponible
Thibaut Wychowanok: Your book on Las Vegas opens with three almost abstract pictures, in which one can make out an aquatic presence among a torrent of visual effects. It feels like you have experienced Las Vegas through sensations and colors above all, rather than through precise places that you would have wanted to document.
Jeff Burton: When I scouted the shoot, I chose to stay on the 50th floor of the Cosmopolitan Hotel. Funnily enough, I quit smoking 34 days ago, but when I shot this, I was a heavy smoker and this
room had a balcony. So that was part of the decision process, a little bit selfish, but I also thought it’d be amazing to be that high off the ground with no obstruction, no glass, and to be free to shoot in so many different ways. What you see in the first pictures are the Bellagio fountains. It was pretty amazing… floating. It feels like you’re floating up there, on the 50th floor over the city, kind of flying. The fountain was the most spectacular thing to look at from that angle. It kind of looks like outer space or as if it is isolated from the rest of the situation. It really drew you in. It was hypnotic. That was the first thing I started shooting. The edit of the book is in chronological order because it seems to make sense to me, to go through it as I experienced it. It also made sense to me narratively. Arriving, being attracted to what you are attracted to and going on to the next phase. Almost like I was docking into a space. I was really responding to sensation, color and beauty.
It reminds me of Joan Mitchell’s abstract expressionism, which is currently exhibited at the Louis Vuitton Foundation. Mitchell said that his paintings expressed “feelings”, whereas Monet talked about “sensations”.
I was reading that piece about Joan Mitchell in Numéro art this morning and imagined what would it have been to absorb Vegas, go home and start to paint about what I remember. It would be totally different. What’s interesting about photography versus painting is that it is so instant. It’s an instantaneous reading, being present and responding to what’s happening. You’re capturing it. Personally, I like being lost in the moment with the camera and having that buffer between me and the material. For instance, when I shot the fighters of Ultimate Fighting for this book, what I like about the pictures is the perfect bodies, the intensity and the virility. I was actually scared to be in that environment. Of what it is going to be like to see people punch each other in the face. But I really got into it. Shooting the fighters reminded me of when I first got on porn sets as a young man, being titillated by the physicality of it, the hardcore. So I kind of felt at home in Vegas. I tried not to go into a snobbery about it, because I found that, as my porn work was starting to get attention, there would be people who would only be interested in the sexual part of it, and wouldn’t open up to anything else. I thought that could be a danger with this material. Vegas is so Vegas and porn is porn. But it’s more than that, it depends on how you look at things and how you translate those experiences. The abstraction for me is a way address this aspect, to avoid such a literal description that wouldn’t give your mind a chance to go somewhere else.
Another strategy in your photographs is to always imply that something is happening outside the frame. Imagination can expand beyond the limits of the picture.
Well, you can find that approach in the earlier work, because I wanted to reinterpret or disrupt the narrative. When I’m shooting, I get very excited when different messages come to me about what I am looking at. What is this and what’s beautiful about it? I try to clear all the judgment. I am just absorbing beauty.
In the interview published in the book with Patricij Remy, you explain that one of the best pieces of advice you have been given is that art is not about morality, and that beauty lies everywhere. I think that is was what your mother told you when she found out that you were a photographer on gay porn shoots.
I just cherish that statement she made because it took a while for me to admit to her that I was shooting pornography for a living. That that was my job, I thought it would scare her and that she’d be worried about her little boy. She didn’t expect it. Then she said to me: beauty comes from strange places. That made me proud of her.
After you made photographs for the porn industry, the fashion industry rapidly noticed you. Two different environments that ultimately work with the same process, the creation of desire. The whole city of Las Vegas seems to feed on desire, longing to create more and more, a desire to consume, to gamble… Desire seems to be the driving force behind all your images. What was the initial desire that drove you to photograph Ultimate Fighters?
When I was a young man, I was interested in seeing porn. And in Texas, there wasn’t a lot of representation of gay or anything to see that that would reinforce the idea that it is a possible experience to have. When I moved to LA I saw an add in a magazine that they needed a photographer on porn set. I thought I could do this, but I doubted to be able to handle this psychologically. When you don’t have an experience on firsthand, you accept what the culture tells you about it. So I was a little afraid : « Oh, this is going to be too heavy for me. This is going to be a lot of drugs. There’s going to be a lot of instability, sad stories. » But you know, back to what my mom said about beauty coming from strange places, I still have friends, dear friends, that I worked with back then. I had a similar feeling, a similar fear about the Ultimate Fighting Championship. I was titillated by it, I was drawn to it. But I thought, it’s not really my scene. I’m not a violent person. When I got there, I spent five days getting to know some of them and watching them do their press conferences. You see them as human beings, devoting years and years of their lives to martial arts. So they’re really into their bodies, and they really follow their craft and try to perfect it. They’re kind to each other. They hug each other. They were beating the hell out of each other, but they genuinely hug when it was over. It’s quite moving really.
One can see this idea of performance manifest in each one of your photographs of shows in Las Vegas, such as the fighters, the Cirque du Soleil, etc. Perhaps, it is the idea of playing a role in front of an audience, of an artificial situation…
I appreciate what you’re saying about the performance side of it, It’s a mixture of talent performance, which is very much what porn was like. When people laugh about porn stars, saying they’re just like sluts or whatever…. The exhibitionism that you have to tap into, to pull that off, it’s kind of unbelievable to be sexualized. You are in front of 30 strangers with cameras, knowing that it’s going to be edited and put out into the world where millions of people see it. I felt that same thing about the fighters. And about the Cirque du Soleil people. To have that body control, mind control. To do that in front of crowds, and having it taped where it’s then going to be distributed. I have an incredible amount of respect for these people because I am the exact opposite. I guess that’s the attraction of exhibitionists and voyeurs. I like having that machine, my camera, to separate me from it. But to be able to capture it and get right in on it, it felt like it’s a real luxury, real privilege, when people let me come in and capture them.
I mentioned Joan Mitchell and painting previously. Yet, your photographs also evoke a kind of Hollywood cinema, of panoramic vision, and of the voyeurism one can find in Hitchcock or De Palma.
I almost always shoot horizontals, when I’m allowed to, because that’s my instinctual format. So there must be a cinematic anchor to how I respond to seeing things. Quite often they’re three or four different things going on in my pictures. I try to make things that look like they are all happening at once. It’s not about describing something really clearly, it’s actually forcing your mind to make something up that isn’t showed. The picture will create confusion and make you think : « What am I looking at? What is happening here? » Those things excite me as it becomes really seductive and it compels you to want to know more.
How do you work with your camera? Do you capture a moment, or do you work on staging a situation?
In the beginning, when people had to explain my work they would describe it as snapshot aesthetic. I heard this description often and that annoyed me because all my shapes and subjects are actually pretty studied. It is making me think of a term that I used when I discussed this with other friends who know me or my work. It’s like, « first degree, second degree, third degree, fourth degree pictures. » I tend to get bored if it’s a first. If I’m shooting a portrait of somebody, and during this time it forms this connection, it can be wonderful and you can get great stuff. But every now and then, I like to become the voyeur again. So then it starts to go to second degree, third degree or fourth degree – depending on.. if you start to show, the mechanisms that make the picture, like the groomer is there etc. Showing the artifice of the situation. I like to keep that stuff in mind when I’m in those environments, which is what I did on the porn sets. It was not to make a behind the scenes commentary about cinema so much, but just to give hints that it makes your mind thinking. It can become confusing. What excites me is when it feels as if it doesn’t look like somebody else’s picture.