Entrepreneur

Paul-Emmanuel Reiffers

À la croisée du luxe et de lart, Paul-Emmanuel Reiffers incarne une audace rare : celle dun homme qui, depuis trois décennies, bâtit un pont entre les codes exigeants de la communication de prestige et les élans de la création contemporaine. Fondateur du groupe Mazarine, éditeur du magazine Numéro, propriétaire de l’agence de production des défilés La Mode en Images et d’Arter, il est initiateur du Studio des Acacias et de Reiffers Art Initiatives. Il déploie une pensée qui mêle stratégie et poésie, rigueur et intuition, économie et émotion.

Les débuts de Paul-Emmanuel Reiffers

Paul-Emmanuel Reiffers voit le jour le 10 novembre 1966 à Aix-en-Provence. Une partie de son enfance se déroule à Abidjan, où il découvre très tôt la pluralité des cultures et la puissance des images. Cette double appartenance façonne son regard : à la fois ancré et nomade, rigoureux et ouvert à l’altérité. De retour en France, il poursuit des études de gestion et de finance à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, où il forge un esprit analytique avant de céder à la tentation de la création. Au début des années 1990, il fonde Mazarine — nom emprunté à la rue qu’il habite alors et pose les bases de ce qui deviendra, trente ans plus tard, l’un des plus influents écosystèmes créatifs du luxe mondial

Au fil du temps, la contribution de Paul-Emmanuel Reiffers au dialogue entre art, culture et innovation ne cesse d’être reconnue. Ainsi, en 2008, il est nommé dans l’Ordre des Arts et des Lettres, une distinction saluant son engagement en faveur de la création contemporaine. Trois ans plus tard, en 2011, il est fait chevalier de la Légion d’honneur au titre de « président-fondateur d’un groupe de communication », distinction remise par Nicolas Sarkozy. Plus récemment encore, le décret du 23 novembre 2022 le promeut officier de l’Ordre national du Mérite. Enfin, en octobre 2023, Édouard Philippe lui remet cette décoration au sein même du centre d’art Reiffers Art Initiatives, rue des Acacias à Paris — un geste hautement symbolique, où la reconnaissance de l’État rejoint celle du monde de la culture.

Mazarine, l’agence-passerelle entre prestige et culture

Créée en 1993, Mazarine se distingue dès ses débuts par une approche inédite : réunir, sous un même toit, la stratégie, le design, le digital et la production artistique. Dès lors, l’agence s’impose comme un laboratoire d’idées où se croisent réflexion stratégique et sensibilité esthétique. Au fil du temps, elle grandit sans jamais se renier : indépendante, exigeante, fidèle à une vision qui place la création au centre de tout.

Progressivement, Mazarine intègre de nouvelles entités, telles que La Mode en Images, Arter ou encore Mazarine Design, élargissant ainsi son territoire d’expression. De la sorte, elle passe du défilé de mode à l’exposition, du contenu éditorial à la mise en scène du prestige. Au fil des ans, cette dynamique d’expansion façonne une véritable constellation : des bureaux s’ouvrent à Shanghai, New York, Hong Kong et Dubaï. Chaque implantation, loin d’être un simple relais, prolonge la même philosophie : conjuguer excellence et inventivité.

Numéro et Numéro Art : l’édition comme prolongement

En 2014, Paul-Emmanuel Reiffers rachète le magazine Numéro et en fait la voix éditoriale de son univers. Dès lors, il en devient le directeur de la publication, insufflant au titre une tonalité plus engagée, plus curieuse, plus ouverte à l’art contemporain. Sous son impulsion, le magazine s’affirme progressivement comme un espace de rencontre entre la mode et la création artistique.

Trois ans plus tard, Numéro Art naît : une revue bilingue où la mode rencontre la peinture, la vidéo et la critique d’art. Avec ce nouveau projet, l’éditorial devient alors un véritable espace de dialogue entre les images de mode et les gestes artistiques — autrement dit, une passerelle supplémentaire entre deux mondes longtemps cloisonnés.

Le collectionneur : entre passion intime et mécénat stratégique

Paul-Emmanuel Reiffers n’est pas un spéculateur : il achète par instinct, par émotion, souvent au « premier regard ». Ainsi, dès ses vingt-cinq ans, il commence à collectionner, d’abord attiré par le surréalisme et le figuratif, avant de s’orienter progressivement vers l’abstraction et le conceptuel. Au fil des années, sa collection, qui compte aujourd’hui plusieurs centaines d’œuvres, mêle à la fois des figures majeures : Soulages, Buren, Serra, Ruscha et des artistes émergents issus des diasporas africaines ou caribéennes. Pour lui, chaque œuvre est une rencontre, un fragment d’humanité qui éclaire le reste de la collection.

Reiffers Art Initiatives : catalyseur de jeunes talents

En 2021, Paul-Emmanuel Reiffers franchit une nouvelle étape et fonde Reiffers Art Initiatives, un fonds de dotation dédié à la jeune création. Par ce projet, il souhaite inscrire son engagement dans la durée. Sa mission est claire : accompagner chaque année une trentaine d’artistes grâce à un dispositif complet de mentorat, de bourses et d’expositions organisées au Studio des Acacias. De plus, le comité artistique, composé de personnalités telles que Benjamin Millepied ou Caroline Bourgeois, garantit un regard à la fois exigeant et ouvert sur la scène contemporaine.

Dans ce cadre, un artiste émergent collabore chaque année avec un mentor international — Rashid Johnson, Ugo Rondinone ou encore Daniel Buren — avant de présenter, au Studio des Acacias, une œuvre inédite financée pour rejoindre la collection du fonds. Ainsi, la démarche conjugue la philanthropie et la stratégie, créant un modèle vertueux où la jeune scène dialogue avec l’écosystème du marché tout en préservant la liberté de création.

Le Studio des Acacias : scène, laboratoire et manifeste

En 2014, Paul-Emmanuel Reiffers redonne vie au Studio des Acacias, lieu mythique du XVIIᵉ arrondissement de Paris. À l’origine, c’était le studio photo de Francis Giacobetti. Désormais, c’est un espace hybride, à la fois galerie, atelier et laboratoire d’expériences visuelles. Depuis lors, le lieu connaît une véritable renaissance et accueille des expositions majeures — Mark Handforth, Rashid Johnson, Laure Prouvost, Jean-Baptiste Mondino, entre autres — souvent en écho aux grands rendez-vous artistiques parisiens.

Peu à peu, le Studio devient un manifeste architectural : un lieu où se croisent les disciplines, où la photographie rencontre la sculpture, et où la lumière du luxe éclaire les matières de l’art. Ainsi, Paul-Emmanuel Reiffers en fait une scène d’expérimentation vivante, un véritable pont entre communication, création et contemplation.

L’équilibre entre liberté et exigence

Concilier la communication du luxe et le mécénat de l’art suppose un équilibre délicat. En effet, Paul-Emmanuel Reiffers le sait : il faut préserver la liberté créative tout en maintenant la rigueur entrepreneuriale. De ce point de vue, son approche repose sur la durée : chaque projet, chaque artiste, chaque exposition s’inscrit dans une trajectoire cohérente et patiente.

Ainsi, il est un véritable entrepreneur culturel. En unissant habilement les logiques du marché et les nécessités de la création, il réinvente peu à peu le rôle du patron dans le paysage artistique français. Aujourd’hui, Paul-Emmanuel Reiffers incarne une forme rare d’alchimie : la rigueur de l’entrepreneur mêlée à la liberté du rêveur. À travers Mazarine, Numéro, La Mode en Image, le Studio des Acacias et Reiffers Art Initiatives, il façonne un écosystème qui célèbre la beauté comme acte de transmission.

D’ailleurs, il le résume en une phrase : « J’ai le rêve que les artistes que nous soutenons puissent toutes et tous devenir de grand·e·s artistes. » Une phrase qui, chez lui, n’est pas un slogan. Bien au contraire, c’est une manière d’être au monde, à la fois lucide et poétique. Celle d’un homme qui fait du luxe un espace de culture et de l’art un lieu d’avenir.