Quels mots ont marqué la pop culture en 2024 ?
Du “Brat Summer” initié par Charli xcx à la tendance “Demure” longtemps restée indétrônable sur les réseaux sociaux, 2024 a regorgé de mots devenus des mêmes et des emblèmes de la culture pop. Voici six locutions, néologismes et autres tendances flamboyantes qui ont électrisé la toile cette année.
par Jordan Bako.
Brat, la tempête mode irrévérencieuse initiée par Charli xcx
Il est le mot de l’année selon l’illustre Collins Dictionary. Brat, le sixième album studio de Charli xcx, faisait déjà sensation alors qu’il n’était même pas encore sorti. Révélée en février 2024, sa jaquette est sobrement composée d’un fond vert fluorescent, avec le terme “Brat” (sale gosse en français) inscrit en police de caractères Arial, en basse résolution : une pochette qui contraste avec les mises en scènes travaillées que l’on peut trouver sur les poches des autres projets pop.
Depuis, l’opus de la chanteuse britannique a donné son nom à un véritable mouvement. À la fois mantra et coup marketing de génie, le “Brat Summer” a marqué l’année 2024. Et fait la belle part à une nouvelle génération hédoniste de it girls : celles aux tenues débraillées et au mascara qui coule, dansant dans des clubs au sol poisseux sur des basses électro. Avec pour figures de proue Julia Fox, Chloë Sevigny et Charli xcx elle-même, le “Brat Summer” a conquis le monde entier et a même été repris par la NASA et Kamala Harris pendant sa campagne présidentielle.
Demure, la tendance fétiche des filles qui se tiennent à carreau
Également sacré mot de l’année, cette fois par le dictionnaire en ligne Dictionary.com, l’adjectif “Demure” est une autre tendance qui a agité 2024. Selon le Collins Dictionary, on peut retrouver des traces de ce terme depuis le 14e siècle aux États-Unis. Désignant quelqu’un de sage et de sobre, le mot était quelque peu tombé en désuétude depuis, jusqu’à ce que la vidéaste Jools Lebron s’en empare.
Dans une vidéo publiée sur la plateforme TikTok, l’influenceuse de 31 ans explique à ses followers : “Regardez comment je me maquille pour aller travailler. Très sobre (demure), très réfléchie. Je ne viens pas au travail avec un fard à paupières vert. Je ne veux pas ressembler à un clown au bureau. Je n’en fais pas trop.” La séquence fait mouche sur les réseaux sociaux. Puis, elle est reprise entre autres par Emily Ratajkowski, Joe Biden et Demi Moore – cette dernière s’amuse d’ailleurs des sonorités similaires entre le mot “demure” et son propre nom sur le plateau du Saturday Night Live.
En radicale opposition avec les irrévérences du “Brat Summer”, la tendance “demure” surfe sur le triomphe du quiet luxury et de l’esthétique clean girl dans la mode : un style sage tout en cardigans, ballerines et vêtements brodés de dentelle.
Office siren ou quand l’officewear s’impose en dehors du bureau
Cette année, Miu Miu règne dans les premières places du classement Lyst, se disputant la première place avec Loewe et Prada. La maison de mode excelle par son aptitude à dénicher les tendances de demain. Son défilé automne-hiver 2023-2024 en est la preuve : en mars 2023, Miu Miu pousse le vestiaire officewear dans ses retranchements. Cols roulés, cardigans et slingbacks à petits talons rencontrent petites culottes et collants à pois sur les mannequins qui défilent sur le podium.
L’engouement prend alors autour de l’officewear. Baptisée Office siren (soit “sirène du bureau” dans la langue de Molière), la tendance fait du look monochrome de secrétaire des années 2000, la nouvelle silhouette phare mode du moment. Pensez aux chemisiers à rayures de Bella Hadid, au tailleur de Gisele Bündchen dans Le Diable s’habille en Prada (2006), aux lunettes rectangulaires d’Irina Shayk dans la série Cop Show ou encore aux looks du personnage de jeux vidéo Bayonetta.
Mob wife, la nouvelle esthétique prisée des femmes fatales
À rebours de l’allure discrète de l’Office siren, la Mob wife est une autre tendance qui aura fait vibrer 2024. Fausse fourrure, imprimé léopard, smoky eye et rivières de diamants : le style fastueux de la Mob wife a séduit Dua Lipa, Rihanna ou même la maison Dolce & Gabbana qui en a fait le leitmotiv de son défilé automne-hiver 2024-2025.
La Mob wife s’inspire du charme intemporel du cinéma des années 70 et 80. Talia Shire dans Le Parrain (1972), Michelle Pfeiffer dans Scarface (1983) : la tendance prend pour modèle les femmes de mafieux des films de Brian de Palma et Francis Ford Coppola. Par ailleurs, ce dernier a salué la résurgence de la Mob wife dans les rues via un post Instagram en janvier dernier…
Khia ou la résurrection des chanteuses oubliées
À l’origine, Khia est la rappeuse des années 2000 derrière le tube My Neck, My Back (2002). Si ses autres titres sont tombés depuis dans l’oubli, le nom de l’artiste est resté dans les mémoires, notamment grâce à des tweets de fans de Nicki Minaj datant de 2014 dans lesquels ils se moquent de cette artiste démodée. Dans la bouche des Barbz (les amateurs de Nicki Minaj), le mot Khia devient synonyme de “succès sans lendemain” sur la toile.
Selon le média américain The Cut, le mot “Khia” a connu une résurgence en 2024. Qui peut être considéré comme une Khia ? Qui n’en est pas une ? Le débat fait rage au sein des réseaux sociaux, où bien des internautes passent au crible les carrières relativement infructueuses des artistes musicaux.
C’est par exemple le cas pour Katy Perry, qui opérait en septembre 2024, un retour décrié par la critique avec son sixième album 143. Notez que le terme “Khia” prend pour cible davantage les femmes que les hommes, exposant les femmes de l’industrie musicale aux ravages d’Internet…
Femininomenon, la toute-puissance des artistes féminines
Il vous faudra sans doute plus d’un essai pour prononcer correctement le terme “Femininomenon”. Ce véritable virelangue est imaginé par la chanteuse Chappell Roan, qui en fait le nom du premier titre de son album The Rise and Fall of a Midwest Princess (2023). Porte-manteau qui mêle les mots “Feminine” et “Phenomenon”, il désignait à l’origine les préférences sexuelles de la chanteuse – qui expliquait favoriser des partenaires féminins plutôt que masculins, avant de faire son coming out lesbien quelques années plus tard.
Le média américain Dazed fait du terme “Femininomenon”, une locution qui permet de décrire la consécration des artistes pop féminines dans la sphère féminine. Selon le journaliste Alim Kheraj, 2024 a été l’année du Fémininomenon avec l’avènement d’artistes telles que Sabrina Carpenter, Charli xcx et Chappell Roan : trois chanteuses qui ont commencé leur carrière il y a déjà quelques temps déjà avant de connaître des succès sans précédent cette année.
Les nominations des Grammy Awards 2025 sont trustées par ces trois artistes, ainsi que par Beyoncé, Taylor Swift et Billie Eilish : trois des chanteuses les plus influentes du milieu. Avec le “Femininomenon”, on assiste à une vague de chanteuses qui participent à rebattre les cartes de l’industrie musicale en établissant leurs propres règles. Peut-être que 2025 sera à nouveau l’année d’un nouveau “Femininomenon”… On l’espère en tout cas.