Comment Rosé, qui sort son premier album solo, est devenue un phénomène mondial

L’explosion du groupe de K-pop Blackpink

En 2016, lorsque l’agence YG Entertainment lance le groupe Blackpink, le public sud-coréen et international fan de K-pop attend impatiemment la sortie de leur premier single, en manque d’un girl band puissant à la hauteur des 2NE1, et qui s’inscrirait dans le sillage du succès des BTS ou de Big Bang.

Après avoir suivi pendant plusieurs années leur formation de pop star en devenir (cours de chant et de danse intransigeants retransmis dans une émission), les fans découvrent alors un groupe novateur, qui reprend le flambeau d’un girl band, dans l’esthétique “girl crush” (destiné à un public féminin et portant un message d’empowerment), brisant avec la tendance des groupes plus mignons comme Twice qui fonctionnaient alors particulièrement bien.

Rosé, Jennie, Jisoo et Lisa dévoilent deux chansons, où le rap se mêle à des paroles revendicatrices et à des passages plus lyriques – un melting-pot assurant dès le début un large succès au groupe, qui ne sortira en huit ans que quatre albums, dont un EP.

Une rareté surprenante dans l’industrie musicale sud-coréenne, qui s’explique notamment par la forte présence des chanteuses dans de nombreux autres domaines comme la mode (elles sont chacune égérie d’une grande maison), mais aussi par leurs débuts respectifs en solo.

Rosé, la pop star la plus “indie” des Blackpink

Si c’est d’abord Jennie qui se lance en première, suivie par Lisa, Rosé, 27 ans, entame son parcours en solo en troisième, et sort en 2021 un EP, R-Single, avec seulement deux titres, entièrement chantés en anglais. Une entrée en matière largement suffisante pour enthousiasmer ses fans, qui découvrent alors tout son potentiel…

Car, même si le groupe Blackpink semble soudé, chaque chanteuse possède sa propre identité et son propre univers musical, bien distinct les uns des autres : si Lisa se démarque pour son statut de rappeuse et son esthétique plus audacieuse, Jisoo cultive une image sud-coréenne plus traditionnelle et Rosé s’inscrit en pop star plus “américanisée”.

“Rosé occupe une place un peu spéciale dans le groupe car elle est totalement bilingue en anglais. Elle a grandi en Nouvelle-Zélande, et possède des inspirations anglophones, très country et proches de Taylor Swift” explique en effet Joséphine Lemercier, journaliste spécialisée dans la pop culture japonaise et coréenne.

De Taylor Swift à Bruno Mars… une star K-pop mainstream

Composé en douze morceaux, le disque Rosie, sorti ce vendredi 6 décembre 2024, est entièrement chanté en anglais, signature de la chanteuse des Blackpink. “Ce qui différencie le plus Rosé, c’est son côté indie et américain. Elle joue de la guitare depuis ses 13 ans, poste des covers sur Youtube et sur Instagram, est fan de Taylor Swift, Olivia Rodrigo, Gracie Abrams… Autant d’influences que l’on retrouve dans son album,” évoque Théo Saussard, journaliste et styliste pour le magazine Nylon, et passionné de K-pop. “Cet opus, c’est comme si on avait le droit à des dizaines de minutes de bridge de Rosé des Blackpink”.

Cultivant une esthétique entre élégance et casual, la chanteuse déploie surtout une mode plus influencée par la culture occidentale. “Rosé, c’est vraiment l’esthétique américaine, tout en conservant les codes coréens. Elle arrive à se fondre et à correspondre aux attentes d’un public international. On le voit particulièrement dans son single APT avec Bruno Mars qui connaît un succès dans le monde entier” estime ainsi Joséphine Lemercier, qui rappelle également son apparition récente dans l’émission américaine Hot Ones (première artiste de K-pop à se prêter au jeu) et la participation de l’acteur américain Evan Mock dans le tout nouveau clip de son titre Toxic till the end, sorti dans son album Rosie.

Une facette plus intime et vulnérable avec un son premier album solo

Dans Blackpink, Rosé posait également sa voix sur la plupart des bridges et des passages mélodieux ou acoustiques. C’est donc en toute logique que son premier album studio en solo, Rosie, prolonge ce qui fait son succès au sein du girl band, mêlant titres pop entraînants et chansons entièrement portées par le son d’une guitare et des paroles pleines d’émotions qui parlent de ruptures, de relations amoureuses toxiques et d’ultimatums personnels.

Décrivant le disque comme une petite “capsule temporelle” dans une interview accordée à Zane Lowe pour Apple Music, Rosé évoque les titres comme autant de morceaux de son histoire et d’elle-même, accumulés au cours des dernières années dans le groupe Blackpink, et enfin révélés au grand public en solo.

Une facette plus intime, voire vulnérable de la star, sur laquelle elle travaille depuis déjà plusieurs années, portée notamment par le succès de ses deux précédents singles sortis en 2021 – s’érigeant avec On the Ground comme l’artiste de K-pop la plus écoutée –, et par le phénomène qu’ont été les singles APT et Number one girl (2024) en l’espace de quelques semaines.

“Rosé a remporté un nombre de records, d’écoutes et de ventes d’album impressionnant, alors même que la YG Entertainment misait probablement plus sur Jennie ou Lisa,” poursuit Joséphine Lemercier. À l’image des autres membres de Blackpink, Rosé, égérie Saint Laurent et Tiffany and Co., s’associe au label indépendant The Black Label, fondé par le célèbre producteur Teddy Park, afin de sortir son album sans les contraintes qui régissent sa carrière au sein du groupe. Pari réussi… Avec ce disque, elle pourrait sortir de l’ombre de son groupe pour imposer ses propres couleurs…

Rosie (2024) de Rosé, disponible.