Vivienne Westwood : 3 pièces incroyables de sa garde-robe, en vente chez Christie’s
Jusqu’au 28 juin, Christie’s met aux enchères la garde-robe personnelle de Vivienne Westwood. Exposées dans les locaux londoniens de la maison pendant la vente, ces pièces cultes ravivent le souvenir d’une des créatrices de mode les plus importantes des 20e et 21e siècles. Pour Numéro, Adrian Hume-Sayer, directeur des collections privées de Christie’s, revient sur trois robes iconiques imaginées et portées par la Britannique, disparue en 2022.
Propos recueillis par Camille Bois-Martin.
Photo © Pool BASSIGNAC/BUU/Gamma-Rapho via Getty Images.
La collection “Witches” automne-hiver 1983 : un témoignage de l’esprit des années 80
“Cet ensemble est issu de la toute dernière collection de Vivienne Westwood en collaboration avec Malcom McLaren, en 1983, avant qu‘elle ne devienne entièrement indépendante avec sa marque. Il est très représentatif du travail de construction du vêtement, auquel elle accordait beaucoup d’importance. Il n’y a qu’à regarder la forme des manches et du reste de l’ensemble pour comprendre à quel point cette collection est innovante. Lors de la préparation de la vente Christie’s, Andreas Kronthaler [veuf de la créatrice et directeur artistique de sa maison] se rappelait qu’elle portait très souvent cet ensemble, et il ne l’a rencontrée qu’à la fin des années 80 ! C’est dire…
L’un des membres de la famille de Vivienne racontait aussi combien il était fascinant de la voir travailler sur cette tenue : elle ne supportait pas qu’on laisse de côté un seul morceau de tissu ! Elle n’était pas satisfaite tant qu’elle ne trouvait pas quoi en faire. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle a réfléchi la forme du manteau en carré, pour minimiser tout gaspillage lors de la découpe puis du tailoring.
Un détail que j’aime particulièrement aussi, ce sont ces boutons en corne d’agneau. Ce look représente vraiment tout le zeitgeist des années 80 et la façon dont, à l’époque, la mode évoluait très rapidement grâce à des esprits aussi inventifs que celui de Vivienne.”
La collection “Les Femmes” printemps-été 1996 : un hommage à l’histoire du costume
“Cette pièce, c’est l’historicisme dans sa forme la plus pure ! Pour cette robe à l’anglaise, Vivienne Westwood s’est inspirée des créations d’une couturière du 18e siècle, Anna-Maria Garthwaite, qu’elle a probablement observées dans les collections du Metropolitan Museum de New York – et dont on peut d’ailleurs voir actuellement un exemplaire dans l’exposition “Sleeping Beauties: Reawakening Fashion”, dans ce même musée.
C’est vraiment une très très belle création, d’un point de vue technique comme esthétique. Lors de nos recherches, nous avons notamment retrouvé une photo de Vivienne en train de la porter aux côtés d’Andreas Kronthaler, à la sortie d’un rendez-vous à Downing Street en 1997 avec le premier ministre travailliste de l’époque Tony Blair, qui venait alors d’être nommé.
Cela rappelle à quel point cette tenue est un symbole de puissance, associée à ce courant politique qui reflète les engagements de la créatrice. C’est une robe “statement”, à la fois parce qu’elle remet en avant une énième créatrice de mode oubliée par l’histoire, mais aussi parce qu’elle montre le talent de couturière de Vivienne Westwood, qui applique ici l’artisanat de la soie importé par les huguenots en Angleterre sous Louis XV.”
La collection “Gaia The Only One” printemps-été 2011 : l’ensemble Cendrillon de Vivienne Westwood
“Cette robe est l’une des tenues que Vivienne Westwood a le plus portées. D’ailleurs, Andreas Kronthaler me racontait qu’il ne pouvait plus se la voir en peinture tellement elle la mettait souvent !
C’est pour moi l’un des lots les plus émouvants de cette vente Christie’s. On peut voir sur les coutures toutes les reprises qu’elle a réalisées à la main pour pouvoir continuer à la mettre, malgré le fait qu’elle soit si abîmée… comme Cendrillon, finalement. Et ces points ne sont presque pas visibles, puisque le design original de la robe lui conférait déjà cet effet “abîmé”.
Pour cette collection de 2011, Vivienne s’est inspirée des ballets russes du début du 20e siècle dont elle était absolument émerveillée. Cette robe en satin bleu est vraiment unique : on y retrouve toute l’ingéniosité de la créatrice, et on peut ressentir ce lien tangible avec elle à travers de ces coutures, qui sont comme des traces de son amour pour l’ensemble. Connaître son attachement pour cette pièce, et revoir toutes les photographies d’elle en train de la porter, la rendent très spéciale.”
“Vivienne Westwood : The Personal Collection”, vente aux enchères jusqu’au 28 juin 2024. Exposition jusqu’au 24 juin à Christie’s, Londres.