Pourquoi on a tant aimé le défilé C.R.E.O.L.E
Pour son défilé de l’automne-hiver 2025-2026, Vincent Frédéric-Colombo, le créateur de la marque C.R.E.O.L.E a présenté une collection de silhouettes en hommage à une histoire complexe des Caraïbes anglophones.
Par Mélody Thomas.
La Windrush Generation vue par C.R.E.O.L.E
Ces dernières saisons, la jeune génération de designers a dû faire face à de nombreuses problématiques ; un recul des acheteurs, la perte de plateforme de e-commerce qui avaient à cœur de les soutenir et la difficulté de se faire une place dans une industrie où tout va si vite et où les marques sont si nombreuses.
En France, Vincent Frédéric-Colombo fait partie de cette génération que SPHÈRE, le programme de soutien de la Fédération de la Haute Couture et de la Mode, entend pourtant soutenir en cette période qui n’est pas des plus aisée. Comme chaque saison, la FHCM consacrait un espace pour ces créateurs au sein du Palais de Tokyo où C.R.E.O.L.E, le label du designer guadeloupéen, présentait son défilé automne-hiver 2024-2025.
Du tailoring au workwear, du reggae au hip-hop… Le melting pot de C.R.E.O.L.E
Cela fait désormais quatre ans que le créateur de la marque développe son projet vestimentaire, un volet qui puise en partie dans les soirées du collectif qu’il a créé avec la photographe Fanny Viguier en 2017. Connu pour son vestiaire sensuel qui propose ainsi une autre vision des masculinités, Vincent Frédéric-Colombo a fait le choix cette saison de développer sa collection et d’élargir la manière dont on envisage son travail.
“Je suis à un stade de stabilisation dans la maturité de la marque. Je garde certains de mes fondamentaux comme les vêtements en mesh, les débardeurs, l’over size qui vient autant du reggae que de la culture hip-hop… Mais je veux montrer qu’il n’y a pas que des choses très sexy dans ce que je crée, qu’il y aussi des notions de construction, une approche dans le tailoring, le workwear”, expliquait le designer dans les coulisses de son défilé.
Quelques minutes auparavant, son podium dévoilait “Windrush – One Way Ticket”, une collection de 16 silhouettes pensée comme un hommage aux communautés de ceux que l’on nomme Outre-Manche la “Windrush Generation”. Vincent Frédéric-Colombo : “C’est une histoire complexe qui a marqué aussi bien Les Caraïbes que l’Angleterre. Il s’agissait d’un programme de migration économique qui a ramené des personnes issues des colonies britanniques en Angleterre pour reconstruire le pays après la Seconde Guerre Mondiale”. Sur son podium, un casting masculin aux muscles saillants défile sur un mix où Mon papa à moi de Stomy Bugsy rencontre le Elle te rend dingue de Nuttea, porté par un rythme drum&bass.
Un défilé automne-hiver 2025-2026 en hommage aux Caraïbes anglophones
Une notion de créolisation au sens large qu’on retrouve autant dans la musique que dans les silhouettes. “J’ai voulu recréer une garde-robe de personnes qui sont dignes dans leur identité, fières de leur culture tout en s’associant aux codes de la culture dans lesquelles ils sont amenés”, explique Vincent-Frédéric Colombo qui a mêlé dans ses looks blazers et pantalons tailleurs, bermudas over size, chemises à carreaux et caleçons moulants. “Il y a le lion de Judas — issu de la culture rastafari – amené sur du tartan, des couleurs rétros, une évocation du dandisme, de la dentelle sur le bord de cols de certains blazer… Même l’usage des Clarks qui sont très anglaises et ont été popularisées par les Jamaïcains est un petit clin d’œil”.
Une histoire méconnue sur les territoires français et qui a pourtant son équivalent, le BUMIDOM. Un sujet que le designer entend aborder dans une prochaine collection tout en poursuivant une ambition “imprimer dans la rétine des gens ce qu’est l’esthétique C.R.E.O.L.E”.