23 nov 2020

Christine and the Queens: “I experienced sexism in its purist state”

Icône puissante de la pop française, célébrée de Londres à New York, Christine and the Queens vient de dévoiler son nouvel opus, “La vita nuova”, accompagné d’une vidéo flamboyante tournée au palais Garnier. Elle y affirme sa liberté absolue, refusant de se voir enfermer dans un style de musique ou dans la binarité des genres. Elle y donne ainsi la pleine mesure de ses identités multiples, aussi poétiques que magnétiques, incarnées sur scène par un corps, le sien, fascinant et jubilatoire. En exclusivité pour Numéro, Christine and the Queens s’est prêtée à nouveau à ce jeu d’interprétation dans lequel elle excelle.

Photos Colin Solal Cardo.

Interview by Thibaut Wychowanok.

Veste en cuir et bottes, PATRYCJA PAGAS. Boucles d’oreilles, Y/PROJECT.
Veste en cuir et bottes, PATRYCJA PAGAS. Boucles d’oreilles, Y/PROJECT.

Numéro : Vous êtes revenue par surprise en 2020 avec La vita nuova, un EP de six titres accompagné d’un court-métrage tourné au palais Garnier. Que recouvre cette “nouvelle vie” ?

Christine and the Queens : La chanson People, I’ve Been Sad a déclenché ce nouveau cycle d’écriture. Elle m’est arrivée comme un boulet de canon alors que ma vie était chamboulée par le deuil et par une histoire d’amour compliquée, et que tous les soirs, sur scène, je devais défendre mon deuxième album, charnel, puissant, chaud, en dissonance totale avec ce que je vivais. J’ai alors éprouvé le besoin d’initier un nouveau chapitre, plus introspectif. Dépasser mes blessures intimes nécessitait un retour au désir et à la sociabilité. La solution, c’était le club. Et cela s’est incarné dans la chanson La vita nuova et dans le final de la vidéo : l’Opéra se transforme littéralement en club. Le titre m’est venu en pensant à La Vie nouvelle de Dante, où le poète amoureux doit faire face à la disparition de l’être aimé. Dante exprime l’impérieuse nécessité de la poésie – comme lumière – après la perte. C’est le triomphe de la poésie sur la mort. Pour l’amour.

 

Ce nouveau cycle artistique arrive à la suite d’un deuxième album encensé par les Anglo-Saxons, mais fraîchement reçu par certains critiques français. Quel était le problème ?
J’ai été énormément secouée en France, et j’en ai beaucoup souffert. J’avais le sentiment de vouloir dire quelque chose et de n’être pas comprise. Pour être franche, après un succès aussi massif que celui du premier album, je savais que le deuxième serait difficile. Pas en termes d’écriture, au contraire, le succès m’avait remplie d’espoir et de force. Mais je redoutais plus que tout de crever vivante dans Chaleur humaine. Dans un deuxième Chaleur humaine, puis un troisième… En tant qu’artiste, j’ai besoin d’avoir peur, d’aller voir ailleurs. Alors j’ai imaginé le sacrilège. Je l’ai commis délibérément. Le deuxième album a été un acte de libération. Être artiste, à succès ou pas, c’est toujours une façon de devenir autre. Avec le deuxième album, j’ai barré mon nom. Christine and the Queens est devenu Chris, et j’ai pu préciser beaucoup de choses qui étaient déjà présentes dans le premier, mais que les gens n’avaient pas entendues. Ma féminité, par exemple, je l’ai précisée. Et cela est passé par la coupe de cheveux ! [Rires.] Tout d’un coup, parce que j’avais les cheveux courts, tout le monde a entendu ce que je disais depuis le début !

Numéro : Vous êtes revenue par surprise en 2020 avec La vita nuova, un EP de six titres accompagné d’un court-métrage tourné au palais Garnier. Que recouvre cette “nouvelle vie” ?

Christine and the Queens : La chanson People, I’ve Been Sad a déclenché ce nouveau cycle d’écriture. Elle m’est arrivée comme un boulet de canon alors que ma vie était chamboulée par le deuil et par une histoire d’amour compliquée, et que tous les soirs, sur scène, je devais défendre mon deuxième album, charnel, puissant, chaud, en dissonance totale avec ce que je vivais. J’ai alors éprouvé le besoin d’initier un nouveau chapitre, plus introspectif. Dépasser mes blessures intimes nécessitait un retour au désir et à la sociabilité. La solution, c’était le club. Et cela s’est incarné dans la chanson La vita nuova et dans le final de la vidéo : l’Opéra se transforme littéralement en club. Le titre m’est venu en pensant à La Vie nouvelle de Dante, où le poète amoureux doit faire face à la disparition de l’être aimé. Dante exprime l’impérieuse nécessité de la poésie – comme lumière – après la perte. C’est le triomphe de la poésie sur la mort. Pour l’amour.

 

Ce nouveau cycle artistique arrive à la suite d’un deuxième album encensé par les Anglo-Saxons, mais fraîchement reçu par certains critiques français. Quel était le problème ?
J’ai été énormément secouée en France, et j’en ai beaucoup souffert. J’avais le sentiment de vouloir dire quelque chose et de n’être pas comprise. Pour être franche, après un succès aussi massif que celui du premier album, je savais que le deuxième serait difficile. Pas en termes d’écriture, au contraire, le succès m’avait remplie d’espoir et de force. Mais je redoutais plus que tout de crever vivante dans Chaleur humaine. Dans un deuxième Chaleur humaine, puis un troisième… En tant qu’artiste, j’ai besoin d’avoir peur, d’aller voir ailleurs. Alors j’ai imaginé le sacrilège. Je l’ai commis délibérément. Le deuxième album a été un acte de libération. Être artiste, à succès ou pas, c’est toujours une façon de devenir autre. Avec le deuxième album, j’ai barré mon nom. Christine and the Queens est devenu Chris, et j’ai pu préciser beaucoup de choses qui étaient déjà présentes dans le premier, mais que les gens n’avaient pas entendues. Ma féminité, par exemple, je l’ai précisée. Et cela est passé par la coupe de cheveux ! [Rires.] Tout d’un coup, parce que j’avais les cheveux courts, tout le monde a entendu ce que je disais depuis le début !

Robe manteau en cuir, FENDI. Boucle d’oreille, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.
Robe manteau en cuir, FENDI. Boucle d’oreille, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.

Quelle féminité défendiez-vous avec Chris ?

Avec Chris, son côté BDSM et ses codes homoérotiques, je prends la place du macho : “Allez, dégage, que je m’y mette !” J’ai eu beaucoup de discussions avec des journalistes sur le désir et le corps de la femme à l’époque. J’étais très surprise de leur conservatisme. La réception de Chris a été un cas d’école. Tout le bingo féministe était coché ! À l’époque, je crois que mon envie de me sexualiser en évitant le male gaze, c’est-à-dire en déconstruisant le regard dominant, n’a pas été comprise. Le male gaze fait du mal et commence seulement à être déconstruit. Je pense au travail de certaines cinéastes comme Céline Sciamma. Déconstruire, c’est ramener sa personnalité à soi et prendre le pouvoir. Des artistes comme Madonna l’ont fait bien avant moi, en subvertissant le male gaze et en ramenant leur subjectivité : ses seins coniques étaient l’expression d’une super féminité agressive. Le male gaze est une construction très envahissante, il a nourri toute la pop culture. Mais le deuxième album m’a rappelé qu’on peut faire passer un message avec une coupe de cheveux. Les vrais personnages de la pop sont des créatures de théâtre et de la subversion. À la Madonna ou à la Lady Gaga. Lorsque tu commences à réfléchir à toi en tant que créature qui existe dans une théâtralité, les possibilités sont infinies. Et une fois que tu as commencé à choisir, tu peux changer d’avis. La pop star est celle qui change d’avis tout le temps pour coller à sa musique.

 

 

Comment ce jeu sur les identités s’est-il épanoui au sein de La vita nuova ?
Avec La vita nuova, j’amorce une autre idée autour d’une véritable fluidité. J’existe dans ce film sous de multiples formes. Je parle souvent de Bowie parce qu’à mes yeux il incarne cette capacité. Définir son genre n’a plus aucun intérêt. Le queer est mieux compris dans le monde anglo-saxon, confronté depuis longtemps à des personnalités qui se construisent en tant que créatures, hors de la binarité des genres. Je m’installe dans des espaces de fluidité et de liberté. Dans la vidéo de La vita nuova, je me permets de porter une robe – ce que je n’avais encore jamais fait, puis de passer à un costume à épaulettes. Rien n’est rigide. C’est le retour, aussi, à l’idée du théâtre qui me sauve la vie, et qui me fait exister. Le théâtre, comme le club, est la solution. Au palais Garnier, je pose une nouvelle fois mes valises dans le théâtre et je n’en sors pas.

 

 

Quelle féminité défendiez-vous avec Chris ?

Avec Chris, son côté BDSM et ses codes homoérotiques, je prends la place du macho : “Allez, dégage, que je m’y mette !” J’ai eu beaucoup de discussions avec des journalistes sur le désir et le corps de la femme à l’époque. J’étais très surprise de leur conservatisme. La réception de Chris a été un cas d’école. Tout le bingo féministe était coché ! À l’époque, je crois que mon envie de me sexualiser en évitant le male gaze, c’est-à-dire en déconstruisant le regard dominant, n’a pas été comprise. Le male gaze fait du mal et commence seulement à être déconstruit. Je pense au travail de certaines cinéastes comme Céline Sciamma. Déconstruire, c’est ramener sa personnalité à soi et prendre le pouvoir. Des artistes comme Madonna l’ont fait bien avant moi, en subvertissant le male gaze et en ramenant leur subjectivité : ses seins coniques étaient l’expression d’une super féminité agressive. Le male gaze est une construction très envahissante, il a nourri toute la pop culture. Mais le deuxième album m’a rappelé qu’on peut faire passer un message avec une coupe de cheveux. Les vrais personnages de la pop sont des créatures de théâtre et de la subversion. À la Madonna ou à la Lady Gaga. Lorsque tu commences à réfléchir à toi en tant que créature qui existe dans une théâtralité, les possibilités sont infinies. Et une fois que tu as commencé à choisir, tu peux changer d’avis. La pop star est celle qui change d’avis tout le temps pour coller à sa musique.

 

 

Comment ce jeu sur les identités s’est-il épanoui au sein de La vita nuova ?
Avec La vita nuova, j’amorce une autre idée autour d’une véritable fluidité. J’existe dans ce film sous de multiples formes. Je parle souvent de Bowie parce qu’à mes yeux il incarne cette capacité. Définir son genre n’a plus aucun intérêt. Le queer est mieux compris dans le monde anglo-saxon, confronté depuis longtemps à des personnalités qui se construisent en tant que créatures, hors de la binarité des genres. Je m’installe dans des espaces de fluidité et de liberté. Dans la vidéo de La vita nuova, je me permets de porter une robe – ce que je n’avais encore jamais fait, puis de passer à un costume à épaulettes. Rien n’est rigide. C’est le retour, aussi, à l’idée du théâtre qui me sauve la vie, et qui me fait exister. Le théâtre, comme le club, est la solution. Au palais Garnier, je pose une nouvelle fois mes valises dans le théâtre et je n’en sors pas.

 

 

Robe manteau en cuir, FENDI. Boucle d’oreille, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.
Robe manteau en cuir, FENDI. Boucle d’oreille, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.

Imposer cette fluidité des genres et cette théâtralité est-il plus facile aujourd’hui ?

Quand tu veux exister dans la nuance et dans l’hésitation, ta vie devient un combat. À tous les niveaux, même les plus infimes. Quand tu veux définir ta musique par exemple. Depuis toujours, les gens ne supportent pas que je ne réponde pas clairement à la question : “C’est quoi ta musique ?” Je ne sais pas, moi ! De la pop ?! “Mais quoi, comme pop ?” De la pop… hybride ?! “De la pop française, alors ?” Toujours ce besoin rageur de classer. L’indétermination ouvre des possibles qui font peur. Ne pas répondre est un acte de résistance. Mais j’accepte que chaque moment de création me confronte à ce que j’ai envie de devenir. Le geste de libération est perpétuellement à refaire.

 

Comment s’est forgée votre sensibilité à ces questions de genre et d’identité ?

J’ai eu la chance d’hériter d’un patrimoine culturel très fort. Mes deux parents sont profs. Mon père enseignait la littérature anglaise et a beaucoup travaillé sur les gender studies. Chez moi, il y avait Judith Butler [auteure du Trouble dans le genre, offrant une nouvelle définition du genre comme performance]. À 15 ans, j’ai lu Judith Butler qui mettait des mots sur des ressentis que j’avais déjà. Très jeune, j’ai voulu devenir auteure. Et très jeune, j’ai eu l’impression que pour cela il fallait être un homme. Mes fantasmes de devenir un homme étaient nés ! Encore aujourd’hui, on me demande toujours si j’écris mes chansons moi-même. Dans l’inconscient collectif, une femme ne peut être qu’une interprète. Ou une muse, c’est-à-dire une figure investie par la voix d’un homme.

Imposer cette fluidité des genres et cette théâtralité est-il plus facile aujourd’hui ?

Quand tu veux exister dans la nuance et dans l’hésitation, ta vie devient un combat. À tous les niveaux, même les plus infimes. Quand tu veux définir ta musique par exemple. Depuis toujours, les gens ne supportent pas que je ne réponde pas clairement à la question : “C’est quoi ta musique ?” Je ne sais pas, moi ! De la pop ?! “Mais quoi, comme pop ?” De la pop… hybride ?! “De la pop française, alors ?” Toujours ce besoin rageur de classer. L’indétermination ouvre des possibles qui font peur. Ne pas répondre est un acte de résistance. Mais j’accepte que chaque moment de création me confronte à ce que j’ai envie de devenir. Le geste de libération est perpétuellement à refaire.

 

Comment s’est forgée votre sensibilité à ces questions de genre et d’identité ?

J’ai eu la chance d’hériter d’un patrimoine culturel très fort. Mes deux parents sont profs. Mon père enseignait la littérature anglaise et a beaucoup travaillé sur les gender studies. Chez moi, il y avait Judith Butler [auteure du Trouble dans le genre, offrant une nouvelle définition du genre comme performance]. À 15 ans, j’ai lu Judith Butler qui mettait des mots sur des ressentis que j’avais déjà. Très jeune, j’ai voulu devenir auteure. Et très jeune, j’ai eu l’impression que pour cela il fallait être un homme. Mes fantasmes de devenir un homme étaient nés ! Encore aujourd’hui, on me demande toujours si j’écris mes chansons moi-même. Dans l’inconscient collectif, une femme ne peut être qu’une interprète. Ou une muse, c’est-à-dire une figure investie par la voix d’un homme.

Veste en cuir, MUGLER. Bagues et bracelet, PANCONESI.
Veste en cuir, MUGLER. Bagues et bracelet, PANCONESI.

Avez-vous été confrontée au sexisme dans votre jeunesse ?

J’ai vécu le sexisme à l’état pur pendant mes études de théâtre. À 18 ou 19 ans, on m’a refusé une bourse d’écriture alors que trois garçons l’avaient eue. Personne n’a été capable de me dire pourquoi. Plus jeune, j’étais enragée, enragée d’être une femme. Parce que je savais que ça allait être plus compliqué pour moi. Après la misogynie que j’avais rencontrée à l’école de théâtre, je suis arrivée avec plus de fermeté dans le milieu de la musique. J’ai signé avec la maison de disques qui allait respecter mon travail d’auteure et de productrice.

 

 

Vous citez souvent Fureur et Mystère de René Char, dont la poésie oscille entre les passions furieuses et une vie plus contemplative et plus mystérieuse. Vivez-vous cette ambivalence ?

Elle a structuré ma vie. Je faisais une scission très nette entre la scène et la vie. Je me disais souvent : “Moi, sur scène, je coïncide avec le monde, je suis présente à moi-même… Et hors de la scène, c’est le drame ! Le syndrome Spider-Man/Peter Parker.” Jeune, j’étais très seule. Je me suis toujours sentie en légère dissonance avec le monde. C’est souvent le cas quand on écrit. Écrire, c’est cruel. L’écrivain est un voleur. Les personnes autour de moi peuvent avoir l’impression que ce qu’elles vivent avec moi, elles ne le vivent pas qu’avec moi. Lorde l’a très bien chanté dans un de ses titres : “This is what happens when you kiss a writer in the dark” (“Voilà ce qui arrive quand tu embrasses un auteur dans le noir”). Mais j’assume aujourd’hui d’être une voleuse de sensations.

Avez-vous été confrontée au sexisme dans votre jeunesse ?

J’ai vécu le sexisme à l’état pur pendant mes études de théâtre. À 18 ou 19 ans, on m’a refusé une bourse d’écriture alors que trois garçons l’avaient eue. Personne n’a été capable de me dire pourquoi. Plus jeune, j’étais enragée, enragée d’être une femme. Parce que je savais que ça allait être plus compliqué pour moi. Après la misogynie que j’avais rencontrée à l’école de théâtre, je suis arrivée avec plus de fermeté dans le milieu de la musique. J’ai signé avec la maison de disques qui allait respecter mon travail d’auteure et de productrice.

 

 

Vous citez souvent Fureur et Mystère de René Char, dont la poésie oscille entre les passions furieuses et une vie plus contemplative et plus mystérieuse. Vivez-vous cette ambivalence ?

Elle a structuré ma vie. Je faisais une scission très nette entre la scène et la vie. Je me disais souvent : “Moi, sur scène, je coïncide avec le monde, je suis présente à moi-même… Et hors de la scène, c’est le drame ! Le syndrome Spider-Man/Peter Parker.” Jeune, j’étais très seule. Je me suis toujours sentie en légère dissonance avec le monde. C’est souvent le cas quand on écrit. Écrire, c’est cruel. L’écrivain est un voleur. Les personnes autour de moi peuvent avoir l’impression que ce qu’elles vivent avec moi, elles ne le vivent pas qu’avec moi. Lorde l’a très bien chanté dans un de ses titres : “This is what happens when you kiss a writer in the dark” (“Voilà ce qui arrive quand tu embrasses un auteur dans le noir”). Mais j’assume aujourd’hui d’être une voleuse de sensations.

Haut, jupe et cagoule en métal, PACO RABANNE. Bottes, PATRYCJA PAGAS.
Haut, jupe et cagoule en métal, PACO RABANNE. Bottes, PATRYCJA PAGAS.
Soutien-gorge, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Pantalon en cuir, Y/PROJECT.
Soutien-gorge, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Pantalon en cuir, Y/PROJECT.
Bustier drapé en cuir, BALMAIN
Bustier drapé en cuir, BALMAIN

Dans l’identité de Christine and the Queens, il y a aussi l’intensité du corps et de la danse. Quels sont les chorégraphes qui vous ont influencée ?
Pina Bausch a changé ma vie. Quand, à 18 ans, je l’ai vue pour la première fois, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. J’ai découvert que la danse est un véritable langage émotionnel. Ce n’est pas tant la beauté du mouvement qui compte, c’est la justesse. Cette capacité à raconter toutes les tensions et les mémoires du corps. J’ai suivi une formation classique de danse, mais je n’avais pas un assez bon cou-de-pied pour faire des pointes [rires]. J’ai pris des cours, mais je dansais surtout chez moi, tout le temps. Ça a été difficile de trouver plus tard des interlocuteurs dans la pop qui comprennent mon approche. La danse de divertissement est trop souvent une façon de meubler. Cette manière hégémonique de mettre en valeur le chanteur m’ennuie à mourir. Sur ma tournée, j’avais essayé de choisir des personnalités fortes, des danseurs qui puissent me menacer dans ma position de leader. Danser, c’est se créer un corps aussi. J’avais envie de me créer un corps ambivalent. C’est pour ça que je voulais travailler avec Marion Motin. J’avais repéré son travail sur des blogs avant qu’elle ne bosse avec Stromae. Son vocabulaire est très androgyne. Elle est gracieuse et puissante. Avec Marion, je pouvais citer Michael Jackson et Pina Bausch.

 

Pour la vidéo de La vita nuova, vous avez travaillé avec le chorégraphe Ryan Heffington…

Ryan propose une danse très cathartique, comme une pure cérémonie chamanique. Les visages grimacent, les langues sont tirées. J’ai toujours adoré son travail mais il fallait trouver le projet adéquat. C’était une évidence pour La vita nuova et son côté baroque. Il n’était présent que cinq jours à Paris. Nous avons appris les chorégraphies en deux jours. Le tournage était démentiel, frénétique. Les visages que je prends sur People, I’ve Been Sad m’échappent. Ce n’était pas joli, mais dans le bon sens du terme. J’aime l’idée de résister face à la caméra et de ne pas être dans la séduction en permanence. Ryan écrit pour les visages. Le visage est toujours là chez les chorégraphes qui veulent tout raconter. Comme chez Pina Bausch. Alors que dans les chorégraphies pop, il faut toujours le “smile”. Et moi, ça me fout les boules.

Dans l’identité de Christine and the Queens, il y a aussi l’intensité du corps et de la danse. Quels sont les chorégraphes qui vous ont influencée ?
Pina Bausch a changé ma vie. Quand, à 18 ans, je l’ai vue pour la première fois, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. J’ai découvert que la danse est un véritable langage émotionnel. Ce n’est pas tant la beauté du mouvement qui compte, c’est la justesse. Cette capacité à raconter toutes les tensions et les mémoires du corps. J’ai suivi une formation classique de danse, mais je n’avais pas un assez bon cou-de-pied pour faire des pointes [rires]. J’ai pris des cours, mais je dansais surtout chez moi, tout le temps. Ça a été difficile de trouver plus tard des interlocuteurs dans la pop qui comprennent mon approche. La danse de divertissement est trop souvent une façon de meubler. Cette manière hégémonique de mettre en valeur le chanteur m’ennuie à mourir. Sur ma tournée, j’avais essayé de choisir des personnalités fortes, des danseurs qui puissent me menacer dans ma position de leader. Danser, c’est se créer un corps aussi. J’avais envie de me créer un corps ambivalent. C’est pour ça que je voulais travailler avec Marion Motin. J’avais repéré son travail sur des blogs avant qu’elle ne bosse avec Stromae. Son vocabulaire est très androgyne. Elle est gracieuse et puissante. Avec Marion, je pouvais citer Michael Jackson et Pina Bausch.

 

Pour la vidéo de La vita nuova, vous avez travaillé avec le chorégraphe Ryan Heffington…

Ryan propose une danse très cathartique, comme une pure cérémonie chamanique. Les visages grimacent, les langues sont tirées. J’ai toujours adoré son travail mais il fallait trouver le projet adéquat. C’était une évidence pour La vita nuova et son côté baroque. Il n’était présent que cinq jours à Paris. Nous avons appris les chorégraphies en deux jours. Le tournage était démentiel, frénétique. Les visages que je prends sur People, I’ve Been Sad m’échappent. Ce n’était pas joli, mais dans le bon sens du terme. J’aime l’idée de résister face à la caméra et de ne pas être dans la séduction en permanence. Ryan écrit pour les visages. Le visage est toujours là chez les chorégraphes qui veulent tout raconter. Comme chez Pina Bausch. Alors que dans les chorégraphies pop, il faut toujours le “smile”. Et moi, ça me fout les boules.

Robe en organza de soie, PATRYCJA PAGAS. Chaussures, Y/PROJECT. Pièce en latex de l’artiste Stef Van Looveren.
Robe en organza de soie, PATRYCJA PAGAS. Chaussures, Y/PROJECT. Pièce en latex de l’artiste Stef Van Looveren.
Bustier et jupe en coton et organza brodés d’or, DI PETSA. Bijoux, MUGLER.
Bustier et jupe en coton et organza brodés d’or, DI PETSA. Bijoux, MUGLER.
Haut en latex, KJELL DE MEERSMAN. Bustier en corde, SHAWNA WU. Réalisation : Natacha Voranger. Coiffure : Paolo Ferreira chez Calliste Agency. Maquillage : Karin Westerlund chez Artlist Paris. Manucure : Huberte Césarion chez Marie-France Thavonekham Agency. Set design : Cécile di Giovanni. Assistante réalisation : Adèle Berson. Numérique : Brice Dossin chez Dope Paris. Production : Berlin Group. Remerciements à Philippe Saint-Gilles.
Haut en latex, KJELL DE MEERSMAN. Bustier en corde, SHAWNA WU. Réalisation : Natacha Voranger. Coiffure : Paolo Ferreira chez Calliste Agency. Maquillage : Karin Westerlund chez Artlist Paris. Manucure : Huberte Césarion chez Marie-France Thavonekham Agency. Set design : Cécile di Giovanni. Assistante réalisation : Adèle Berson. Numérique : Brice Dossin chez Dope Paris. Production : Berlin Group. Remerciements à Philippe Saint-Gilles.