13 fév 2017

Mykita, les secrets d’une success story de l’eyewear

Collaborations pointues (Margiela, Tim Coppens…), design sophistiqué et fabrication à la main font depuis près de quinze ans le succès du label indépendant Mykita. Mais que cache cette success story atypique ?

Dans une industrie dominée par les grands groupes et les licences de maisons de luxe, la success story Mykita est loin de passer inaperçue. Depuis bientôt quinze ans, le label berlinois a forgé sa réputation à coup de créations ultra-design “fabriquées main” et de collaborations pointues, de Damir Doma à Tim Coppens en passant par Maison Margiela, sans jamais perdre son indépendance. Et si ses lunettes sont aujourd’hui distribuées dans plus de 80 pays, c’est toujours au sein de la Mykita-Haus, monumentale bâtisse installée dans le quartier de Kreuzberg à Berlin, que sont pensées, conçues et fabriquées l’ensemble des collections. Indépendance d’esprit, esthétique moderniste assumée et savoir-faire artisanal 2.0 y sont toujours célébrés comme si rien n’avait changé – si ce n’est le succès – depuis la fondation de la maison en 2003 par quatre amis, Philipp Haffmans, Harald Gottschling, Daniel Haffmans et Moritz Krueger.

Vue de l’atelier Mykita dans le quartier de Kreuzberg à Berlin.

Une start-up high-tech… artisanale

 

À la croisée de deux mondes, la high-tech et l’artisanat, Mykita tient à la fois de la start-up high-tech initiée dans un garage, façon Apple et Google, et de l’entreprise collective, libre et créative, typiquement berlinoise. Installée à l'origine dans une ancienne garderie d’enfants (Kindertagesstätte en allemand) – le diminutif du lieu “kita” inspirera d’ailleurs son nom aux quatre fondateurs –, Mykita est née dans le Berlin des loyers bas et de la créativité exacerbée des années 2000. Un moment où toute l’Europe ne jurait que par le renouveau de la capitale allemande. “Notre force à l’époque, confie aujourd’hui Moritz Krueger, était d’avoir finalement assez peu de connaissances sur l’industrie de l’eyewear, ses méthodes et ses process. À Berlin, il n’existait aucune entreprise qui aurait pu nous servir de modèle ou nous inspirer. Il a fallu tout inventer en autodidactes. C’était aussi l’esprit du Berlin de l’époque. Cela nous a obligés à innover et à proposer des solutions à contre-courant d’un milieu très dogmatique.” 

 

 

“À Berlin, il n’existait aucune entreprise qui aurait pu nous servir de modèle ou nous inspirer. Il a fallu tout inventer en autodidactes.”

En 2004, première révolution : Mykita propose des lunettes aussi légères qu’une feuille de papier réalisées d’une seule pièce, sans vis ni joints soudés, à partir de plaques d’acier inoxydable. Son mantra : le fabriqué main et le no logo. “Nous découpons toujours aujourd’hui certaines lunettes dans ses larges plaques d’acier afin de les monter un peu à la manière d’un origami japonais“, commente Moritz Krueger, aujourd’hui direction de création de la marque. Mais à l’époque, nous étions les premiers à utiliser cette méthode. Les machines et les outils n’existaient pas. Là encore, nous avons dû inventer. Par nécessité, l’innovation a toujours été au cœur de notre processus créatif.“ 

Une plaque d’acier inoxydable à partir de laquelle sont réalisées les lunettes aussi légères qu’une feuille de papier.

En 2004, première révolution : Mykita propose des lunettes aussi légères qu’une feuille de papier réalisées sans vis ni joints soudés à partir de plaques d’acier inoxydable. Son mantra : le fabriqué main et le no logo. “Nous découpons toujours aujourd’hui certaines lunettes dans de larges plaques d’acier, afin de les monter un peu à la manière d’un origami japonais, commente Moritz Krueger, directeur de création de la marque. Mais à l’époque, nous étions les premiers à utiliser cette méthode. Les machines et les outils n’existaient pas. Là encore, nous avons dû inventer. Par nécessité, l’innovation a toujours été au cœur de notre processus créatif.” 

 

 

"Nous découpons toujours aujourd’hui certaines lunettes dans de larges plaques d’acier, afin de les monter un peu à la manière d’un origami japonais.”

Une manufacture 2.0

 

Relocalisée depuis 2014 dans une ancienne usine du quartier de Kreutzberg à Berlin, la manufacture Mykita s'éloigne pourtant largement des clichés de la start-up high-tech, s'apparentant davantage au studio de création arty berlinois. Dans les premiers étages, dédiés au traitement du métal et à la fabrication, c’est le choc des cultures et des époques : de jeunes trentenaires tatoués – qu’on imaginerait plutôt dans un club underground – se penchent sur des machines artisanales à la précision horlogère. Déployé sur 5 niveaux et plus de 15 000 m2, ce bâtiment érigé en 1902 réunit tous les métiers et tous les talents : conception, production, communication… L’architecture des boutiques est aussi réalisée en interne.  Et Mykita s’apprête justement à ouvrir, en avril, son nouveau shop parisien au cœur du Marais. “Nous avons développé une vision holistique de la marque, confie Moritz Krueger. Nous travaillons tous au même endroit, nous partageons toutes nos idées. Mykita forme une grande cuisine. Nous y avons développé des ingrédients, comme notre nouveau matériau le Mylon, et des savoir-faire spécifiques. Chaque membre de l’équipe est libre d’en user, mais aussi d’apporter ses propres recettes et ingrédients.”

 

 

 

“Mykita forme une grande cuisine. Nous y avons développé des ingrédients. Chaque membre de l’équipe est libre d’en user, mais aussi d’apporter ses propres recettes.”

La collaboration Mykita et Bernhard Willhelm.

Un culte de la créativité

 

Point fort de la marque, les collaborations avec les créateurs de mode participent pleinement à sa notoriété. Pour sa collection homme 2009, le Belge Bernhard Willhelm fait appel à Mykita… deux semaines avant le show. Le label parvient à fournir 3 modèles au créateur pour le jour de son défilé. “Notre extrême flexibilité nous distingue de nos concurrents, confirme Moritz Krueger. Puisque tout est fait sur place, nous n’avons pas à négocier avec des sous-traitants en Chine, et nous gagnons un temps précieux. Il n’y a pas de temps perdu entre l’idée et sa réalisation.” Ont suivi des collaborations avec Damir Doma – plus de trois ans de développement cette fois-ci, Maison Margiela, et plus récemment avec Tim Coppens pour son défilé de janvier 2017 au Pitti Uomo. 

Mais la maison sait également déployer son esthétique au sein de ses propres collections capsules, à travers la ligne Mykita Studio. “Nous ressentions le besoin de créer des collections créatives à l’identité très forte. Un endroit où nous pourrions expérimenter nos idées dans toute leur radicalité.” Les trois récentes collections poussent ainsi jusque dans ses retranchements l’esthétique moderniste et futuriste de la maison, inspirée de l’aéronautique et de l’automobile. Entre poésie, architecture et design industriel, chaque pièce explore un univers visuel particulier : le meilleur de l’Art déco inspiré du Metropolis de Fritz Lang, les effets graphiques, les superpositions géométriques ou encore des twists audacieux de formes rondes et rectangulaires en format oversize. Ou quand la beauté la plus sophistiquée rencontre la technologie la plus innovante. 

 

 

mykita.com

 

 

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L’une des récentes créations issue de la ligne Mykita Studio.