7 juil 2021

Qui sont les Sparks, le duo culte à l’origine de la comédie musicale “Annette” ?

En 1968, Russel et Ron Mael fondent un groupe de rock, les Sparks. Depuis, les deux frères californiens propulsés par leur succès à Londres ont influencé les plus grands noms de la musique du XXe siècle, entre Queen, Depeche Mode et Björk. Aujourd’hui âgés de 72 et 75 ans, les deux musiciens indémodables ont écrit et composé la comédie musicale “Annette” de Leos Carax, une romance dramatique dépeignant la noirceur de l’univers du music-hall.

Cover de l’album « Propaganda » (1974) des Sparks.

Le 20 décembre 1972, devant l’entrée du mythique Marquee Club de Londres, les Sparks s’apprêtent à donner un concert. Ce soir-là, c’est un groupe débutant qui assurera leur première partie : un quator de jeunes hommes réunis sous le nom de Queen. Lorsque leur leader, Freddie Mercury, demande aux Sparks de les aider à porter leurs caissons, ces derniers répondent : “Non, allez vous faire foutre, on est les Sparks !”. Le ton est donné. Fondé quatre ans plus tôt par deux frères californiens, Russel et Ron Mael, les Sparks forment un duo déjanté et connaissent un succès fulgurant sur la scène rock londonienne du début des années 70, où ils inspirent les plus grands musiciens de l’époque. À l’origine d’un tel succès : une musicalité élastique et novatrice, qui pioche dans une flopée de genres musicaux, entre glam, disco, new wave et art rock. En 1974, leur morceau en forme d’opérette This town ain’t big enough for both of us, extrait de leur album Kimono My House, a largement inspiré le tube planétaire de Queen, Bohemian Rhapsody… Puis c’est au tour de Paul McCartney des Beatles de faire une séance photo habillé comme Ron, le claviériste des Sparks et frère aîné de Russel, qui crée un personnage de sévère de comptable impassible, bien loin des figures dévergondées du rock seventies.

Si l’anti-conformisme est leur marque de fabrique, il les empêchera de tomber dans les mélodies faciles du hit parade, et ne les rendra jamais vraiment mainstream. À la fin des années 70, leur succès décline, alors les deux frères opèrent un virage risqué à l’aide de Giorgio Moroder, le génial producteur de Donna Summer. De cette union artistique naît l’album N°1 in Heaven, qui redéfinit leur direction musicale, un disco saupoudré de pop synthétisée. Depuis, le duo n’a jamais cessé de se réinventer musicalement, en gardant toujours le fil rouge d’un ton déjanté et grinçant, comme dans l’album Lil Beethoven (2002), qui met en scène les drames de la vie quotidienne à l’aide de morceaux aux airs d’opéra rock. Et depuis, la graine de la dramaturgie a mûri chez les musiciens, qui décident d’écrire Annette, l’histoire d’un couple de stars et de leur fille prodige. Si le projet devait d’abord être mis en scène au théâtre, c’était sans compter sur le coup de cœur du réalisateur Leos Carax pour la sombre comédie musicale écrite par le groupe qui a inspiré Queen.

 

 

Les trois artistes sympathisent immédiatement, d’abord grâce à leur passion commune pour Les Parapluies de Cherbourg de Jacques Demy… Puis, le réalisateur d’Holy Motors (2012) choisit deux grands habitués du drame, Marion Cotillard (De Rouille et d’os) et Adam Driver (Marriage Story) pour incarner les monstres sacrés imaginés par les frères Mael. Pour son sixième film d’une carrière longue de 35 ans, le réalisateur français a entrepris de mettre en scène la comédie musicale dépeignant la noirceur de l’univers du music-hall, entre acteurs dominés par leur égo et enfants sacrifiés par le succès. Ironiquement, c’est ce tableau tragique qui a ouvert le Festival de Cannes hier, jetant un voile noir sur l’éclat du rendez-vous le plus glamour du cinéma.

 

Annette (2021) de Leos Carax, en salles.