23 juin 2020

Un titre explose avec le mouvement Black Lives Matter

Le mouvement Black Lives Matter connaît une résurgence sans précédent depuis la mort de George Floyd, tué en mai dernier par la police de Minneapolis, dans le Minnesota. De fait, de nombreuses oeuvres culturelles issues de la culture afro-américaine ont gagné, voire regagné une grande popularité. Certains titres et albums ont grimpé jusqu'en haut des charts, comme en témoigne le magazine Billboard. 

Sorti il y a un peu plus de deux ans, This Is America raflait tout sur son passage. Clip choc de Childish Gambino, qui avait déjà conquis les foules grâce à sa série Atlanta ou bien à son album Awaken, My Love!, le morceau de quatre minutes met tout le monde d’accord. En une semaine, la vidéo cumule 100 millions de vues, avant d’être couverte de récompenses, dont 4 Grammy Awards, parmi lesquels celui de la meilleure chanson, et du meilleur clip.

 

Aujourd’hui, à l’heure où le mouvement Black Lives Matter connaît une résurgence sans précédent, This Is America grimpe une nouvelle fois au top des charts. En quelques jours, le morceau cumule plus d’un milliard d’écoutes, et se place 2ème au classement Billboard. Ce n’est presque pas une surprise, étant donné le parti pris du clip (comme du titre), qui avait déjà choqué le monde lors de sa sortie en mai 2018.

“This Is America”, réalisé par Hiro Murai

Un clip mémorable

 

Un air de guitare doux, un coup de feu, et le chaos. This Is America a marqué les esprits grâce à ses images hautement perturbantes, où l’on traîne des cadavres au sol, tandis qu’on prend grand soin des armes à feu. Un miroir dérangeant de la société américaine, où le divertissement prime sur les questions sociales. Tout au long du clip réalisé par Hiro Murai – collaborateur de Flying Lotus et de St Vincent, qui avait déjà réalisé quelques épisodes de Atlanta –, plusieurs scènes se superposent. Au premier plan, Childish Gambino danse le Gwara Gwara – une danse sud-africaine – entouré d’une troupe aux mines rayonnantes. Pendant ce temps, l’arrière-plan mêle émeutes et incendies, cheval blanc apocalyptique et jeunes adolescents planqués derrière leurs smartphones. En quatre minutes, ce presque plan-séquence dénonce à la fois les violences policières, le lobby des armes comme la société du spectacle.

 

Peuplée de références, la vidéo a été tournée dans un entrepôt désaffecté, laissant libre cours à l’imagination. C’est d’abord la fusillade d’un gospel qui bouleverse les esprits, au milieu du clip. Celle-ci fait écho à la tuerie raciste de neuf personnes noires survenue dans une église protestante de Caroline du Sud, à Charleston, en 2015. Son auteur, Dylann Roof, avait déclaré vouloir provoquer une “guerre raciale”. En outre, Donald Glover, de son vrai nom, emprunte des mimiques que l’on pourrait attribuer à Jim Crow : en 1832, Thomas Dartmouth Rice, un comédien blanc, émigrant anglais, interprète Jump Jim Crow, une chanson populaire racontant les déboires d’un esclave noir, en se noircissant le visage et les mains. Une trentaine d’années plus tard, les lois Jim Crow instituent la ségrégation raciale dans les États du Sud des États-Unis.

Childish Gambino danse le Gwara Gwara (danse d’Afrique du Sud)

Des invités de choix

 

Pour les spectateurs les plus attentifs, la chanteuse SZA fait un caméo des plus discrets à la fin du clip de This Is America. Perchée sur le capot d’une voiture délabrée, elle lance un regard complice à la caméra. Si elle est la seule célébrité à faire une apparition dans la vidéo chaotique, le morceau regorge de voix plus ou moins connues. Young Thug, Chance The Rapper, Blocboy JB, Offset ou encore Quavo ont tous signé quelques vers accrocheurs.

 

Enfin, il est pertinent de remarquer que les enfants et les adolescents sont les véritables stars de This Is America, qu’ils soient en train de danser les chorégraphies signées Sherrie Silver, de fuir la police ou bien de filmer les évènements avec leurs smartphones. Symboles de l’innocence par excellence, leur présence n’a rien d’anodin, et renforce le contraste saisissant entre les scènes festives, autour de lycéens qui dansent et, en arrière-plan, le chaos qui se déroule.