2 sep 2020

Summer Walker, the star who doesn’t want to be famous

Avant de devenir stripteaseuse, Summer Walker chantait dans sa salle de bain. Parfois effrayée par le monde, la chanteuse représente pourtant le futur du R’n’B américain. Portrait d’une star en puissance timide qui voudrait redevenir elle-même.

Accrochée au manche d’une guitare qui la rassure, Summer Walker fredonne devant sa caméra et ressuscite l’ère MySpace sans le vouloir. Sa baignoire fait office de scène, sa salle de bain d’auditorium. Plus tard dans la soirée, elle enfile son costume de stripteaseuse et s’abandonne à la fournaise d’un club qui a fonction d’exutoire. Les deux épisodes seront partagés sur Instagram comme si ce dédoublement de la personnalité était ordinaire.

 

Aujourd’hui, Summer Walker a 23 ans. Elle compose depuis qu’elle est en âge de le faire. Si elle le pouvait, la Texane se contenterait de glisser ses partitions sous la porte avant de s’enfuir en silence… mais le star-system en a décidé autrement. En 2018, elle signe sur le label LVRN qui soutient notamment le chanteur d’Atlanta 6lack. Très vite, les adeptes de R’n’B adoubent cette soul girl d’un nouveau genre qui pourrait pleurer sur scène à tout moment, tourmentée par les regards et l’affection que les gens lui portent.

Dévoilé mi-octobre, le clip Playing Games condense – musicalement et esthétiquement – tous les éléments nécessaires à l’élaboration d’un titre de R’n’B efficace : étendue sur un divan noir, protégée par une brassière à froufrou rose qui renforce son personnage de mante religieuse lassée par les hommes, Summer Walker contemple un type enchaîné, en lévitation au dessus d’elle. Avec l’album Over It, elle a tenté de fuir sa réalité. Parachutée dans l’industrie musicale, elle doit incarner celle qui se sent bien. Une bombe sexuelle implacable dont l’esthétique Haribo renferme pourtant une mélancolie sombre.

 

Summer Walker ne s’en cache pas : la musique est sa came. Un besoin vital, une thérapie pas vraiment assumée. Donc elle se shoote à la néo-soul d’Erykah Badu et d’Amy Winehouse puis fantasme les années 90 jusqu’à reprendre les mélodies d’Usher. Timide, parfois maladroite, c’est abritée sous la capuche d’un sweat-shirt noir qu’elle entonne le Girls Need Love qui l’a rendue célèbre dans le Jimmy Kimmel Live en février dernier. L’astuce, un groove déjà vintage, la délicatesse de Jhené Aiko et l’attitude de quelqu’un qui se contrefout du triomphe. On retient Body et Stretch You Out partagé avec le rappeur A Boogie wit da Hoodie. Ici ou ailleurs, Summer Walker est encore dans sa salle de bain.

Telle une célébrité agoraphobe qui subit son statut, Summer Walker produit des chansons d’amour en slow motion. Elle aurait pu se contenter de composer pour les autres mais elle a actionné la machine infernale. Sa tournée a d’ores et déjà débuté, la jeune femme doit affronter la foule alors qu’elle peine déjà à affronter le monde. Incapable de contrôler son image, elle l’a confiée au capitalisme, passant de la jeune chanteuse source de fantasme à la pin-up façonnée par le marché. Le pire dans cette histoire, c’est que la soul de Summer Walker est revigorante.

 

 

Over It, de Summer Walker, disponible.

 

Clinging to a guitar as if it were a security blanket, Summer Walker hums in front of her camera, resurrecting the MySpace era without even meaning to. Her bathtub is the stage, her bathroom the auditorium. Later in the evening, she slips into her stripper's outfit and abandons herself to the furnace of the club that serves as a release valve. The two episodes will be shared on Instagram as if this split personality is perfectly normal. 

 

Today, Summer Walker is 23 years old. She's been composing music for as long as she’s been able to. If she could, the Texan-born chanteuse would slip her scores under the door and flee in silence… but the star-system has decided otherwise. In 2018, she was signed by the LVRN label, which is also home to the singer Atlanta 6lack. Very quickly, R’n’B fans knighted this soul girl of a new genre who could burst into tears on stage at any time, tormented by the very gazes and affection of the people who love her.

 

Launched in mid-November, the video for Playing Games condenses – musically and aesthetically – all the elements necessary for an effective R’n’B track: lying on a black sofa, wearing a fluffy pink bra top which reinforces her character of praying mantis tired of men, Summer Walker contemplates a man tied up above her. With the album Over It, she attempts to flee her own reality. Parachuted into the music industry, she has to embody someone who feels good. An implacable sex-bomb whose Haribo aesthetic, however, conceals a dark melancholia. 

 

Summer Walker doesn’t hide it: music is her drug. A vital need and yet a therapy at the same time. She doses herself with the neo-soul of Erykah Badu and Amy Winehouse and then fantasises about the 90s before taking up the melodies of Usher. Shy, sometimes clumsy, when she sang Girls Need Loveon the Jimmy Kimmel Live show last February, she modestly wore a black hooded sweatshirt. The show made her famous, thanks to her vintage groove, the delicacy of Jhené Aiko and the attitude of someone who doesn’t give a damn about success. We love Body and Stretch You Out shared with the rapper A Boogie wit da Hoodie. Here or elsewhere, Summer Walker is still in her bathroom.

Like an agoraphobic celebrity suffering from their status, Summer Walker produces love songs in slow motion. She could have been happy with composing for others but she started the infernal machine. Her tour has already begun, the young woman has to face the crowds in spite of barely being able to face the wold. Unable to control her image, she handed it over to capitalism, going from a fantasy young singer to a pin-up fashioned by the market. But there’s no denying it, Summer Walker’s soul is nothing short of invigorating. 

 

Over It, de Summer Walker, available.