Que vaut le nouvel album d’Harry Styles, Harry’s House ?
Ce 20 mai, le chanteur britannique, acteur, icône de mode et chantre d’une virilité non toxique Harry Styles est revenu avec un nouvel album très attendu, trois ans après l’excellent Fine Line (2019). Mais est-ce que ce troisième opus, sobrement intitulé Harry’s House, parvient à détrôner des tubes aussi irrésistibles que Sign of the Times ?
Par Violaine Schütz.
Et Erwann Chevalier.
En quelques années, Harry Styles s’est installé dans la pop culture en icône de toute une génération. Aussi fluide dans ses influences musicales que dans ses looks et sa façon de penser, le chanteur au charisme indéniable semble réunir tout ce qu’attend la Gen Z d’une pop star moderne. Engagé, déconstruit, féministe, drôle, talentueux, flamboyant, très bien habillé et ouvert aux changements… Harry Styles est pleinement en phase avec son époque. Depuis ses premiers pas au sein du groupe One Direction, l’artiste britannique de 28 ans s’est métamorphosé, passant du chanteur formaté (adulé à l’excès) à l’artiste capable de morceaux de bravoure pop-rock aussi épiques et ambitieux que Sign of the Times (2017). Il a aussi signé un hymne audacieux et jouissif au plaisir sexuel féminin (Watermelon Sugar). Une mue spectaculaire et très marketée que confirme ce troisième album solo, Harry’s House, dont les compositions lorgnent plus souvent vers la musique intimiste que vers le mainstream.
Si le précédent album d’Harry Styles (l’excellent Fine Line, sorti en 2019) était influencé par Queen et David Bowie, celui-ci flirte davantage avec les hymnes folk et pop des années 70 et 80, de Joni Mitchell aux Beatles. Les morceaux du chanteur proche de la maison Gucci, qui parlent d’amour, de sexe et de drogue, sonnent souvent instantanément comme des classiques, évoquant autant Paul McCartney et Prince que Tame Impala… Mais avec ce nouvel album, Harry Styles, qui par le passé a souvent été taxé d’imiter ses héros rock jusqu’au pastiche (ce qui lui a récemment valu des critiques de la part de Mick Jagger), semble surtout vouloir imposer sa propre symphonie. Entre pop luxuriante, funk, disco, soul et nappes synthétiques, il imagine un espace où l’hédonisme et la vulnérabilité ont pleinement leur place. Avec humour (l’un des morceaux s’intitule Music for a Sushi Restaurant) et une versatilité vocale impressionnante, le chanteur enchaîne les chansons oniriques et sensuelles, à mi-chemin entre l’euphorie et la mélancolie.
Comme son nom l’indique, Harry’s House s’impose comme un disque chaleureux, accueillant, où les ballades caressantes (la sublime Matilda) côtoient les tubes évidents taillés pour danser seul ou à plusieurs dans son salon (As It Was, Late Night Talking). Il est beaucoup question de vie domestique dans cet album, que ce soit dans son concept comme dans ses paroles (qui évoquent une bonne bouteille de vin rouge bue confortablement dans son jardin). Depuis la pandémie et les confinements, nombreux sont ceux qui se sont demandé quelle était la définition d’un foyer. Harry Styles semble y répondre par le fameux mantra (plébiscité par Instagram) : « Home is where the heart is » (« La maison se situe là où se trouve le cœur »). La musique d’Harry Styles se révèle être un cocon, qui, par ces temps troublés, donne envie de s’y lover pour ne plus en sortir. On pourrait reprocher à la pop star de ne pas assez expérimenter et innover dans sa proposition musicale, mais son charme nonchalant et son timbre rauque lui permettent aisément de se faire pardonner. Et quand, sur Late Night Talking, l’ex-membre des One Direction chante : « If you’re feeling down, I just wanna make you happier, baby!”, on tient sans doute la meilleure définition du pouvoir d’Harry Styles. Celui d’arriver à confectionner des chansons joueuses qui, sous leurs airs inoffensifs, ont un pouvoir consolateur relevant presque de la formule magique.
Harry’s House (2022) d’Harry Styles, disponible sur toutes les plateformes.