MorMor, le jeune prodige qui fait de l’ombre aux pop stars
Nouveau virtuose de l'indie-pop, MorMor s'apprête à conquérir les charts. Surgissant de nulle part, le Torontois débarque avec “Heaven’s Only Wishful ”, un premier EP de 5 titres très convaincant qui mêle confessions et onirisme. Rencontre avec le jeune prodige.
Par Antoine Ruiz.
Avec sa bouille d'ange au regard rieur, le jeune canadien Seth Nyquist, que le monde commence à connaître sous le nom de MorMor, sème le trouble dans la cour des grands. Sa virtuosité ? Elle réside dans son falsetto soul, aussi suave que délicat et d’une production raffinée à mi-chemin entre la pop et l'indie. Se revendiquant artiste inclassable, il s'amuse à piocher dans une myriade de genres, aux antipodes les uns des autres, pour développer un nouveau produit. Au programme, une touche électronique pleine de groove orchestrée par des synthés, des notes de guitare aux frontières du rock alternatif et des percussions hip-hop minimalistes. “Ce n'est pas une question de style ou de genre, je cherche juste ce qui sonne bien selon moi”, explique-t-il. “Je n'aime pas être catégorisé, ou catégoriser ma musique. Lui mettre une étiquette serait comme la cadrer, alors que je préfère qu'elle soit entièrement libre. Je suis comme un scientifique de la musique, je tente, je mélange un peu de tout, et je vois ce que ça donne. L'essentiel c'est que le résultat final me plaise.”
Natif de Toronto, le jeune chanteur-producteur âgé de seulement 26 ans surgit de nulle part. Multi-instrumentiste, il écrit, enregistre mais aussi produit ses morceaux lui-même, de la même manière que ces bedroom producers en herbe confortablement confinés chez eux. “Je préfère tout faire par moi-même, déclare-t-il, “j'ai ma propre vision artistique, ma propre sensibilité musicale, je sais très bien ce que je veux faire. C'est beaucoup plus simple de cette manière.” Sorti en février dernier, l'extatique Heaven’s Only Wishful, son premier titre, propulse sa carrière. Entièrement concocté par ses soins avec l'aide de Max Chandler, Pia Perez et Sylvain Chaussee, un clip l'accompagne. Dans la même veine que les premiers court-métrages de Lana Del Rey, on y retrouve des gros plans en noir et blanc et des images d'archives vintage. Encensé par la critique, MorMor dévoile Whatever Comes To Mind deux mois plus tard, un deuxième titre soul langoureux. La machine de guerre est lancée.
“J'étais comme obnubilé, je n'avais que cela en tête : produire de la musique. Garage Band, Logic… tous ces logiciels me fascinaient et m'intéressaient surtout cent fois plus que mes cours.”
Cette passion pour la musique, il l’a cultivé dès l’instant où sa marraine lui a offert un ordinateur. Il était alors étudiant en sociologie à la Ryerson University de Toronto. Son nouvel instrument informatique en main, il se met à produire vingt-quatre heures sur vingt-quatre en dehors des cours de manière presque obsessionnelle. “J'étais comme obnubilé, je n'avais que cela en tête : produire de la musique”, avoue-t-il. “Garage Band, Logic… tous ces logiciels me fascinaient et m'intéressaient surtout cent fois plus que mes cours. J'ai demandé auprès de l'administration si des cours de musique étaient proposés à l'université, mais malheureusement, rien de tout cela n'était possible.” Hanté par son désir de prospérer dans l'univers musical, il abandonne finalement ses études à la fin du premier semestre. Son unique souhait ? Percer dans son élément.
D'Ariel Pink à Patti Smith, en passant par Aretha Franklin et les Beatles (particulièrement leur Blue Album), il emprunte auprès de ceux qui le bercent chaque jour afin de parvenir à une production musicale authentique. Mais sa plus grande inspiration demeure ce contexte culturel et social très cosmopolite dans lequel il se vante d'avoir grandit et qui lui a offert une certaine ouverture d'esprit. “Cette vie que j'ai à Toronto m'apporte beaucoup de choses” confesse-t-il. “Il y fait bon vivre, c'est agréable et idéal pour trouver matière à créer. J'ai l'impression d'avoir une certaine vision sur le monde depuis ma ville. J'aimerai préserver cette richesse intellectuelle et spirituelle qui se présente à moi et l’injecter dans ma musique.”
Un premier EP cohérent, offrant un mélange unique de confessions un brin mélancoliques, de mélodies oniriques, de composition sophistiquée mid-tempo et d'une sensibilité pop saisissante.
Heaven's Only Wishful n’est pas un mastodonte de l’industrie et n’a pas bénéficié d’une promotion tonitruante. Mais il brille grâce au talent de MorMor et son humilité indiscutable. Cinq chansons suffisent à composer ce premier EP cohérent, offrant un mélange unique de confessions un brin mélancoliques, de mélodies oniriques, de compositions sophistiquées mid-tempo et d'une sensibilité pop saisissante. Poète à l'âme romantique dans Lost, panseur des maux de cœur dans Find Colour, ou bien enfant nostalgique des jours d'été dans Waiting on the Warmth. Pour ce qui est de la suite, rien ni personne ne le presse. “Maintenant que mon EP est sorti, j'aimerai le jouer en live, sur scène, avec un groupe assurant mes arrières. Un rêve de gosse qui se réalise enfin,” avoue-t-il. “Pour ce qui est de la musique, un album, ou un nouvel EP… cela prendra le temps qu'il faudra. C'est un privilège considérable de pouvoir faire ce qu'on veut quand on le veut.” Avec candeur, MorMor livre ce que le monde attend d'un musicien dans l'ère du temps.
Le premier EP de MorMor, Heaven's Only Wishful, est désormais disponible.