6 nov 2023

Les confidences du rappeur Swing, des premières parties d’Angèle à son premier album solo

Swing a quitté le collectif l’Or du Commun pour se lancer en solo. Après deux EP, il défend son premier album Au revoir Siméon, épaulé par le pianiste Crayon. Il démarre un nouveau chapitre avec un disque introspectif et sans concession. 

Le rappeur Swing dévoile son premier album solo Au revoir Siméon.

 

Il a fallu un peu de temps à la presse pour vraiment comprendre Siméon Zuyten. Il faut dire que ses deux EP successifs – Marabout (2018) puis Alt F4 (2020) – étaient l’œuvre d’un artiste prometteur qui n’a pas encore trouvé sa signature. Après dix ans passés aux côtés de Primero et Loxley au sein du trio l’Or du Commun – dont les clips les plus populaires ont dépassé le million de vues sur YouTube, celui qui se fait appeler Swing défend aujourd’hui Au Revoir Siméon, un premier album solo de 15 titres. Épaulé par le pianiste et producteur Crayon, il débute un nouveau chapitre, convoque Prince Waly et YG Pablo le temps de deux featurings et présente une nouvelle version de lui-même. Une œuvre “introspective sans concession” à la croisée des genres, du R’n’B à la house. Le flow, lui, rappelle parfois celui de ses homologues Disiz, Josman ou Luidji. Rencontre avec Swing, un rappeur qui cite tour à tour Frank Ocean, James Blake, Rosalía et Kanye West

 

7 questions au rappeur Swing

 

Numéro: En 2020, vous avez accompagné la chanteuse Angèle pour assurer les premières parties de sa tournée. Vous vous êtes donc produit à l’AccorArena de Paris devant 20 000 personnes. Comment revenir à des salles confidentielles sans prendre un coup au moral ?

Swing: Pour ne rien vous cacher, je me suis demandé comment cette prestation allait nourrir mon ego et mes ambitions futures. J’avais presque l’impression d’être en mission : j’étais confronté à un public qui n’était pas le mien et je devais lui faire passer un bon moment. Et pour le coup, le public d’Angèle n’est vraiment pas le mien. D’autant que certains de mes morceaux contenaient quelques obscénités… [Rires.] Cela m’a aussi permis de me rendre compte de l’investissement nécessaire pour arriver à ce niveau-là. Depuis, jai appris à assumer mon ambition. J’ai mis beaucoup de temps à oser rêver de vivre de la musique. Il y a peu, je voyais encore cela comme le hobbie d’un footballeur qui ne fera jamais carrière et se contente de jouer le dimanche avec ses potes. Parmi tous les membres de l’Or du Commun, j’étais le dernier à prendre la musique au sérieux.

 

Parce que vous aviez peur ?

Oui, tout simplement. Il est beaucoup plus confortable de ne rêver de rien. On ne risque pas grand chose. Je me contentais de mes études en biologie médicale alors que je ne savais même pas ce que je voulais faire de ma vie. Prof de sciences peut-être… Pourtant, je trouvais cela assez inhumain de bosser en laboratoire. Les gens sont réduits à des fioles de sang numérotées. À force de suivre les indications d’une simple machine j’ai pris conscience que, finalement, la musique valait la peine. À la fin de mes études, le rappeur Roméo Elvis m’a proposé de l’accompagner dans sa tournée pour être son backeur [un appui vocal sur scène très utilisé dans le rap]. J’ai commencé à gagner un peu d’argent mais ce n’était pas suffisant pour mener une vie confortable. De cachets en cachets, j’ai fini par obtenir le statut d’artiste en Belgique [un statut social désormais désigné par l’appellation “travailleur et travailleuse des arts”].

J’ai entendu dire que ce premier album était une sorte de reconstruction…

On pourrait plutôt le considérer comme la photographie d’une période spécifique de ma vie. Une période lors de laquelle je me suis énormément remis en question. Et j’ai laissé un peu d’innocence en cours de route. L’innocence est un luxe

 

Quel est, selon vous, le morceau le plus abouti  ?

Étrangement, celui qui me vient en tête est le dernier, 2:22. Je ne pensais pas réaliser un titre comme celui-ci un jour. Nous étions en train de travailler sur quelque chose de totalement différent avec Crayon à ce moment là. Il faisait nuit, et nous étions tous les deux exténués et je me suis absenté quelques minutes. En revenant, alors que je sifflais un air de musique, Crayon m’a lancé : “Attends !”. Puis on a écris deux morceaux en une heure dans la foulée. Quand je le réécoute, j’éprouve un petit sentiment de fierté. Du genre : “C’est vraiment moi qui ai fait ça ?”

 

Crayon avait d’ailleurs participé à l’élaboration de votre EP Alt-F4 en 2020

À l’origine, je pensais proposer à énormément de personnes de collaborer avec moi. Et puis, il s’est passé quelque chose de spécial avec Crayon, tout paraissait simple et naturel. C’est donc lui qui a finalisé le tout. Souvent, j’établissais une base puis il arrivait en plein processus de création, changeait le BPM, dégommait tous les accords et transformait la drill en morceau de rock. Il a une culture musicale extraordinaire et nous nous sommes parfaitement entendu sur le fait qu’il fallait expérimenter pour proposer des choses qui n’avaient pas été entendues ailleurs.

 

Vous me faites parfois penser à Josman, Luidji ou Disiz sur ce disque… Ça vous agace ?

Non, au contraire, ça me plait ! Ce sont trois artistes que j’apprécie beaucoup même si mes références sont différentes : Kendrick Lamar, Frank Ocean, James Blake, Rosalía ou Kanye West. J’écoute très peu de musique francophone. À l’époque, lorsque vous écoutiez Nekfeu, vous finissiez par écrire un peu comme lui en lui empruntant son flow. En tant que rappeur, c’est un truc qui vous rend fou !
 

Pourquoi avoir intitulé l’album ainsi ?

Parce que je ne voulais pas choisir un titre qui soit simplement un joli mot. Et puis, revenir en disant au revoir c’est assez poétique vous ne trouvez pas ?

 

Au revoir Siméon de Swing, disponible.