Le musicien japonais Ryuichi Sakamoto en 3 chansons cultes
Le compositeur japonais Ryuichi Sakamoto, qui a influencé de nombreux musiciens pop, hip-hop et électronique d’aujourd’hui, nous a quittés ce mardi 28 mars, à l’âge de 71 ans, des suites d’un cancer. Il laisse derrière lui des tubes avant-gardistes et des BO épiques.
par Violaine Schütz.
2. La BO mythique de Furyo : Forbidden Colours (1983) de Ryuichi Sakamoto et David Sylvian
En 1983, Ryuichi Sakamoto, dont le beau visage, l’allure excentrique et le charisme attirent le cinéma, joue dans le film de guerre Furyo, réalisé par Nagisa Ōshima (L’Empire des sens). Le long-métrage atypique nous plonge dans un camp de prisonniers américains situé sur l’île de Java, dirigé par un tyrannique capitaine japonais. Mais en plus d’incarner ce dernier, Sakamoto compose aussi la BO du film. S’il partage la vedette avec une autre star de la musique androgyne et géniale, David Bowie, il n’osera pas lui demander de chanter le thème, tourmenté, du long-métrage, Forbidden Colours (Merry Christmas, Mr. Lawrence en version instrumentale), ne voulant pas détourner David Bowie de son rôle d’acteur. Il se penche à la place vers le non moins talentueux David Sylvian, le chanteur britannique du groupe Japan, pour interpréter cette chanson hypnotique à la mélodie entêtante. Si la duo Sylvian-Sakamoto a marqué les esprits, celui, hautement homo-érotique et très étrange (dans sa manière de jouer de manière outrancière), formé par Bowie et Sakamoto à l’écran n’en demeure pas moins légendaire.
1. Tong Poo (1978) de Yellow Magic Orchestra ou le génie avant-gardiste de Ryuichi Sakamoto
En 1978, le musicien, pianiste, fils d’un éditeur de romanciers et producteur virtuose Ryuichi Sakamoto (aussi orthographié Ryūichi Sakamoto) co-fonde le trio de synthpop japonais Yellow Magic Orchestra (YMO). Inspirés à la fois par Kraftwerk, Giorgio Moroder, la musique des jeux d’arcade, le funk et les chansons traditionnelles de leur pays, le groupe va signer une poignée d’albums et de tubes qui vont marquer des générations de mélomanes. Leurs sonorités avant-gardistes, bizarroïdes et ludiques vont influencer l’électro, la techno, mais aussi le hip-hop, la new wave (Japan, The Human League) et la pop. Tong Poo (1978) fait partie de leurs hits les plus irrésistibles avec Technopolis (1979) et Computer Games/Firecracker (1978). Pour mieux prendre la mesure de leur importance en tant que pionniers des musiques actuelles, YMO a été samplé par De La Soul, Mos Def, Jennifer Lopez, Mariah Carey ou encore Justice. Michael Jackson a même adapté l’un de leurs morceaux (Behind the Mask).
3. Le thème oscarisé du Dernier Empereur (1987) de Ryuichi Sakamoto
Ryuichi Sakamoto, qui a commencé très tôt le piano – en vouant un culte à Debussy, avant de s’intéresser aux Beatles et aux Rolling Stones – est connu pour ses nombreuses bande-originales. En plus d’avoir illustré les scènes atypiques de Furyo, il a travaillé avec des cinéastes souvent considérés comme subversifs ou audacieux tels que Pedro Almodóvar (Talons Aiguilles), Brian De Palma (Snake Eyes, Femme fatale) ou encore Alejandro González Iñárritu (The Revenant). Mais c’est sa BO épique pour le film Le Dernier Empereur (1987) de Bernardo Bertolucci, coécrite avec David Byrne (des Talking Heads) et Cong Su, qui va lui permettre de remporter un Oscar. C’est le premier compositeur japonais à avoir remporté la fameuse statuette dorée…
« Il a vécu avec la musique jusqu’à la toute fin », a déclaré son entourage dans un communiqué publié sur son site officiel. Musicien, acteur, militant écologique et figure de proue du mouvement antinucléaire au Japon, Ryuichi Sakamoto laisse derrière lui l’image d’un monument, très humain, érudit et charismatique, de la musique du 20e siècle. Et de nombreux chefs-d’oeuvre, qui ont profondément marqué les stars de la techno et du hip-hop…