4 août 2020

5 albums sortis en 2020 à découvrir cet été

Si l'été 2020 ne pourra malheureusement pas compter sur les festivals pour provoquer des découvertes musicales, le contexte semble idéal pour revisiter les albums sortis récemment afin de satisfaire ses envies de nouveauté. De la pop rétro de Jessica Ware et Rina Sawayama en passant par l'électro expérimentale d'Arca, le rap de Juice WRLD et le jazz expérimental de Moses Sumney, focus sur cinq disques qui rythmeront cette année particulière.

1. Le plus dansant : Jessie Ware, What’s Your Pleasure

Sorti le 26 juin dernier, le quatrième album de Jessie Ware intitulé What’s Your Pleasure résonne comme une ode à la nuit. Dans un tableau musical puisant indéniablement dans l'âge d'or du disco, l’artiste originaire du sud de Londres chante l’insouciance, l’euphorie et le désir. Cet album se démarque des précédents projets de Jessie Ware, qui s’épanouissaient dans un tempo plus lent, à l’image de son troisième opus bien plus intime, Glasshouse, où la chanteuse abordait des sujets tels que sa relation avec son mari ou l’absence de son père. Avec son nouveau titre Soul Control, cette dernière nous ramène à une époque plus simple, où les combinaisons à paillettes et les permanentes étaient de mise sur la piste de danse. Les sons de synthétiseurs résonnent en harmonie avec les riffs funky de la guitare, pendant qu’un chœur reprend à tue-tête les paroles du refrain : “C’est comme ça que tu le veux, c’est comme ça que je te le donnerai / Ton toucher est magique, c’est automatique.” Dans What’s Your Pleasure l’artiste entonne du bout des lèvres des paroles emplies de sensualité, plongeant le morceau dans une ambiance pleine de luxure. “Je voulais imaginer que j’étais un homme, que je dansais, que je rencontrais des étrangers et que je voulais immédiatement faire l'amour avec eux !, déclare la chanteuse à propos de son disque. Pour preuve, le morceau Save a Kiss dégage une atmosphère voluptueuse et intimiste qui rappelle l'insouciance des flirts estivaux. Sur un son électronique et plus moderne, Jessie Ware plante le décor d’une scène tout droit sortie d’une comédie romantique. Avec une basse intense imitant les battements d’un cœur affolé, la chanteuse fait promettre de lui “garder un baiser et un peu de notre amour.”

 

 

2. Le plus versatile : Arca, KiCk i

À mi-chemin entre l’électronique expérimentale d’Aphex Twin et le lyrisme futuriste de la Diva Plavalaguna dans Le cinquième élément, KiCk i, le quatrième album studio d’Arca se présente comme un projet hybride, à l’image de la productrice et chanteuse vénézuélienne. De la pop à la techno en passant par le reggaeton, cet opus se révèle profondément hétéroclite, avec des moments d’euphorie, de calme et de chaos. Alejandra Ghersi de son vrai prénom démarre sa carrière en tant que productrice. Elle travaille notamment sur cinq chansons de l’abum Yeezus du rappeur américain Kanye West, et contribue grandement à la production des deux derniers albums studio de Björk, Vulnicura (2015) et Utopia (2017). Depuis son précédent album intitulé Arca sorti en 2017, l’artiste opère un virage dans son style en posant pour la première fois sa voix sur ses créations. Dans Afterwards, Arca s’allie à Björk pour proposer un morceau dream pop, presque onirique où la voix de la chanteuse islandaise porte, en espagnol, une mélodie lancinante soutenue par une forte réverbération. Les titres Time et Calor reprennent cette même atmosphère musicale où le temps semble suspendu. À l’inverse, les titres KLK (ft. ROSALÍA), Watch (ft. Shygirl) et Mequetrefe présentent des rythmiques saccadées et tranchées, résolument plus animées, qui s’inspirent à la fois des sonorités reggaeton et techno.

 

 

3. Le plus rétro : Rina Sawayama, SAWAYAMA

À la croisée des genres entre le métal, le R’n’B et la pop des années 2000, SAWAYAMA, le premier album de la chanteuse britannique Rina Sawayama, apparaît comme un condensé de tout ce que le début du troisième millénaire avait de plus riche à offrir musicalement. L’album s’ouvre sur le très rock Dynasty, rappelant à la fois les envolées lyriques d’Amy Lee, chanteuse du groupe américain de métal Evanescence, et les riffs de guitares dramatiques du groupe de pop/rock russe t.A.T.u. Avec XS, deuxième piste de l’album, les sonorités se font plus pop, à l’image d’un I’m A Salve 4U de Britney Spears, tout en gardant des accents métal, ponctués par les interventions de riffs de guitare électrique. Rina Sawayama opère également de nombreuses références aux premières années du R’n’B avec son titre Asaka Sad, empreint de l’influence des Destiny’s Child, ou bien encore un clin d'œil à un certain Justin Timberlake avec Cry Me A River. “Je ne crois pas aux plaisirs coupables, point barre. Je n’ai pas honte d’affirmer que j’aime la musique bien mielleuse,” affirmait ainsi la chanteuse en parlant de ses influences musicales. Originaire du Japon et ayant grandi au Royaume-Uni, Rina Sawayama s'est construite avec une vision occidentale sur son pays d’origine tout en puisant grandement dans sa culture. En atteste le titre Paradisin’, où l'artiste propose un titre sucré en clin d’œil à la J-pop que l’on imaginerait parfaitement en générique d’un anime.

 

 

4. Le plus apaisant :  Moses Sumney, græ

Projet divisé en deux parties, l’album græ de Moses Sumney propose vingt titres au total, et presque autant de genres musicaux. Le chanteur accorde un intérêt tout particulier à la dualité de ses origines, entre la Californie et le Ghana : “Les gens essaient toujours de te mettre une étiquette pour mieux te comprendre, mais mes origines sont multiples. Ce n’est pas quelque chose qui peut être défini. Je tiens à mon droit d’affirmer ma multiplicité.” Déjà en 2017, la musique de Moses Sumney paraissait difficile à catégoriser. Avec son premier album Aromanticism (2017), l’artiste démontrait déjà ses impressionnantes capacités vocales, faisant de sa voix de falsetto un instrument à part entière accompagné par les sonorités à la fois jazz, soul et R’n’B de ses premiers morceaux. Ce second opus apparaît alors comme le développement de cette première proposition musicale, diversifiant encore les genres musicaux. L'album s’ouvre avec le morceau Insula, une sorte de slam dotant l'ensemble d'un ton sensiblement introspectif. Dans une ambiance similaire à Aromanticism, Moses Sumney réfléchit à des thèmes tels que la virilité, les relations amoureuses, l’ambition et le futur sur un fond de jazz aux influences soul et R’n’B. Avec la collaboration d’artistes tels que Thundercat, le saxophoniste du groupe Shabaka Hutchings ou bien encore James Blake, cet album se présente comme le plus reposant de tout l’été, idéal pour accompagner les journées de détente.

 

 

5. Le plus prémonitoire : Juice WRLD, Legends Never Die

À 21 ans, Juice WRLD s'annonçait comme la nouvelle étoile montante du rap-game américain. Pour preuve, sa chanson Lucid Dreams a été streamée plus d’un milliard de fois sur Spotify. Malheureusement, le rappeur s’est éteint le 8 décembre 2019 des suites d’une overdose accidentelle. Avec Legends Never Die, son album sorti à titre posthume, le jeune rappeur semble s’adresse à son public depuis l'au-delà – ou plutôt, comme il le dit dans le titre Juice WRLD Speaks From Heaven  : “Je suis en live Instagram depuis le paradis.” Déjà dans sa musique, le jeune rappeur abordait explicitement dans ses textes ses anxiétés, ses états dépressifs et ses addictions – un combat contre ses démons qui s’exprime clairement de manière musicale sur cet album. Les basses graves, lourdes et agressives résonnent en accord avec les thèmes abordés sur les morceaux les plus noirs du projet, tels que Conversations, Titanic ou Bad Energy : “Je vois des flemmes partout autour de moi/Je vois Satan/J’ai l’impression que je vais mourir chaque jour/Alors je me défonce.” Cependant, avec des titres tels que Righteous, Tell Me U Love Me ou Get Through It, Juice WRLD laissait entrevoir une lueur d’espoir, symbolisée musicalement par une guitare plus légère en picking, contrastant avec les basses des morceaux précédents: “Quand mon temps sera venu, je le saurai/je n’ai jamais vu d’enfer si froid/On s’en sortira, je le sais/On traversera les flemmes ensemble, on y va.” À travers les 21 morceaux de l’album symbolisant, tant au niveau musical qu’au niveau des paroles, les hauts et les bas de sa carrière, le jeune rappeur évoque son rapport à la célébrité, à la richesse, aux autres et à la mort en collaborant avec des artistes tels que Halsey, Marshmello et Trippie Redd. Selon sa famille, Juice WRLD aurait enregistré plus de 2000 morceaux avant sa mort, prouvant ainsi, comme le titre de son album l’indique, que les légendes ne meurent jamais vraiment.