27 juin 2025

Denis Villeneuve : les secrets du réalisateur du prochain James Bond

Après le monumental Dune, deuxième partie, le réalisateur québécois s’apprête à diriger le 26e film de la saga d’action James Bond. L’occasion de se pencher sur la carrière de ce cinéaste ambitieux qu’Hollywood s’arrache.

  • par Violaine Schütz.

  • 1. James Bond, un souvenir d’enfance précieux pour Denis Villeneuve

    En 2021, le film Mourir peut attendre signait les adieux flamboyants de Daniel Craig dans le costume de James Bond. Mais après ce long-métrage piloté par Cary Joji Fukunaga, la saga laissait planer le mystère quant à l’acteur et au réalisateur qui seraient choisis pour les prochaines aventures l’espion britannique.

    Le 26e film de l’agent 007 va s’accompagner d’une myriade de changements en coulisses. En effet, si la production des films James Bond a longtemps été une histoire de famille, les producteurs Barbara Broccoli et Michael G. Wilson ont finalement légué leur place aux studios Amazon MGM Studios plus tôt cette année. Puis, c’est toute une kyrielle d’acteurs qui ont été pronostiqués par la toile pour endosser le costume de l’espion. Henry Cavill, Aaron Taylor-Johnson, Lucien Laviscount… L’agent 007 n’a toujours pas trouvé son successeur. Cependant, une première annonce a enfin été confirmée au sujet de ce nouveau volet très attendu.

    Après Martin Campbell, Marc Forster ou encore Sam Mendes, le Québecois Denis Villeneuve, 57 ans, sera le prochain réalisateur à donner sa vision de l’agent 007. Le cinéaste qui a déjà dirigé certains volets des sagas Dune et Blade Runner, aura une lourde tâche. Orchestrer un nouveau James Bond à la hauteur des derniers volets. Une mission lourde de sens pour lui, car il a grandi avec les longs-métrages l’agent britannique, qu’il regardait avec son père. Il explique dans un communiqué de presse : Je suis un fan inconditionnel de Bond. Pour moi, c’est un personnage sacré. (…) C’est une responsabilité énorme, mais aussi quelque chose d’incroyablement excitant pour moi et un immense honneur. (…) J’ai l’intention d’honorer la tradition et d’ouvrir la voie à de nombreuses nouvelles missions à venir »

    2. Des références pop inattendues dans le film Dune

    Le choix de Denis Villeneuve pour la saga James Bond semble être un gage de qualité. Car le cinéaste s’est érigé parmi les figures les plus convoitées d’Hollywood grâce, notamment, à son sens du détail. Dans le monumental Dune (2021) de Denis Villeneuve, chaque élément compte. À commencer par les costumes… Les vêtements du personnage du Baron Harkonnen (Stellan Skarsgård) est par exemple inspiré de Marlon Brando dans le film Apocalypse Now (1979) de Francis Ford Coppola, qui n’est autre que l’une des œuvres fétiches de Denis Villeneuve.

    Autre référence à la pop culture ? Jacqueline West, en charge des étoffes du film, a décidé de faire un clin d’œil aux Spice Girls en imaginant des tenues de dames de compagnie de Dame Jessica (Rebecca Ferguson) aux couleurs d’épices (celles du marché de Marrakech). Une allusion surprenante ? Pas tant que ça, puisque Denis Villeneuve s’endort en écoutant du Leonard Cohen et qu’il s’est fait la main à ses débuts en tournant le clip d’un rockeur canadien. La musique a donc toujours eu une importance primordiale pour lui.

    Dans le film Dune, deuxième partie, avec Timothée Chalamet, Zendaya, Léa Seydoux et Austin Butler, l’importance de la musique dans l’œuvre de Denis Villeneuve se confirme. D’abord par le rôle essentiel joué par la BO signée Hans Zimmer mais aussi par la scène où Josh Brolin chante et joue de la guitare à bord d’un vaisseau.

    3. Les débuts étonnants de Denis Villeneuve

    Avant ses études en cinéma à l’Université du Québec à Montréal, Denis Villeneuve s’est d’abord intéressé aux sciences de la nature en suivant des cours dans une institution post-secondaire (formation en trois ans propre au système éducatif canadien). Son rêve ? Devenir biologiste. Toujours dans un esprit “nature et découvertes”, le cinéaste a accompagné dans le Grand Nord canadien Pierre Perrault, figure du “cinéma direct” (catégorie du cinéma documentaire), – pour réaliser son film Cornouailles (1994).

    Pendant 120 jours, l’équipe a étudié les bœufs musqués de la région afin de mieux cerner leurs comportements et la rivalité qui règne entre eux. Le film s’attarde aussi sur plusieurs espèces végétales et animales méconnues. C’était bien longtemps avant les incursions de Denis Villeneuve dans le désert de Dune, dont les tournages en décors réels ont eu lieu en Hongrie, en Jordanie, à Abu Dhabi et en Norvège. D’ailleurs, pour lui, “un film, c’est comme un voyage. On plonge, on s’imbibe et l’on finit par s’apercevoir que certaines choses sont plus fortes que d’autres” confiait-il au Figaro.

    4. Prisoners, Enemy… Des films à la portée métaphysique

    Qu’ils aient des allures de blockbusters ou d’opus plus indépendants, les films du réalisateur québécois possèdent souvent une portée métaphysique. Le titre du film Prisoners (2013) avec Jake Gyllenhaal peut être vu comme une référence au milieu carcéral, mais Denis Villeneuve le décrit aussi ainsi : “Chaque personnage du film est, d’une manière ou d’une autre, prisonnier des circonstances, de ses propres démons ou de la peur. Chacun doit faire face à un emprisonnement qui lui est propre, et va devoir se battre pour retrouver la liberté.

    Premier Contact (2016) avec Amy Adams revêt une dimension philosophique dans sa mise en scène de l’altérité extrême (les extraterrestres) tandis qu’Enemy (2013) évoque le roman de Dostoïevski Le Double, dont le personnage est perturbé par la rencontre de son sosie. Quant à Sicario (2015), un film sur le trafic de drogues au Mexique dans lequel figure Benicio Del Toro contient de profondes réflexions sur le mal et Dune, des pensées sur l’écologie.

    La bande-annonce de Blade Runner 2049 (2017) avec Harrison Ford et Ryan Gosling.

    5. Blade Runner 2049 n’était pas une évidence

    Sorti en 2017, Blade Runner 2049 est l’un des plus gros succès critiques de Denis Villeneuve, même s’il n’enregistra que 260 millions de dollars de recettes au box-office (il coûta 150 millions à réaliser). Pourtant, le réalisateur n’était au départ pas emballé par l’idée de donner une suite au Blade Runner original signé Ridley Scott. Il avait peur de dénaturer l’œuvre cyberpunk culte. Mais, après avoir lu le scénario, il a changé d’avis, trouvant qu’il s’agissait là d’un des meilleurs scripts qu’il ait jamais lu. Ce n’est pas le seul qui a hésité à rejoindre l’aventure. Ryan Gosling, qui incarne le héros du film, était frileux à l’idée de tourner dans un film à gros budget. 

    Il a déclaré à Entertainment Weekly avoir accepté parce que Blade Runner est un film “riche, mélancolique, romantique ». Il explique : « La frontière entre les héros et les méchants était tellement floue… Ce n’est pas un voyage héroïque, en aucune façon. (…) Sur le plan thématique, il y a tellement de choses dans le film en plus ! (…) Tant d’autres films ont volé des idées à Blade Runner, mais ils ne pourraient jamais voler son âme.” 

    La présence dHarrison Ford, qui jouait déjà dans le premier Blade Runner datant de 1982, l’a aussi convaincu d’accepter le projet. En revanche, pour le rôle joué par Jared Leto, Denis Villeneuve voulait au départ David Bowie. Malheureusement, le chanteur fut dans l’incapacité d’accepter ce rôle, souffrant alors d’un cancer qui l’épuisait.

    6. Un goût pour la véracité et beaucoup d’exigence

    S’il excelle dans le fantastique et la SF, Denis Villeneuve a aussi des ambitions de crédibilité. Il évite par exemple le plus possible les fonds verts. Pour que l’on croit plus facilement à l’histoire sombre de Sicario, le scénariste Taylor Sheridana ainsi réalisé un véritable travail de journaliste d’investigation.

    Il a interrogé des immigrés vivant dans le désert de Chihuahua (qui s’étend au Mexique et aux États-Unis), gagnant la confiance de ceux qui sont tous les jours en prise avec les cartels. Denis Villeneuve est tout aussi exigeant sur la véracité de ce qu’il tourne que sur la qualité de ses images souvent très inventives. Déçu par ses premiers films des années 90, il a pris un long congé sabbatique pour devenir père au foyer et élever ses trois enfants.

    Mais les vacances sont désormais très loin pour lui… Le réalisateur, qui devait initialement se pencher sur l’adaptation du roman Nuclear War : A Scenario d’Annie Jacobsen pour son prochain film, va finalement enclencher la production de Dune, troisième partie (Dune : Messiah) dès 2025. Prévu pour une sortie au cinéma le 16 décembre 2026, le film sera porté par Timothée Chalamet, Zendaya et Jason Momoa. Sans compter le nouveau James Bond…

    Le prochain film James Bond réalisé par Denis Villeneuve n’a pas encore de titre, ni de date de sortie.