Adrien Brody, Louis Partridge… Ces acteurs qui ont fait tourner les têtes à la Mostra de Venise

Adrien Brody dans The Brutalist : le favori

Le favori pour recevoir le prix d’interprétation à la 81e Mostra de Venise, c’est lui. L’acteur new-yorkais, sevré de premiers rôles marquants depuis quelques années, retrouve un personnage épique et torturé, écrasé par le poids de l’Histoire, comme il n’en avait pas croisé depuis Le Pianiste de Roman Polanski (2002). Dans la fresque épique de Brady Corbet, The Brutalist – 3h25 bien tassées, entracte compris –, le héros, Laszlo Toth, est un architecte juif hongrois de renom rescapé des camps. Arrivé à New York en 1947 comme des centaines de milliers d’immigrants, il tente de se faire une place dans un pays qui tour à tour le célèbre et le maltraite.

Accent parfait, mine déconfite et jeu intense : Adrien Brody sort toute sa panoplie tragique dans la peau de ce génie de l’architecture qui côtoie les abimes à cause de son identité. Le film est souvent intéressant, un peu convenu également dans sa recherche constante d’une forme opératique, mais Brody montre qu’il n’a rien perdu de ses capacités à tutoyer le pire et à embrasser une masculinité vulnérable. La noirceur lui va comme un gant.

Le film The Brutalist (2024) de Brady Corbert, avec Adrien Brody, n’a pas encore de date de sortie.

Louis Partridge dans Disclaimer : la révélation

Les mauvaises langues diront qu’il doit sa hype du moment à sa relation avec la popstar américaine Oliva Rodrigo, avec laquelle il s’est affiché à Venise, filant l’amour parfait. Mais ce serait ignorer son talent, de plus en plus évident. À 21 ans, l’acteur anglais passionne dans la minisérie Disclaimer (2024), réalisée par Alfonso Cuaron et présentée durant cette Mostra en séance spéciale. Aux côtés notamment de Cate Blanchett, Partridge incarne un jeune ado qui s’entiche d’une femme plus âgée que lui, une aventure érotique achevée en tragédie, véritable clef de ce récit en sept épisodes.

Après ses rôles dans Enola Holmes (2020) et Pistol (2022, où il jouait Sid Vicious), le natif de Londres montre toute sa séduction et sa fragilité, capable à la fois d’incarner la confiance en soi ultime mais aussi l’envie de se cacher sous le sable, le tout en quelques secondes. Une rumeur (non confirmée pour l’instant) parle de lui pour le prochain film de Greta Gerwig, Les Chroniques de Narnia, signe d’une carrière prête à décoller en flèche.

Disclaimer (2024) d’Alfonso Cuarón, avec Louis Partridge et Cate Blanchett, disponible le 11 octobre sur Apple TV +.

Harris Dickinson dans Babygirl : l’irrésistible

À la sortie des projections vénitiennes de Babygirl, le drame érotique de Halina Reijl avec Nicole Kidman, le genre et l’orientation sexuelle des unes et des autres n’avaient plus aucune importance : tout le monde frétillait et s’accordait pour louer la performance incandescente de Harris Dickinson. On avait vu le comédien britannique dans Les Bums de plage (2017) interrogeant sa sexualité, puis brièvement dans Matthias et Maxime (2019) de Xavier Dolan, avant de le retrouver en mannequin et influenceur pour la Palme d’or cannoise 2022, Sans Filtre (2022) de Ruben Östlund.

On le découvre ici sous un jour fascinant, avec ce rôle de Samuel, arrogant stagiaire d’une grande entreprise de Manhattan qui entame une relation SM avec sa big boss. Le voilà bientôt demandant fermement à Nicole Kidman de se coucher sur le ventre ou de boire un verre de lait (qui imaginait que cela pouvait être excitant ?). Au-delà de son aura sexuelle, Dickinson parvient à donner au personnage une portée sociale, illustrant une époque ultralibérale où le pouvoir, la réussite et l’intime se nouent de façon parfois explosive, et où les rôles genrés sont souvent bousculés.

Le film Babygirl (2024) d’Halina Reijl, avec Harris Dickinson, Nicole Kidman et Antonio Banderas, n’a pas encore de date de sortie.

Paul Kircher dans Leurs Enfants après eux : le plus émouvant

Déjà génial dans Le Règne animal (2023) de Thomas Cailley et Le Lycéen (2022) de Christophe Honoré, Paul Kircher, 22 ans, continue à dresser le portrait de l’adolescence et de ses suites avec une candeur et une force hors du commun dans le cinéma français. Présenté en compétition à la Mostra, Leurs enfants après eux de Ludovic et Zoran Boukherma, adapté du Goncourt de Nicolas Mathieu, était très attendu. Il nous a pourtant déçu par son manque d’inventivité dans la mise en scène, trop appliquée et prévisible, qui coupe le souffle potentiel de cette saga sur une petite ville de Lorraine touchée par le chômage, en traversant les années 1990. Mais l’acteur s’en sort haut la main, toujours spontané et profond, imprévisible au cœur d’un film qui ne l’est pas assez.

Dans le rôle d’un fils mal aimé (une mère trop présente, un père alcoolique), il personnifie la meilleure part de Leurs enfants après eux, quand une certaine douceur s’installe, presque une nonchalance, trouée d’accès de violence. Kircher n’avait pas remporté le César de la Meilleure Révélation Masculine en février dernier (Raphaël Quenard a raflé la statuette), un oubli qui pourrait être réparé bientôt.

Leurs enfants après eux (2024) de Ludovic et Zoran Boukherma, avec Paul Kircher, Gilles Lellouche et Anaïs Demoustier, au cinéma le 4 décembre 2024.