7 oct 2024

Lee Miller : Kate Winslet vise l’Oscar dans un biopic sans panache

Après avoir brillé dans la série The Regime, l’actrice britannique Kate Winslet joue le rôle de la photographe Lee Miller dans un film du même nom. Prévu pour le mercredi 9 octobre 2024, le biopic vaut le détour pour la performance intense de la star mais pèche par excès de didactisme.

Lee Miller dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

2024 et 2025 sont des années fastes pour l’actrice britannique Kate Winslet, âgée de 49 ans. Une actualité chargée qui prouve qu’il y a bien une vie possible, au cinéma, pour les actrices de plus de 45 ans. Auréolée du succès d’Avatar 2 : La Voie de l’eau (2022) et de l’excellente série Mare of Easttown (2021), la star devrait être au générique d’Avatar : Fire and Ash, prévu pour le 17 décembre 2025.

L’immense actrice Kate Winslet sur tous les fronts

Avant ça, on a vu l’héroïne romantique et féministe de Titanic en chancelière dans la série HBO The Regime (2024). Ce show, réalisé par Stephen Frears et Jessica Hobbs, raconte ce qui se passe d’impitoyable entre les murs d’un palais durant un régime autoritaire en train de s’effondrer. L’atmosphère tendue proche de celle de The Crown et de Succession et son casting alléchant (Guillaume Gallienne, Matthias Schoenaerts, Andrea Riseborough) justifient son visionnage.

La bande-annonce de Lee (2024).

Que vaut le film sur la photographe Lee Miller avec Kate Winslet ?

Mais le projet qui fait parler de lui en ce moment, lorsqu’on évoque le nom de Kate Winslet, c’est celui qui concerne une icône de la photographie Lee Miller. La folle et tragique vie de l’Américaine, photographe, mannequin, correspondante de guerre ainsi que muse (et maîtresse) de Man Ray née en 1907 valait bien un biopic.

Photographier l’horreur (notamment les camps de concentration) a laissé des traces chez l’artiste, en plus de ses propres démons à combattre : Lee Miller, connue pour sa beauté, sa folie, sa franchise et sa dureté, a connu l’alcoolisme, la dépression et a fait face à des comportements autodestructeurs. Une matière romanesque dense.

Ellen Kuras, directrice de la photographie nommée aux Oscars pour son documentaire The Betrayal-Nerakhoon (2008), s’empare de ce matériau pour proposer un film sur cette artiste majeure, qui sort ce mercredi 9 octobre 2024. 

Un biopic avec Josh O’Connor

Le biopic, sobrement intitulé Lee Miller, s’inspire de l’ouvrage Les Vies de Lee Miller, écrit par le fils de la photographe, Antony Penrose (joué par Josh O’Connor dans le film), et publié en France en 1994. Le film se concentre sur une période précise de l’existence de l’artiste, comprise entre 1938 et 1948.

C’est à ce moment-là que Lee Miller va photographier la vie des gens, et particulièrement des femmes ainsi que l’horreur du front et des camps, pendant la Seconde Guerre mondiale. 

Si la vie et la personnalités de Lee Miller sont, sur le papier, passionnante, – on lui doit des saillies tells que “J’étais douée pour le sexe, l’alcool et les photos” ou “Je préfère prendre une photo qu’en être une” – le biopic s’avère à la fois plat et académique.

Kate Winslet dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Kate Winslet et Marion Cotillard dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Kate Winslet dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Kate Winslet dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Kate Winslet dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Kate Winslet dans le film Lee Miller (2024) © Kimberley French/ Sky UK Ltd.

Un nouvel Oscar pour Kate Winslet ?

Parce qu‘Ellen Kuras n’est pas cinéaste, Lee Miller manque de rythme, d’emphase et d’originalité. Mais aussi de subtilité dans la façon, très didactique et maladroite, dont elle aborde le parcours de cette artiste atypique. On a souvent l’impression de voir un documentaire ou, pire, un téléfilm, bourré de clichés et de thèmes importants simplement effleurés : on ne compte plus les plans où Lee Miller boit et fume, sans que le sujet de l’alcoolisme soit abordé de plein fouet.

Si le film vaut tout de même la peine d’être vu, c’est surtout pour la performance habitée de son actrice principale et coproductrice. Kate Winslet qui incarne avec passion et justesse toutes l’intense Lee Miller. C’est le type de rôles intenses et bouleversants qui pourraient lui valoir une nouvelle fois l’Oscar (qu’elle a déjà été récompensée pour The Reader). D’autant plus que la star a donné de sa personne… Le tournage a en effet été musclé, puisque Kate Winslet a glissé et s’est retrouvée à l’hôpital, en septembre 2022, au moment de filmer des plans en Croatie. Une caméra a également chuté sur son dos, lors d’un tournage à Saint-Malo.

Lee Miller, photographe culte à laquelle on doit une photo terrifiante d’elle dans la baignoire d’Hitler

On salue aussi le reste du casting, prestigieux. Marion CotillardAlexander SkarsgårdJosh O’Connor (The Crown, Challengers, Seule la terre), Andrea Riseborough (ZeroZeroZero, To Leslie), Noémie Merlant et Zita Hanrot figurent tous au générique. Mais la plupart d’entre eux incarnent seulement des esquisses de personnages, n’apparaissant que quelques minutes à l’écran.

Enfin, Lee Miller a le mérite de rappeler l’existence et l’importance de celle qui fut l’amie de Picasso et de Cocteau. Une séquence s’attarde notamment sur la réalisation de la photographie la plus forte et la plus célèbre de l’artiste. Il s’agit d’un audacieux autoportrait qu’elle a réalisé, dans la baignoire d’Adolf Hitler, en se rendant dans l’appartement qu’occupait à Munich le chef nazi juste après le suicide de celui-ci, en avril 1945.

Si la scène s’avère aussi dérangeante que poignante, le reste du biopic laisse un goût amer : dans sa conception, Lee Miller n’est pas à la hauteur de la flamboyante photographe qui rendait tous ceux qu’elle croisait fou amoureux.

Lee Miller (2024) d’Ellen Kuras, avec Kate Winslet, Andy Samberg, Alexander Skarsgård et Marion Cotillard, au cinéma le 9 octobre 2024.