Rencontre avec Jane Fonda : “Beaucoup d’hommes ont eu leur premier orgasme en regardant Barbarella”
Ce lundi 23 septembre, L’Oréal Paris a célébré l’inclusivité, la sonorité et l’émancipation féminine lors d’un défilé intitulé Walk Your Worth, qui avait lieu devant l’Opéra Garnier, à Paris. Parmi les stars présentes sur le podium, figurait la très applaudie Jane Fonda. À 86 ans, l’icône engagée du cinéma, doublement oscarisée, reste un modèle pour son franc-parler et ses prises de position politiques. Mais aussi, pour sa filmographie impeccable, allant de Barbarella à Klute. Rencontre avec une femme et artiste formidable.
par Violaine Schütz.
L’interview de Jane Fonda, l’actrice culte qui a illuminé le défilé L’Oréal Paris
Numéro : Vous avez défilé ce lundi pour le show de L’Oréal Paris appelé Walk Your Worth. Comment s’est déroulée cette expérience ?
Jane Fonda : J’étais heureuse de voir mes amies : Viola Davis, Eva Longoria, Andie MacDowell… J’ai ressenti beaucoup de sonorité sur le catwalk. C’est l’une des plus belles choses qui se soient passées avec L’Oréal : nous devenons amies entre ambassadrices et égéries. Je me souviens notamment d’un shooting très fun, en Californie, avec Helen Mirren et Viola Davis. Ils m’avaient mise dans une baignoire et j’étais recouverte de pétales de roses…
Ce défilé défendait une vision très féministe de la beauté. Et vous êtes féministe depuis des années. Quels sont pour vous les plus grands changements qui ont eu lieu pour les femmes à Hollywood ?
Quand j’ai débuté en tournant dans mon premier film (La Tête à l’envers) en 1959, l’équipe ne comprenait pas de femmes. Peut-être qu’une femme travaillait en tant que scripte pour superviser la continuité du scénario. Aujourd’hui, dans les électriciens, les charpentiers, les caméramans… On trouve des femmes partout. C’est merveilleux. Il semble y avoir eu une prise de conscience : les hommes sont plus conscients du fait qu’ils doivent bien se comporter…
C’est une très bonne chose…
Tout à fait. Et puis, les femmes participent davantage à la politique. Elles sont plus actives. Cela a toujours été le cas, mais de plus en plus de jeunes femmes sont des activistes aujourd’hui.
“Beaucoup d’hommes racontent avoir eu leur mon premier orgasme en regardant Barbarella.” Jane Fonda
J’ai lu qu’un remake du film Barbarella (1968) était en préparation avec Sydney Sweeney dans le rôle principal…
Oui, ils réfléchissent en effet à un remake de Barbarella. Je ne sais pas si cela va arriver. Je serais surprise qu’ils le réalisent vraiment.
Que représente ce film dans votre carrière ?
Avec ce film, je suis responsable du premier orgasme de nombreux jeunes garçons, et j’en suis très heureuse. Je le sais parce qu’ils me le disent. Beaucoup d’hommes racontent avoir eu leur mon premier orgasme en regardant Barbarella. Richard Branson (l’homme d’affaires richissime derrière l’empire Virgin, ndlr) m’a dit qu’il avait subi une opération au pénis. Et quand il a vu Barbarella, il a eu une érection et ses points de suture ont éclaté (rires).
C’est fou…
Et véridique. Et vous pouvez le répéter. Parce qu’il l’a raconté lors d’un discours devant des milliers de personnes. (en français) J’étais choquée (rires).
Que est le film que vous préférez dans votre filmographie ?
La Maison du lac (On Golden Pond) de Mark Rydell, sorti en 1981. Parce qu’il m’a permis de travailler avec mon père, Henry Fonda, et qu’il a remporté un Oscar grâce à ce film avant de mourir.
“Toute ma vie, j’ai travaillé dur sur moi-même, en me critiquant, en allant en thérapie, en méditant, en lisant, en ayant des amis qui étaient meilleurs que moi.” Jane Fonda
Vous avez déclaré en interview être devenue plus heureuse en vieillissant…
Je dirais que c’est arrivé à la fin des années 70 et dans les années 80. Je suis alors devenue plus heureuse. Je n’étais pas heureuse plus jeune. Pour une raison que j’ignore, j’ai toujours voulu devenir une meilleure personne. Donc, toute ma vie, j’ai travaillé dur sur moi-même, en me critiquant, en allant en thérapie, en méditant, en lisant, en ayant des amis qui étaient meilleurs que moi, plus intelligents que moi et plus jeunes que moi, mais aussi plus courageux. Toutes ces choses m’ont aidée à prendre confiance en moi, à me sentir mieux dans ma peau et à devenir une meilleure personne. Je suis une meilleure personne que lorsque j’étais jeune.
Vous avez également confié dans une interview : “C’est lorsque je suis devenue célibataire, à 65 ans, que j’ai commencé à m’épanouir…” À 86 ans, comment vous sentez-vous ?
Je suis célibataire. Parce que j’ai travaillé dur… Je connais des amis (j’en ai même épousés) qui ont tendance à rejeter la faute sur tout le monde. Ils disent des choses comme : “Le monde est plein de connards. Je suis la seule personne intelligente.” Je n’ai jamais été comme ça. J’ai toujours voulu assumer la responsabilité lorsque j’ai commis des erreurs, y compris des mariages qui n’ont pas fonctionné. Je me suis toujours demandé : “Pourquoi ? Qu’ai-je fait ? Quelle était ma responsabilité dans le fait que ça ne marche pas ?” Quand vous assumez des responsabilités, vous apprenez et vous grandissez. J’ai donc l’impression d’avoir appris et grandi.
Avez-vous un chat ?
Non, j’avais un chien qui avait 17 ans et que j’adorais, qui est parti. Je n’en veux pas d’autre. Je voyage trop. Donc je ne peux vraiment pas m’en occuper. Et puis, qui va prendre soin de mon animal de compagnie si je meurs ? Je mourrai avant l’animal. Je suis vieille, je ne vais pas avoir un autre animal de compagnie. Mais avoir un chien me manque. C’était un Coton de Tuléar nommé Tulea.
“La beauté qui vient de l’intérieur dure plus longtemps.” Jane Fonda
Vous assumez vos cheveux gris depuis plusieurs années… À quel point est-ce libérateur ?
Eh bien, je n’ai plus à y consacrer cinq heures une fois par mois et 600 dollars. Et puis, il y a tous ces produits chimiques. J’étais très heureuse de me débarrasser de la couleur au salon de coiffure et des produits chimiques.
Pour le film Klute, vous avez coupé vos cheveux courts pour une allure nommée le “Klute shag”. Était-ce une manière d’imposer vos propres règles à Hollywood ?
Oui. Absolument. J’étais encore mariée à Roger Vadim et j’avais ces longs cheveux blonds, alors que ma vraie couleur est châtain. J’étais naturellement blonde seulement lorsque j’étais enfant. J’ai décidé que j’en avais assez du blond. J’avais le même coiffeur que Vadim à New York. J’y suis allée et je leur ai dit : “Faites quelque chose. Coupez tout !” Et ça a donné la coupe Klute.
Quelle est votre définition de la beauté ?
Eh bien, il y en a deux sortes. Il y a la perfection architecturale d’un visage bien proportionné et beau. Et il y en avait beaucoup au défilé de L’Oréal Paris, lundi. Et puis, il arrive que les visages parfaits soient ennuyeux. Il existe une autre beauté qui vient de l’intérieur. Cela a à voir avec l’attitude, la posture, la fierté d’être soi, le fait de se sentir bien dans sa peau… C’est une autre beauté, et ça dure plus longtemps.
Vous parlez très bien français. Quel est votre relation avec la France ?
(En français) C’est mon deuxième chez moi. Mon autre maison. J’y ai vécu plusieurs années. Et j’adore Paris !
Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu à propos de votre carrière ?
Je ne sais pas. Je ne me souviens pas vraiment d’un bon conseil à propos de ma carrière (rires).