14 mai 2024

Cannes 2024 : Les Reines du drame est-il le film le plus déjanté du festival ?

Avec Les Reines du drame, romance queer et punk, le réalisateur Alexis Langlois signe le film le plus déjanté du Festival de Cannes et offre un rôle de premier plan au chanteur Bilal Hassani.

C’est sans doute l’un des films les plus étranges, déjantés et attachants du Festival de Cannes 2024. Dévoilé lors de la Semaine de la Critique, le samedi 18 mai, Les Reines du drame – qui se présente comme « une comédie musicale punk et lesbienne » – est un objet difficile à définir. Un peu comme le bouleversant et osé Emilia Perez de Jacques Audiard (qui est également une comédie musicale queer ambitieuse), sauf qu’ici, il s’agit de la version low cost.

On jurerait que ce premier long-métrage du Français Alexis Langlois a été fabriqué dans les années 2000, du temps de Lorie, Ophélie Winter, les L5 et Britney Spears, et qu’il se compose de véritables clips et émissions de l’époque. L’ombre de Charly et Lulu et de La Nouvelle Star ne sont jamais très loin…

Le pitch halluciné de cette ode aux drama queens ? « 2055. Steevyshady, youtubeur hyper botoxé raconte le destin incandescent de son idole, la diva pop Mimi Madamour (Louiza Aura), du top de sa gloire en 2005 à sa descente aux enfers, précipitée par son histoire d’amour avec l’icône punk Billie Kohler (Gio Ventura). Pendant un demi-siècle, ces reines du drame ont chanté leur passion et leur rage sous le feu des projecteurs. »

Les Reines du drame, un film queer avec Asia Argento et Bilal Hassani présenté au Festival de Cannes 2024

Cette histoire d’amour queer entre deux stars en herbe (dont l’une explose alors que l’autre évolue dans l’underground) séduit d’abord par son casting. On y découvre un Bilal Hassani épatant en YouTubeur fan d’une pop star jusqu’à l’hystérie, Asia Argento en diva botoxée, juge dans un télé-crochet, Alma Jodorowsky en BFF ultra cute de l’héroïne ou encore la chanteuse du groupe de cold wave français Kas Product, Mona Soyoc, en artiste écorchée qui a connu son heure de gloire dans les années 80. Quant aux chansons du film, elles sont en partie signées par Yelle et Rebeka Warrior (Sexy Sushi).

Alexis Langlois, un réalisateur dans la lignée de John Waters et Yann Gonzalez

Le réalisateur convoque aussi des figures du milieu de la nuit parisienne, notamment la mannequin, Raya Martigny et la DJ et mannequin Dustin Muchuvitz. Et des personnalités flamboyantes de la scène drag (Jean Biche et Drag Couenne) pour un tableau scintillant qui impressionne par son audace.

Jusqu’ici, Alexis Langlois s’était fait remarquer avec courts-métrages queer et camp dans la lignée d’un Yann Gonzalez ou d’un John Waters. On retrouve dans Les Reines du drame son romantisme, son goût pour le kitsch, pour un certain mauvais goût et pour les marges, son humour et sa passion pour les années 2000. Alexis Langlois, qui cite Bob Fosse, Le Magicien d’Oz et Phantom of the Paradise en influences, en fait parfois vraiment beaucoup trop et le film souffre de quelques longueurs. Mais son récit lesbien à la fois tendre et acide fait preuve de suffisamment d’originalité pour hanter longtemps la rétine avec ses plans fantasmagoriques aussi subversifs que scintillants. Et sa critique de l’industrie musicale, une machinerie sexiste et cruelle qui broie les âmes et détruit les jeunes filles en quête de gloire, est des plus pertinentes. Tout comme son hommage aux égéries écorchées et radicales restées dans l’ombre à cause de leurs démons ou de leur trop grande authenticité.

Le film Les Reines du drame (2024) d’Alexis Langlois, avec Asia Argento et Bilal Hassani, n’a pas encore de date de sortie.