10 oct 2022

The Pill : le succès d’une galerie d’Istanbul à la pointe de la création contemporaine

La très pointue galerie d’Istanbul The Pill célèbre ses cinq années d’existence avec un beau livre retraçant son engagement pour la nouvelle scène artistique et des thématiques engagées. Publié chez JBE Books, l’ouvrage sera dévoilé le 18 octobre prochain en marge de Paris+ dans un pop-up investi par la galerie pour l’occasion, avec une exposition de la sculptrice française Marion Verboom.

Pour une oreille non avertie, The Pill, soit “la pillule”, sonne comme une énigme. Tout au plus sait-on qu’il s’agit d’une galerie, dont le nom aura peut-être été aperçu ici ou là au détour d’une foire. Une galerie donc, et l’une des plus dynamiques du moment, basée à Istanbul, dans le quartier de Balat. Une base également, à partir de laquelle arpenter les coordonnées d’un monde globalisé, accéléré et liquide. Une famille élective enfin, composée des artistes Soufiane Ababri, Özlem Altın, Raphaël Barontini, Mireille Blanc, Pablo Dávila, Merve Denizci, Berke Doganoglu, Elif Erkan, Louis Gary, Leylâ Gediz, Irem Günaydın, Fırat Itmeç, Kadir Kayserilioglu, Lux Miranda, Eva Nielsen, Daniel Otero Torres, Theo Pinto, Elsa Sahal, Ugo Schiavi, Marion Verboom et Apolonia Sokol. Majoritairement issus de la scène turque et française, ils revendiquent de croiser les univers et d’hybrider les provenances.

 

 

“J’ai décidé de donner forme à mon désir de construire une plateforme navale qui serait entièrement autonome et écoresponsable” – Suela Cennet.

 

 

Voilà pour les faits. Mais toujours ce nom énigmatique, là où la plupart des galeries préfèrent arborer à leur fronton le nom de leur fondateur. C’est qu’il s’agit, à l’origine du projet de The Pill, de bien plus qu’une galerie. Dans l’ouvrage publié par JBE Books à l’occasion des cinq ans de la galerie (la publication a été décalée en raison de la crise sanitaire), sa fondatrice Suela Cennet revient sur ses rêves utopiques : au tout début, se trouvait l’idée folle d’un vaisseau flottant. “En 2010, après avoir passé quelques mois à Istanbul, j’ai décidé de donner forme à mon désir de construire une plateforme navale qui serait entièrement autonome et écoresponsable”, écrit celle qui, d’origine albanaise et turque, a étudié à Sciences Po avant un passage par la galerie Templon, à Paris.

Marion Verboom, “Tectonie” (2019). Jesmonite et poudre de cuivre. Installation comprenant dix fragment de diverses tailles, 58 cm. Marion Verboom est représentée par la galerie The Pill, Istanbul.

Les plans de cette “pillule”, qu’elle imagine ancrée dans le Bosphore et naviguant de port en port, ont bel et bien été dessinés, mais se sont heurtés aux lois maritimes. Suela Cennet ouvrira The Pill en 2015, en l’infusant de ces prémices utopiques : parmi les “obsessions” du programme, écrit-elle encore, se trouvent “le déplacement, la dépossession, la violence, la domination, l’empreinte, la mémoire et l’archive” ; et comme mode de fonctionnement, l’amitié, les micro histoires et les mythologies arachnéennes. Une nouvelle scène, tout autant qu’une nouvelle échelle, à en croire New Art Scales [de nouvelles échelles pour l’art], le titre programmatique de l’ouvrage qui raconte les premières années d’existence de la galerie tout en ouvrant sur de futurs développements – forcément mobiles, libres et imprévisibles. Afin de célébrer la publication de cette édition anniversaire, la galerie organise un événement dans la capitale française pendant la foire Paris+ par Art Basel, présentant dans un pop up ouvert pour l’occasion une exposition personnelle de la sculptrice française Marion Verboom.

 

 

New Art Scales (with The Pill), JBE Books, 2022 (300 pages , 35 euros). Marion Verboom, “Illinx”, présentée du 19 au 29 octobre 2022 au sein de The Pill Paris Pop Up au 7, rue Froissart, Paris 3e. Vernissage de 18h à 20h le 18 octobre 2022.

Eva Nielsen, “Qasar” (2020). Huile, acrylique et sérigraphie sur toile, 200 × 150 cm. Eva Nielsen est représentée par la galerie The Pill, Istanbul.