Avez-vous déjà marché sur de l’or?
C’est l’expérience mystique que propose l’artiste Mathias Kiss dans la chapelle de la manufacture des Gobelins dans le XIIIe arrondissement de Paris jusqu’au 4 décembre.
Par Léa Zetlaoui.
Ce n’est pas la première fois que Mathias Kiss, ancien Compagnon et artiste parisien, fait marcher ses fidèles sur de l’or. En effet, en 2015, il avait déjà recouvert le sol de la galerie Alain Gutharc, rue Saint Claude (dans le IIIe arrondissement), de la précieuse matière qui se patinait non pas avec le temps, mais avec les pas des curieux. Aujourd’hui, ce n’est plus entre les quatre murs blancs d’une galerie du Marais que Mathias Kiss reproduit cette installation mais dans la petite chapelle de la Manufacture des Gobelins.
Construite en 1603 sous Henri IV, c’est pendant le règne de Louis XIV que la Manufacture royale des Gobelins acquiert son haut statut et devient fournisseur officiel de la couronne en tapisserie. Depuis 2007, le sublime établissement d’architecture baroque classé monument historique accueille régulièrement des expositions en hommage au savoir-faire français.
Il y a près de 400 ans, Colbert et Charles Le Brun développent les manufactures en France et élevent l’artisanat français au rang d’art. Ainsi l’exposition Créer sous Louis XIV accueille une profusion d’œuvres imposantes tant par leurs tailles que leurs ornements : tentures et tapisseries, mobilier, marqueteries, peintures, sculptures… Force est de constater que le roi-soleil ne faisait pas dans la demi-mesure.
Et quoi de plus bling qu’une chapelle tapissée d’or pour se rappeler la stature d’un roi à l’égo démesuré qui glorifiait cette couleur symbole de richesse par excellence ?
Compagnon pendant 15 ans, Mathias Kiss maitrise l’ornementation. Depuis 2008, l’artiste détourne d’ailleurs des éléments des arts décoratifs français à travers des installations époustouflantes : des corniches massives en or suspendues dans le vide, des miroirs froissés dans lesquels on ne se voit pas, des cadres en trois dimensions… À mi-chemin entre le classicisme et le brutalisme, les créations de Mathias Kiss offrent une vision ultra contemporaine d’objets soumis à des règles strictes.
Avant les sols, c’est un mur que Mathias Kiss avait recouvert d’or, une manière d’“inviter à la rêverie mais aussi à la réflexion. L’or c’est la lumière, c’est la vie”, confiait-il à Numéro en 2015. Ce procédé une fois appliqué dans un lieu aussi spirituel qu’une chapelle prend davantage de sens encore. Par la même occasion, il unit 400 ans d’histoire des arts décoratifs français dans 50m2.
Exposition Galerie des Gobelins, Paris XIIIe
42, avenue des Gobelins 75013 Paris
Du 18 septembre au 4 décembre 2019
Tous les jours, de 11h à 18h, sauf les lundis.