Chanteuse

Shay

Depuis ses débuts aux côtés de Booba jusqu’à la création de son propre label, Shay incarne une figure emblématique du rap francophone. À travers sa musique comme par ses choix stylistiques, elle impose une personnalité audacieuse. Ainsi, son parcours reflète à la fois indépendance, maîtrise et évolution artistique.

Publié le 4 juin 2025. Modifié le 10 juillet 2025.

Le parcours de Shay 

Une lutte dès le plus jeune âge contre les codes de genre

De son vrai nom Vanessa Lesnicki, Shay voit le jour à Bruxelles 1990. Elle grandit dans une famille majoritairement constituée d’hommes. À l’instar de ses frères Dimitri (son jumeau) et Olivier (son aîné) qui exerçaient des loisirs majoritairement réservés aux hommes : le foot, les activités d’extérieurs. À ce sujet, elle explique dans une interview au média GQ en 2025 : “J’ai grandi en jalousant mes frères, qui pouvaient monter aux arbres, jouer au foot, se battre, etc. Moi, ma mère m’a inscrite à la danse. Mais j’étais un garçon manqué, je ne comprenais pas le concept de tutu. Encore maintenant, je suis traumatisée par les ballerines à cause de ça”. 

Une enfance qui l’exhorte donc à brouiller les codes de genre, lorsqu’elle se lance dans l’industrie musicale en 2011. Par exemple, Shay arbore des pièces vestimentaires plutôt masculines. Notamment des costumes trois pièces ou des pantalons XXL, lors de la promotion de son album Jolie Garce (2016).

À mi-chemin entre hyper – féminité et le vestiaire masculin


Que personne ne se méprenne, elle garde et accentue sa féminité prenant à contre-pied la figure de la rappeuse “garçon manqué”. Shay le dévoile dans une interview accordée à Numéro en février 2025: “Moi, j’ai débarqué [dans le rap] sans prévenir avec une image très… féminine. J’inspire [les autres femmes] peut-être parce que j’ai réussi à me faire une place dans une industrie foncièrement masculine.” En peu de mots, Shay incarne les femmes puissantes. Elle s’inspire de femmes qui aiment défier les diktats sociaux, à l’instar de Naomi Campbell et Mylène Farmer

En effet, en 2016, Shay franchit une étape décisive avec son premier album Jolie Garce. Par exemple, des titres comme PMW, Thibaut Courtois ou Cabeza rencontrent un succès significatif et accumulent plus de 35 millions d’écoutes individuellement. L’album décroche même le Graal, avec une certification disque de platine. Ce résultat ne relève pas du hasard, mais plutôt d’un savant mélange entre rap incisif, pop urbaine et R&B sensuel. Elle y défend ainsi un style cohérent et assumé. La pierre angulaire d’une ascension affolante.

Les débuts de Shay dans le rap francophone

À partir de 2011, Shay fait une entrée remarquée dans le paysage musical grâce à Cruella, un morceau percutant en collaboration avec Booba. Ce duo, loin d’être anodin, marque un véritable tournant. En effet, cette rencontre ne se limite pas à une simple apparition : elle scelle le début d’une trajectoire singulière dans l’univers du rap francophone. Non seulement Cruella impose une présence vocale puissante, mais il révèle également une esthétique assumée, à la fois tranchante et magnétique. À travers ce titre, Shay affirme déjà un positionnement à contre-courant, entre attitude brute et sensualité maîtrisée.

Par la suite, la rappeuse poursuit son chemin avec une détermination croissante. Elle affine son flow, modèle son identité artistique et construit un univers hybride où se mêlent rap, trap, et influences pop. À chaque nouvelle sortie, elle ne se contente pas de suivre les codes du genre : elle les redessine. Ainsi, ses morceaux deviennent peu à peu les vecteurs d’une voix singulière, reconnaissable entre toutes — rauque, provocante, toujours sur le fil.

Dès lors, ce qui aurait pu n’être qu’un featuring remarqué devient l’acte fondateur d’une ascension affirmée. En imposant son style sans compromis, Shay s’inscrit dans une génération d’artistes qui bousculent les normes, brouillent les frontières entre les genres, et réinventent l’image même de la rappeuse francophone.

L’album Jolie Garce, une affirmation artistique

C’est en 2016 que Shay franchit un cap déterminant avec la sortie de son premier album, Jolie Garce. Cette œuvre ne se contente pas de confirmer son potentiel : elle l’installe durablement dans le paysage musical francophone. Dès les premières écoutes, certains titres s’imposent avec force. PMWThibaut Courtois ou encore Cabeza rencontrent un large écho, tant dans les clubs que sur les plateformes de streaming. À vrai dire, ce succès ne tient pas du simple coup de chance. Il résulte d’une alchimie bien pensée, où se mêlent les rythmes tranchants du rap, les envolées mélodiques du R&B, et une pop urbaine assumée.

Ainsi, Jolie Garce ne propose pas un enchaînement de morceaux opportunistes. Il dessine plutôt un territoire sonore cohérent, audacieux, entièrement à l’image de son autrice. Shay y déploie une écriture affûtée, une voix sûre, et surtout, une posture. Ni fragile, ni docile : elle assume tout, le désir, le pouvoir, les contradictions. Grâce à cette sincérité brute, l’album obtient rapidement une certification disque de platine — reconnaissance rare pour un premier projet, surtout dans un univers encore majoritairement masculin.

En conséquence, ce disque marque bien plus qu’une étape dans sa carrière. Il en constitue la pierre angulaire. Un manifeste élégant et brutal, qui affirme un style, une esthétique, une vision. Dès lors, Shay cesse d’être une promesse. Elle devient une figure. Un repère. Et surtout, une voix impossible à ignorer.

Une carrière marquée par des collaborations et des succès

Troisième opus de la rappeuse paru en 2019, Antidote confirme cette montée en puissance de Shay. Parmi les morceaux qui composent ce disque, le titre Liquide, en duo avec Niska, illustre une alchimie musicale forte entre les deux mélomanes. En outre, d’autres morceaux comme Notif ou Cocorico témoignent d’une esthétique sonore en constante évolution. Autrement dit, Shay n’hésite pas à expérimenter, quitte à aller à rebours des codes établis. Une audace stylistique qui lui vaut une seconde certification platine. Ainsi, elle se positionne comme une figure majeure du rap actuel.

La création de Jolie Garce Records, symbole d’indépendance

En ce qui concerne sa carrière, l’année 2021 est déterminante. En effet, Shay fonde Jolie Garce Records, un label à son image. Dès lors, elle prend la main sur toutes les étapes de production. Grâce à cela, elle façonne librement son univers musical. De surcroît, ce label lui permet de soutenir d’autres artistes. À vrai dire, cette initiative illustre parfaitement son désir de transmission autant que son besoin d’indépendance. Finalement, c’est une démarche aussi artistique que stratégique.

Pourvu qu’il pleuve, l’album de la maturité

Et à l’aube de 2024, Shay publie Pourvu qu’il pleuve sous ce label qu’elle a créé, Jolie Garce Records. Au sein de cet opus, on retrouve, par exemple, le single Sans cœur, à nouveau en featuring avec Niska. Un titre qui atteste une identité artistique arrivée à maturation pour Shay. En effet, le titre, tout comme l’album, adoptent un ton plus introspectif. Toutefois, il conserve l’impact émotionnel et rythmique qui fait sa signature. En somme, Shay prouve qu’elle peut évoluer sans se trahir.

Une influence notable dans la mode et la culture

En plus de la musique, Shay investit également l’univers de la mode. À partir de 2020, elle devient égérie de Puma puis de Burberry. En particulier, sa présence en couverture de Vogue Japon — une première pour une artiste francophone noire — marque un moment fort. C’est dire si son image dépasse le cadre strict du rap. À l’instar de certaines icônes, elle devient un symbole culturel. En réalité, son esthétique inspire, bouscule et transforme les représentations communes du milieu du rap.

Vers de nouveaux horizons

Dorénavant, Shay ne se contente plus de suivre des tendances : au contraire, elle les redéfinit. Dans ce cadre, elle mêle audace musicale, entrepreneuriat affirmé et esthétique puissante. En conclusion, elle incarne une figure culturelle incontournable. Pour toutes ces raisons, son influence risque fort de s’amplifier. Quant à l’avenir, il semble s’écrire à son rythme — et selon ses propres règles.