20 sep 2024

Surréalisme : 7 expos pour tout savoir sur le mouvement 

Alors que le Centre Pompidou inaugure cet automne une large rétrospective pour célébrer le centenaire du surréalisme, une ribambelle de galeries parisiennes s’associent au musée autour du projet « Paris Surréaliste », et présentent en marge de plus petites expositions sur quelques figures centrales du mouvement. Numéro en retient sept où s’évader le week-end, pour devenir incollable sur le mouvement.

De Paris à New York, de Man Ray à Val Telberg : le surréalisme outre-atlantique

Si les œuvres de Man Ray (1890-1976) figurent actuellement sur les murs du Centre Pompidou, la galerie Les Douches expose, elle aussi, quelques trésors signés de l’artiste franco-américain : sept tapisseries réalisées en 1973 par Frédérique Bachellerie et Peter Schönwald, et inspirées par sa série de collages papiers Revolving Doors, réalisées au début de sa carrière aux États-Unis entre 1916 et 1917. Publiées quelques années plus tard au sein de revues surréalistes, leurs versions lithographiques influenceront de nombreux artistes du mouvement naissant, et préfigurent, par la superposition de formes abstraites, les expérimentations photographiques que Man Ray débute dans les années 20. 

Des clichés en noirs et blancs qui ont fait sa renommé, et qui trouvent aujourd’hui leur écho dans le travail du surréaliste américain Val Telberg (1910-1995), dont les œuvres sont présentées au sein de la même galerie parisienne. Collages de personnages en mouvement, figures en flottement, hallucinations visuelles… Autant de concepts visuels qui le rapprochent de Man Ray, et qui l’inscrivent pleinement parmi les figures influentes du mouvement, souvent centré sur ses grands noms européens.

Expositions “Revolving Doors. Sept tapisseries de Man Ray” et “Val Telberg. Un surréaliste américain à Paris”, jusqu’au 10 novembre 2024 à la galerie Les Douches, 5 Rue Legouvé, Paris 10e.

La galerie Minsky dédie trois expositions à Leonor Fini

Figure majeure du surréalisme, Leonor Fini (1907-1996) a longtemps été éclipsée au profit de ses pairs masculins. Pourtant présentée au sein des plus grandes expositions du mouvement dans les années 30 et 40 (Paris, Londres, New York), l’artiste franco-italienne connaît un nouveau succès depuis quelques décennies grâce aux nombreuses galeries qui lui dédient une série de rétrospectives, nourries par les textes et monographies que ses amis surréalistes lui dédiaient de son vivant (Jean Cocteau, Giorgio De Chirico, Paul Eluard…). À l’image de la galerie Minsky, qui inaugure cette rentrée une exposition en trois volets, grâce au prêt de tableaux par le Centre Pompidou. 

Sous forme de rétrospective présentant son travail de la fin des années 20 jusqu’aux années 90, le premier chapitre déroule une série d’œuvres rarement exposées, dont deux emblématiques de sa carrière : Femme en armure 2 (1938) et son autoportrait en Sphinx avec Stanislao Lepri (1943). Un parcours foisonnant, à l’image de ses peintures, où l’on peut également croiser quelques-uns des masques imaginés par Leonor Fini à l’occasion de ses célèbres bals costumés parisiens organisés par l’artiste dans la seconde moitié du 20e siècle…

Exposition “Leonor Fini. Rétrospective”, jusqu’au 2 novembre 2024, Première partie d’un cycle de trois expositions à la galerie Minsky, 37, rue Vaneau, Paris 7e.

Trois figures féminines incontournables du surréalisme réunies à la galerie Raphaël Durazzo

De l’autre côté de la Seine, la galerie Raphaël Durazzo présente également quelques œuvres de Leonor Fini – plus précisément ses intrigants dessins érotiques, à peine croqués à l’aquarelle sur de délicates feuilles de papier. Sur ces mêmes cimaises, se côtoient les paysages kaléidoscopiques de Dorothea Tanning (1910-2012), bordés par des sculptures de Leonora Carrington (1917-2011) réalisées à la fin de sa vie, et présentées pour la première fois en France. Trois grands noms féminins du surréalisme, réunis au sein d’une exposition imaginée par la commissaire britannique et spécialiste du mouvement Alyce Mahon.

Autoportraits, nus abstraits, représentations mythologiques… L’imaginaire foisonnant de ces trois artistes ouvre un nouveau pan d’exploration du surréalisme, soulignant l’impact du mouvement dans la remise en question des attentes sociales et morales qui reposaient sur les femmes de la société du début du 20e siècle. Surtout, la présentation de leur travail tisse également un fil vers le présent, au gré des créations contemporaines de Sara Anstis, Ginny Casey ou Piper Bangs, qui signent des œuvres spécialement conçues pour l’exposition.

Exposition “Le surréalisme au service de la distraction”, jusqu’au 23 novembre 2024 à la galerie Raphaël Durazzo, 23 Rue du Cirque, Paris 8e.

Les étranges dessins de Max Ernst à la galerie Jeanne Bucher Jaeger

Artiste protéiforme, Max Ernst est un électron libre du mouvement surréaliste. Des monstres qui hantent ses peintures aux différents supports utilisés par ce dernier, son travail continue de fasciner et d’interroger les passionnés d’histoire de l’art, de nombreuses décennies plus tard. Dans le riche fonds d’œuvres de la galerie Jeanne Bucher Jaeger (qui fêtera ses cent ans en 2025), on retrouve notamment quelques uns de ses mystérieux frottages et grattages, publiés en 1926 par la fondatrice de la galerie parisienne. 

Ovnis dans la carrière de l’artiste, ces petites feuilles de papier frottées à la mine de plomb déploient une série d’images énigmatiques, où l’on retrouve notamment Loplop, oiseau alter ego de Max Ernst. L’inspiration de ces petites œuvres ? Un souvenir d’enfance de l’artiste, hanté par la vision ensommeillée d’un panneau de faux acajou en face de son lit, et par l’effet d’optique produit par les rainures du bois… que l’on retrouve notamment dans les stries ondulées de son crayon, autant que dans les toiles bleues de la jeune Evi Keller, avec lesquelles le travail de Max Ernst dialogue au sein de la galerie. 

Expositions “Max Ernst. Histoire naturelle” et “Origines. Evi Keller”, du 21 septembre 2024 au 18 janvier 2025 à la galerie Jeanne Bucher Jaeger, 5 rue de Saintonge, Paris 3e.

Jean-Claude Silbermann : un surréaliste moderne à la galerie Sator

Né en 1935, Jean-Claude Silbermann s’inscrit tardivement dans le surréalisme. Figurant parmi les artistes actuellement exposés au sein de la grande rétrospective du Centre Pompidou, ce dernier s’est d’abord plongé dans la poésie dès sa majorité, participant à de nombreux événements organisés par le mouvement entre 1956 et 1969. Avant de s’emparer, au début des années 60, d’un pinceau, avec lequel il déploie alors la même imagination débordante qu’au sein de ses poèmes. 

En témoigne son exposition personnelle à la galerie Sator, où ses toiles marouflées et colorées détonnent sur les cimaises immaculées du lieu. Des figures engouffrées dans un buisson verdoyant à ses étranges personnages qui nous tournent le dos apposés sur le lit d’une souris ou faisant face à un paysage bucolique en feu… Les œuvres de Jean-Claude Silbermann façonnent un univers surréaliste empreint des codes du milieu du 20e siècle, mais dont les couleurs et les thèmes s’ancrent dans notre réalité du début du 21e. Une figure majeure du mouvement, qui, en octobre prochain, laissera sa place à la surréaliste Leonora Carrington, à laquelle la galerie dédiera une exposition.

Exposition “L’attente et la raison ardente. Jean-Claude Silbermann”, jusqu’au 5 octobre 2024 à la galerie Sator Marais, 8 passage des Gravilliers, Paris 3e.

Le duo Claude Cahun / Marcel Moore redécouvert à la galerie Alberta Pane

Entre les murs de la galerie Alberta Pane, les créations d’un duo singulier – et encore assez méconnu – du surréalisme se révèlent : celles de l’artiste Claude Cahun (1894-1954) et de sa muse et compagne Marcel Moore. Photographie, livre, collage, sculpture, performance… Le travail de Claude Cahun s’exprime à travers tous les médiums qui l’ont, un jour, intéressé. Figure queer avant l’heure, iel revendiquait au travers de son art un corps unique, androgyne, sans distinction de genre, anticipant les thèmes qui transforment aujourd’hui notre société. 

Réinvention de l’iconographie du Mystère d’Adam, représentation symbolique de la figure paternelle, autoportraits poétiques : aux côtés de Marcel Moore, l’artiste conçoit des œuvres à quatre mains, et produit un œuvre sans équivalent pour l’époque, où la photographie tient une place centrale dans le questionnement de son identité, et des étiquettes apposées par les normes sociales.

Exposition “Claude Cahun / Marcel Moore”, jusqu’au 9 novembre 2024 à la galerie Alberta Pane, 47 Rue de Montmorency, Paris 3e.

Trois histoires surréalistes racontées à la galerie Le Minotaure

Adresse historique des surréalistes, le 2 rue des Beaux-Arts redevient, à l’occasion du projet “Paris Surréaliste” organisé en marge de l’exposition au Centre Pompidou, un lieu d’exploration et de découverte des grandes figures mouvement. Alors qu’on y trouvait à la fin des années 50 la mythique librairie Le Minotaure, la galerie du même nom (fondée en 2002) inaugure cet automne une exposition, également déployée sur deux autres lieux (rue de Seine et rue Mazarine), explorant trois thématiques centrales du surréalisme. 

Les “formes simples”, inspirées par la nature et les formes animales, les “métamorphoses”, source de création inépuisable pour les artistes du mouvement, et les “rêves et cauchemars”, via lesquels ces derniers sondaient leur inconscient. Une exposition ambitieuse, au sein de laquelle on retrouve les artistes les plus célèbres de l’époque, des sculptures abstraites de Jean Arp (1886-1966) aux séduisantes photographies d’Erwin Blumenfeld (1897-1969), en passant par les toiles hypnotiques de Francis Picabia (1879-1953) et, évidemment, par André Breton (1896-1966), auteur du célèbre manifeste du mouvement (1924).

Exposition “Surréel. Trois petites histoires surréalistes”, jusqu’au 30 novembre 2024 à la galerie Le Minotaure, 2 rue des Beaux-Arts, 23 rue de Seine, et 19 rue Mazarine, Paris 6e.