De RuPaul à Shane Haddad : les livres dont il faut s’emparer cette rentrée
Chaque mois de septembre s’entame avec son lot de sorties littéraires, commentées et recommandées par la presse. Pour cette rentrée, Numéro propose sa propre sélection, où l’éclectisme règne.
Par La rédaction.
Le triangle amoureux déboussolant du nouveau livre de Shane Haddad
C’est l’une plus belles sorties de cette rentrée littéraire. Applaudi par la presse, le nouveau roman de la jeune écrivaine de 28 ans Shane Haddad secoue ses lecteurs, et les emporte dans l’histoire haletante – et pourtant bien connue – d’un triangle amoureux. Poncif de la littérature française, ce thème retrouve ici toute son intensité, croisant la nécessité de vivre et l’impossibilité d’échapper à la mort. En l’occurence celle de Mathias, sur laquelle le récit s’ouvre, déroulant ses obsèques avant de retracer son dernier voyage en vieille voiture à travers la France avec ses deux amis, Mathieu et Gil. Soirées improvisées, trajets compliqués, amour, alcool, amitié, sexe… L’effervescence de ces derniers moments de vie se heurte à la disparition tragique de Mathias, comme arrêté dans sa course.
“Aimez Gil” de Shane Haddad, éditions P.O.L.
Le maître du cuir Jean-Claude Jitrois signe sa première biographie
Connu comme le maître incontesté du cuir Stretch, Jean-Claude Jitrois a eu mille vies. Autrefois psychologue formé à la psychomotricité enfantine à la Pitié-Salpêtrière, sous la tutelle de Françoise Dolto et de Jacques Lacan, il se réinvente à la fin des années 70 en ouvrant, à Nice, une boutique dédiée au cuir. En 1984, le créateur né dans le sud de la France s’installe à Paris et habille désormais Johnny Hallyday, Liz Taylor et Céline Dion. Aujourd’hui âgé de 80 ans, Jean-Claude Jitrois retrace sa passionnante histoire dans une savoureuse biographie à lire comme un témoignage sur une époque empreinte de créativité et de liberté.
“Ma peau se souvient” de Jean-Claude Jitrois, éditions Fayard/Pauvert.
Pedro Almodóvar : les récits d’une vie
Si les scénarios de ses films lui ont valu une multitude de prestigieuses récompenses, Pedro Almodóvar n’a pas seulement écrit pour son cinéma. Réalisateur de légende, l’Espagnol commence dès le début des années 60 à rédiger, dans le coin de la cuisine de sa maison d’enfance à Estrémadur, des courtes nouvelles. Inspirées par ses amours, ses amants, ses muses, sa famille ou encore par son rapport au temps, à la religion ou au patriotisme, les douze histoires réunies au sein de cet ouvrage nous plongent dans l’univers et l’intimité du cinéaste, et nous donnent un aperçu de son imaginaire baroque.
“le dernier rêve” de Pedro Almodóvar, éditions Flammarion.
L’histoire de la mode selon Loïc Prigent
Même couverture, même police d’écriture : le nouveau livre de Loïc Prigent rappelle son fameux J’adore la mode mais c’est tout ce que je déteste (2016), recueil de citations mordantes récoltées au cours de soirées, de défilés et d’autres évènements qui ponctuent le très privé (et prisé) monde de la mode. Aujourd’hui, le journaliste entame avec Mille milliards de rubans une histoire de la mode, à sa façon, ponctuée de touches d’humour et de remarques pertinentes. Premier tome d’une future série, l’ouvrage débute au 19e siècle et s’étend jusqu’à l’ouverture de la première boutique de Gabrielle Chanel en 1913, et révèle l’intérêt pas si superficiel de la couture dans le déroulé de l’histoire générale.
“Mille milliards de rubans. La vraie histoire de la mode” de Loïc Prigent, éditions Grasset.
L’autobiographie sans tabous de RuPaul
Homme de télé, chanteur, danseur, auteur… RuPaul est aussi, et surtout, la drag queen la plus célèbre du monde, qui brille depuis le début des années 90 au gré de moments flamboyants qui l’ont transformé en une icône de la pop culture. Toujours apprêté de la tête aux pieds, entre maquillage élaboré et looks spectaculaires, RuPaul se met pour la première fois à nu, abandonnant les paillettes et les artifices pour se dévoiler dans toute son intimité au sein de son autobiographie au titre intriguant La maison des non-dits. Il y dessine ses mémoires et déroule son parcours poignant, de son enfance de jeune garçon noir, pauvre et queer issu d’un foyer brisé à l’acceptation de soi et la découverte du pouvoir enivrant et libérateur de la scène.
“La maison des non-dits” de RuPaul, éditions Pride First.
Le nouveau livre introspectif et mélancolique de Charles Consigny
Qu’est-ce qu’avoir trente-cinq ans en France en 2024 ? Peut-on vraiment réussir sa vie ? Le grand amour existe-t-il encore ? Voilà quelques unes des nombreuses questions qui traversent le quatrième ouvrage de Charles Consigny. Ici, l’écrivain français sort de son Paris natal bourdonnant pour embrasser le calme et la beauté de la campagne jurassienne et mieux sonder le fond de sa pensée, déroulée dans un texte de près de trois cents pages.
Habitué à commenter l’actualité chaude, le trentenaire multi-casquettes – à la fois avocat, journaliste, chroniqueur – profite de ce cadre pour adopter un regard plus distancié et panoramique sur le monde qui l’entoure, de la vie politique internationale aux changements de son époque – qu’il n’hésite pas à critiquer sévèrement avec le ton mordant qui le caractérise.
Là où son précédent essai Je m’évade, je m’explique (2017) sonnait comme un appel à l’énergie d’une nouvelle jeunesse française, Le grand amour, plus introspectif et nostalgique, se teinte d’une certaine mélancolie où l’auteur laisse poindre les premières craintes liées au temps qui passe et aux lendemains inconnus.
“Le grand amour” de Charles Consigny, éditions Plon.