Maison de luxe

Valentino

Fondée en 1960 à Rome par Valentino Garavani, la maison Valentino incarne depuis plus de soixante ans une vision raffinée de la mode italienne.

Aux origines d’un empire de style

Dès l’origine, le couturier s’entoure de Giancarlo Giammetti. Ensemble, ils posent les bases d’un empire élégant et structuré. À Florence, lors de son premier défilé, la maison s’impose. Lignes nettes, tissus nobles, couleurs franches : le style Valentino se distingue immédiatement.

Très vite, le rouge devient sa signature. Ce « rouge Valentino », flamboyant et profond, évoque à la fois passion et discipline. Les robes longues, souvent épurées, redéfinissent la féminité. Leur force réside dans leur silence maîtrisé. Elles n’ont rien à prouver. Elles existent, tout simplement.

Une conquête internationale fulgurante

Dans les années 1960, Valentino conquiert Hollywood. Jackie Kennedy tombe sous le charme. Elizabeth Taylor également. Le nom de la maison résonne dans les cercles les plus exclusifs. Partout, l’aura de Valentino se déploie. Ainsi, sans renier son élégance romaine, la maison devient un symbole de prestige international.

Le succès s’étend au-delà de la couture. Très tôt, Valentino comprend l’importance de se diversifier. Il lance des lignes de prêt-à-porter. Puis des accessoires. Puis des parfums. Chaque extension reste fidèle à l’esthétique fondatrice. Même les déclinaisons les plus commerciales conservent une rigueur formelle. Valentino Roma, Red Valentino ou Valentino Garavani témoignent de cette expansion maîtrisée.

Un passage de témoin soigneusement orchestré

Cependant, les années passent. En 2007, après près de cinq décennies, Valentino Garavani se retire. Son départ marque la fin d’une ère. La maison entre alors dans une zone d’incertitude. Alessandra Facchinetti, dans un premier temps, reprend la direction artistique. Son passage reste bref. En 2008, Maria Grazia Chiuri et Pierpaolo Piccioli prennent la relève.

Ce duo transforme l’héritage sans le trahir. Ils réintroduisent l’ornement. Ils osent le romantisme, les broderies, les capes transparentes. Le sac Rockstud, avec ses clous métalliques, devient un phénomène. En mêlant rigueur et audace, le duo insuffle une nouvelle jeunesse à Valentino.

Le poids des rachats et la montée en puissance

En parallèle, la maison change plusieurs fois de main. Rachetée par le groupe Marzotto, puis par le fonds Permira, elle entre en 2012 dans le giron du fonds qatari Mayhoola. Ce nouveau soutien financier permet à Valentino d’accélérer son expansion mondiale. En quelques années, la maison ouvre plus de 170 boutiques. Elle s’implante dans près de 100 pays.

Bien que la marque se mondialise, elle ne perd pas son identité italienne. Rome reste le cœur battant. Le siège, installé Piazza Mignanelli, conserve un rôle symbolique fort. L’Italie, même silencieuse, continue d’irriguer chaque collection.

Pierpaolo Piccioli, vers une nouvelle poésie

À partir de 2016, Piccioli devient seul directeur artistique. Il s’émancipe de l’esthétique précédente. Son style devient plus poétique, plus expressif. Il impose le rose fuchsia comme nouvelle couleur emblématique. Les silhouettes deviennent plus fluides, parfois presque androgynes. Il cherche l’émotion, sans jamais tomber dans la mièvrerie.

Ce tournant stylistique séduit la critique. Le public suit. Les robes de Valentino reviennent sur les tapis rouges. Zendaya, Florence Pugh, ou encore Lady Gaga deviennent les visages d’une maison réenchantée. Sous Piccioli, Valentino devient un théâtre. Chaque collection raconte une histoire.

Une maison au croisement des mutations

Mais le monde change. Les attentes évoluent. Ainsi, la maison investit dans le digital. Elle soigne sa communication. Elle développe l’e-commerce, tout en conservant l’expérience boutique. Les campagnes publicitaires deviennent narratives. Elles privilégient le lien émotionnel plutôt que le produit.

Sur le plan éthique, Valentino agit également. En 2020, la maison abandonne la fourrure. Elle s’engage pour l’égalité salariale. Elle soutient des initiatives en faveur de la formation, de la création émergente et du développement durable. La maison ne se contente plus de faire rêver : elle prend position.

L’arrivée d’Alessandro Michele : rupture ou continuité ?

En 2024, après dix-huit ans au sein de la maison, Piccioli quitte son poste. Un événement majeur. Alessandro Michele, l’ancien directeur artistique de Gucci, prend la relève. Ce choix provoque un choc. L’univers baroque, narratif et décadent de Michele tranche avec l’élégance minimaliste de Piccioli. Néanmoins, sa nomination intrigue. Elle ouvre une nouvelle phase.

Sa première collection, présentée à Paris en juin 2024, mêle drame et beauté. Broderies luxuriantes, plumes théâtrales, silhouettes surréalistes : Michele n’édulcore rien. Il impose un souffle nouveau. Bien que certains observateurs expriment leur réserve, beaucoup saluent un retour au spectaculaire.

Kering entre dans la danse

Dans le même temps, un autre bouleversement survient. Le groupe Kering, géant du luxe, acquiert 30 % du capital de Valentino. Il dispose d’une option pour monter à 100 % d’ici 2028. Cette opération confirme une ambition claire : faire de Valentino une maison centrale, incontournable, à l’image de Saint Laurent ou Balenciaga.

Cette intégration à un grand groupe promet de nouveaux moyens. Mais elle soulève aussi des questions. L’âme de Valentino peut-elle survivre à une standardisation globale ? Seul le temps le dira.

Une immersion dans le surréalisme parisien

En janvier 2025, Alessandro Michele a ouvert une nouvelle page avec le défilé « Vertigineux » dans l’ancienne Bourse de Paris. Dès l’entrée, le public baignait dans une atmosphère onirique : une obscurité profonde, des gradins vertigineux et des sons industriels influant sur l’émotion collective. Puis les modèles sont apparus, porteurs d’une poésie visuelle : des robes en mousseline tourbillonnante, des motifs harlequin, des plumes dramatiques, des capes diaphanes, et même une robe rouge signature évoquant les grands maîtres de la peinture. Chaque tenue incarnait à la fois la technique d’un savoir-faire couture et la liberté d’une imagination surréaliste, métamorphosant le lieu historique en une scène absurde et fascinante

Une maison entre mémoire et modernité

Aujourd’hui, Valentino se trouve à la croisée des chemins. La maison doit conjuguer héritage et innovation. Elle doit parler aux nouvelles générations sans trahir les anciennes. Alessandro Michele devra marcher sur ce fil tendu. Trop d’audace, et l’ADN pourrait se diluer. Trop de respect, et l’élan créatif s’essoufflerait.

Pourtant, si l’histoire de Valentino a prouvé quelque chose, c’est bien sa capacité à renaître. La maison, toujours, trouve un nouvel équilibre. Elle surmonte les crises. Elle transforme les ruptures en élan.

Un futur encore ouvert, mais déjà vibrant

Ce qui distingue encore Valentino, c’est cette manière unique de durer. Son pouvoir tient dans l’alliance de la grâce et de la rigueur. D’un côté, l’illusion ; de l’autre, la structure. Chaque pièce traduit un dialogue entre forme et émotion.

Ainsi, même dans l’incertitude, la maison continue d’évoluer. Elle ne cesse de faire battre le cœur du luxe à l’italienne. Elle ne suit pas les tendances : elle les réinvente. Peut-être est-ce là, dans cette tension féconde entre tradition et audace, que réside le secret de sa longévité.