Chanteuse

Lana Del Rey

Lana Del Rey, née le 21 juin 1985 à New York, est de ces artistes qui ont fait du spleen une esthétique et du silence un langage. Il suffit d’un souffle, d’une note étirée dans le silence, pour reconnaître la signature vocale de Lana Del Rey. Voix de velours fêlée, figure solaire d’une nuit sans fin, elle incarne l’icône contemporaine d’une Amérique désenchantée. À la fois muse et prêtresse des cœurs brisés, elle tisse, depuis plus d’une décennie, une œuvre cohérente, profondément singulière. Entre glamour décadent et murmures mélancoliques, sa musique devient refuge, rituel, offrande.

Publié le 13 juin 2025. Modifié le 16 juin 2025.

La naissance d’une icône : de Lizzy Grant à Lana Del Rey

Avant la légende il y eut Elizabeth Woolridge Grant, née à New York. Une enfance feutrée, bercée par la beauté des églises, la poésie des pins et les silences d’une bourgeoisie américaine. Pourtant, au lieu de s’y fondre, elle choisit de tout réinventer. Elle devient Lana Del Rey. Très vite, grâce à Video Games, elle impose une langueur nouvelle dans un paysage pop saturé de rythmes synthétiques. Sa voix et sa diction effleurent, ses morceaux évoquent les ballades des années 60. Elle ne suit plus aucune règle, elle dicte les siennes.

Une esthétique vintage

Impossible de dissocier son univers sonore de son imaginaire visuel. Les clips de Lana Del Rey, véritables courts-métrages hantés, convoquent Marilyn Monroe, les motels californiens, les drapeaux froissés, les révoltes inachevées. Il y a du cinéma dans chaque image. Du mythe dans chaque robe. De la tragédie dans chaque cadrage. Son esthétique, toutefois, ne fige rien. Elle suggère, esquisse, détourne. Elle rejoue l’Amérique, non pas telle qu’elle fut, mais comme elle aurait pu l’être : plus lente, plus tendre, plus utopique.

Une œuvre de résistance poétique

Au fil des albums, Lana Del Rey perfectionne une langue qui n’appartient qu’à elle. Avec Norman Fucking Rockwell!(2019), elle atteint une maturité sidérante. Les errances, les plages vides, les départs sans retour deviennent matière à chant. Ensuite vient Did you know that there’s a tunnel under Ocean Blvd (2023). Œuvre ample, désenchantée, traversée d’une sincérité brûlante. Elle y murmure les enfances éteintes, les figures effacées, les promesses bancales. Le temps, là encore, se dilate. Il flotte, suspendu entre deux époques qui ne se parlent plus. Et au cœur de cet entre-deux, elle érige son autel.

Un chant de l’intime

Derrière les paillettes, pourtant, Lana Del Rey interroge le féminin. Sous une apparente candeur, ses textes révèlent une critique acérée de l’image de la femme, tant dans l’industrie musicale que dans l’imaginaire collectif. Elle incarne des héroïnes blessées, mais jamais soumises. Le manque devient posture. La fragilité, armure. Et sous ses silences, une lutte se dessine. Souterraine, certes, mais persistante.

Et maintenant ?

En 2025, Lana Del Rey poursuit sa traversée élégiaque. Elle prépare un album intimiste, inspiré par ses racines américaines. Ballades au piano, chœurs gospel, soupirs suspendus : tout évoque un retour au sacré. Parallèlement, elle travaille à l’adaptation cinématographique de ses poèmes. Ce projet hybride, entre spoken word et visual poetry, dessine un territoire à la frontière du songe et de la confession. Elle est attendue dans plusieurs festivals européens, où résonneront des morceaux inédits, presque secrets. Fidèle à sa démarche, elle traverse l’époque sans jamais s’y figer.

Lana Del Rey, c’est un corps ralenti, une voix qui effleure, une main tendue vers l’intérieur. Elle ne convoite ni l’effet, ni le tumulte. Elle cisèle le silence. L’instant devient offrande. Peu d’artistes, aujourd’hui, bâtissent ainsi une mythologie aussi cohérente. Elle ne suit pas le mouvement du monde. Elle en révèle les failles, les lenteurs, les détours. Et dans les ruines du rêve américain, elle érige un sanctuaire invisible. Tandis que tout s’accélère, elle, tout doucement, ralentit le monde.