ActeurChanteur

Fianso

Né le 21 juillet 1986 à Saint-Denis, Sofiane Zermani ne choisit jamais entre terrain et scène. Au contraire, il les embrasse ensemble. Rap incisif, projets collectifs, fiction politique ou théâtre intime : il articule chaque geste avec tension. Derrière Fianso, une voix brute, une mémoire du 93, une présence au cinéma. À la croisée des routes, il incarne un artiste rare, en clair-obscur.

Les débuts de Fianso

À Blanc-Mesnil, sa voix s’est forgée au contact du béton. D’abord comme un cri, ensuite comme un feu. De toute évidence, le rap ne fut pas un jeu pour lui. Il devint arme, langage, respiration. À partir des années 2000, Fianso s’infiltre dans les veines du rap souterrain. Son pseudonyme claque comme une injonction. À cet égard, il dit l’urgence d’exister, il dit l’identité d’un territoire. Rapidement, les freestyles se transforment en manifeste. Grâce à son émission Rentre dans le Cercle, il ouvre un espace inédit. Contrairement aux formats figés, celui-ci donne voix aux invisibles, la rue y reprend ses droits. En 2017, le morceau Toka marque un tournant. Il conjugue brutalité sociale et précision rythmique. Fianso impose alors un style singulier. En réalité, il entre dans la lumière sans quitter l’ombre.

À la suite de ce succès, il structure sa vision. Dès 2018, il fonde Affranchis Music. Ce label ne relève pas seulement du business. Il agit comme un manifeste. En ce sens, il rompt avec les codes stériles de l’industrie. Grâce à cette structure nait une nouvelle scène. Elle s’ancre dans le 93, mais résonne partout. Notamment, le projet 93 Empire en offre la plus belle démonstration. De fait, il fédère figures anciennes et voix nouvelles. En parallèle, Fianso publie Bandit Saleté. Ce disque frappe fort, à coups de textes tranchants. Pourtant, quatre ans plus tard, La Direction nuance le propos. Il laisse apparaître une introspection. À travers cette œuvre plus intime, il explore une autre densité.

Un acteur en clair-obscur

En 2018, le cinéma s’ouvre à lui. Dès Les Sauvages, série politique sur Canal+, il s’impose. Il incarne un personnage complexe : un homme politique musulman, traversé par les lignes de fracture contemporaines. Fianso ne joue pas, il habite. Sur l’écran, sa présence brûle. À mesure que ses rôles se multiplient, il confirme cette intensité. Parfois rage, parfois silence. Mais toujours incandescence. Plus récemment, il apparaît dans une relecture de Gatsby le Magnifique. Ce choix étonne mais révèle une autre facette du personnage. Désormais, l’opulence fissurée remplace la violence brute. En somme, la poésie trouble prend le relais de l’uppercut.

Un passeur de feu dans le paysage hip-hop français

Pour lui, l’art ne se cloisonne pas, la scène et l’écran se répondent. Ses albums se lisent comme des films. Ses rôles, comme des poèmes scandés. À vrai dire, cette hybridité le définit. Avec Rentre dans le Cercle, il propose une autre vision du rap. Le beat devient prétexte, la parole fin ultime. Bien que le format reste brut, la diversité s’y impose. Ce lieu devient agora. Fianso redonne souffle à une parole périphérique. En cela, il réhabilite une mémoire collective. Celle que la France officielle tait souvent.

Échos et empreintes : ce que laisse Fianso dans le paysage culturel

Les textes de Fianso sont autant de cartes sensibles. Chacune explore une faille, une fracture. À travers elles, la violence devient langage. Et le chaos, une esthétique. Ses mots tracent une topographie de l’intime et du social. Ils blessent, certes mais ils réparent aussi. À cet égard, son œuvre agit comme une mémoire. Elle fixe les stigmates. Puis elle les transcende. Aujourd’hui, Sofiane Zermani dépasse les cadres. Grâce à son parcours, la culture urbaine gagne en densité. Elle cesse d’être marginale. Désormais, elle devient centrale, consciente, incontournable. Alors que le rap français évolue, Fianso persiste. Il ne cherche pas à séduire. Plutôt, il cherche à dire. En tant qu’artiste, il produit, joue, relaie, structure.

Actuellement Fianso navigue entre plusieurs chantiers artistiques. Il joue dans Le Roi Soleil, second long-métrage très attendu de Vincent Maël Cardona, aux côtés de Pio Marmaï et Lucie Zhang — un casting incandescent pour une œuvre déjà prometteuse. Par ailleurs, il fait une apparition dans la série Nero, prochainement sur Netflix, confirmant son ancrage dans des formats narratifs variés. À l’horizon, trois longs-métrages sont en préparation, dont le tournage commencera à la fin de l’année pour une sortie prévue au printemps prochain. Enfin, au-delà du jeu, Fianso se projette aussi derrière la caméra : produire, réaliser, créer autrement. En parallèle, il est également à l’affiche du film Les Règles de l’art de Dominique Baumard, poursuivant une filmographie toujours plus dense et audacieuse.