23
Chloë Sevigny
Née le 18 novembre 1974 à Springfield, Massachusetts, Chloë Sevigny avance à contre-courant. Depuis les années 1990, elle explore des rôles extrêmes, sans jamais céder aux compromis. En 2024 comme en 2025, elle continue de conjuguer grâce subversive et instinct de création. Chaque choix prolonge un style, une vision, une voix intérieure.
Publié le 23 juin 2025. Modifié le 6 août 2025.
Les débuts de Chloë Sevigny
Elle débute dans Kids (1995), film coup de poing qui la révèle à la face du monde. Instantanément, Chloë Sevigny impose une silhouette singulière, à la fois juvénile et grave, vulnérable et tranchante. Face caméra, elle ne compose pas : elle existe. Déjà, son jeu trouble. Elle incarne sans pathos. Elle ne mime pas : elle suggère. Sa présence tient de la fissure – une faille à travers laquelle s’infiltre une émotion brute.
Rapidement, elle confirme son pouvoir dans Boys Don’t Cry (1999), film essentiel sur l’identité et la violence. Elle y campe Lana, amoureuse d’un homme trans dans une Amérique profonde, brutale, aveugle. Ce rôle lui vaut une nomination aux Oscars. Mais surtout, il confirme ce qui fera sa force : une capacité rare à épouser des personnages complexes sans les surligner. Elle habite l’écran sans jamais surjouer. Son jeu suscite l’émotion par l’économie. Chloë Sevigny ne cherche pas à plaire : elle cherche à dire. À faire entendre ce qui, trop souvent, est tu.
Une radicalité assumée
En 2003, elle tourne dans The Brown Bunny de Vincent Gallo. Le film provoque un tollé. Une scène de sexe explicite, non simulée, fait scandale. Pourtant, l’actrice assume pleinement son choix. Elle défend une vision du cinéma radicale, sensuelle, inconfortable. Un cinéma où l’image doit déranger, ou du moins troubler. Elle parle d’un geste artistique, d’une confiance donnée à un réalisateur, d’une expérience intime de l’abandon.
L’icône indépendante

Chloë Sevigny s’inscrit à contre-courant de l’industrie. Jamais là où on l’attend, elle privilégie les films indépendants, les projets audacieux, les esthétiques marginales. Elle devient l’icône d’un autre Hollywood – plus libre, plus risqué, moins brillant. Actrice, mais aussi réalisatrice et créatrice de mode, elle compose une trajectoire plurielle, exigeante, sincère. Aujourd’hui encore, son nom évoque une idée de cinéma vivant : sans compromis, sans fard, sans mode d’emploi. Un cinéma qui ose. Un cinéma qui trouble.
Télévision : l’autre versant d’un même regard
À partir de 2006, elle incarne Nicolette Grant dans Big Love. Le rôle la consacre à la télévision, lui offrant un Golden Globe. Elle explore ensuite d’autres séries exigeantes : Hit & Miss, American Horror Story, The Act, Poker Face, Feud, Monsters. À chaque fois, elle incarne des figures troubles, fracturées, humaines.
Elle passe à la réalisation en 2016. Son court-métrage Kitty est sélectionné à Cannes, à la Semaine de la Critique. Elle enchaîne avec White Echo, également présenté à Cannes en 2019. Son écriture visuelle s’affirme. Poétique, minimaliste, elle incarne une autre façon de raconter. Chaque plan semble sculpté dans le silence. Ses héroïnes évoluent dans un monde flottant, presque onirique. À travers ces œuvres, Chloë Sevigny prolonge son rapport sensible à l’image : un regard à la fois pudique et incandescent, qui saisit le mystère plutôt que de le résoudre.
Chloë Sevigny : l’art de rester insaisissable
En 2024, elle tourne Bonjour Tristesse dans une adaptation contemporaine signée Durga Chew-Bose. En 2025, elle joue dans Atropia et Magic Farm, deux films d’auteur. Ces choix confirment un cap : ne jamais cesser de chercher.
Mode : une muse éternellement contemporaine
Dès les années 1990, elle fascine les créateurs. Muse de Miu Miu, égérie pour Louis Vuitton, ambassadrice chez Opening Ceremony, elle impose un style sans artifice. Mélange de vintage, de couture et de désinvolture, son allure traverse les décennies sans se figer.
Et maintenant ?
Une présence magnétique, toujours en marge
Chloë Sevigny poursuit sa trajectoire libre. Elle ne répète jamais. Elle propose. Actrice rare, réalisatrice en devenir, icône sans calcul, elle continue de faire du hors-piste son territoire. À 50 ans, elle incarne une féminité frondeuse, curieuse et indémodable.
En 2024, Chloë Sevigny multiplie les rôles marquants. D’abord, elle incarne Anne dans Bonjour Tristesse, adaptation de Françoise Sagan réalisée par Durga Chew‑Bose, présentée à Toronto en septembre 2024. Elle figure en 2025 aussi dans le thriller After the Hunt de Luca Guadagnino, aux côtés de Julia Roberts, Andrew Garfield et Ayo Edebiri.
Son regard intense traverse ainsi chaque fiction sans jamais s’y dissoudre. Sélective sans être distante, elle habite ses personnages avec une précision presque tactile. Dans The Five-Star Weekend, série portée par Jennifer Garner et Gemma Chan, elle insuffle une gravité élégante, une étrangeté calme.
Toujours là où on ne l’attend pas, Chloë Sevigny poursuit également des projets personnels, entre écriture et production indépendante. Attachée à une certaine idée du cinéma d’auteur, elle soutient de jeunes réalisateurs, prête sa voix à des documentaires radicaux, collabore avec des artistes plasticiens. Sa carrière s’inscrit ainsi dans une forme de continuité organique, loin du star-system. Ce n’est pas la célébrité qu’elle recherche, mais l’expérience : celle du jeu, de la métamorphose, de la recherche. En cela, elle reste une figure rare, à la croisée des disciplines et des époques. Un visage que le cinéma n’a jamais vraiment su classer, mais qu’il n’a jamais cessé de convoquer.