Loewe : qui sont les nouveaux directeurs artistiques de la maison ?

Proenza Schouler, un pilier de la mode américaine

Loin semble le temps des designers à la tête de maison de mode durant plusieurs décennies. Y compris pour ceux qui en seraient les fondateurs. C’est le cas de Jack McCollough et Lazaro Hernandez, qui lançaient en 2002 leur marque Proenza Schouler (utilisant les noms de jeune fille de leur mère respective), et tout juste nommés à la direction artistique de Loewe.

Tous deux étudiants à la Parsons School of Design, le duo présentait alors sa première collection à l’occasion de leur remise de diplôme. Dans l’assemblée, une certaine Julie Gilhart. Elle s’éprend de leur travail et achète leurs pièces pour le grand magasin new-yorkais Barneys, dont elle était la directrice.

Des premiers pas dans le monde de la mode auréolés de succès, et loin d’impressionner les jeunes créateurs. À coup de silhouettes épurées, centrées sur une maîtrise de la coupe, une palette chromatique sobre et un style intemporel à l’épreuve des tendances, la marque américaine poursuit son ascension sur plus de vingt ans. Avec le duo fondateur toujours à la tête des collections, Proenza Schouler conserve son ADN, et séduit pour son image branchée et conceptuelle.

En témoignent les muses qui inspirent les créateurs au fil des années. De la charismatique Natasha Lyonne à l’artiste Olympia Scarry en passant par l’écrivaine Ottessa Moshfegh mais aussi, et surtout par la très rock Chloë Sevigny. Proche de la marque depuis ses débuts, elle inaugurait il y a deux ans le défilé automne-hiver 2023-2024, qui célébrait également les vingt ans de Proenza Schouler.

Mais, depuis, leurs défilés sont devenus de plus en plus minimalistes. Au point de n’accueillir qu’une petite centaine de personnes la saison dernière. Et de présenter leur collection en dehors du calendrier de la Fashion Week de New York, avant de figurer parmi les absents de celle de février. Une décision annonciatrice, puisque Jack McCollough et Lazaro Hernandez révélaient, le 31 janvier dernier, quitter la direction artistique de leur propre marque. À l’image récemment de Dries Van Noten, et peut-être en amont de Ralph Lauren ou Michael Kors…

Jack McCollough et Lazaro Hernandez chez Loewe, le début d’une nouvelle ère

Si les deux créateurs et fondateurs de Proenza Schouler restent actionnaires de l’entreprise et continueront de siéger au conseil d’administration, leur départ laisse songeur. “Notre vingtième anniversaire a été pour nous un moment de profonde réflexion.” avouent-ils dans le communiqué accompagnant l’annonce.

“Nous avons toujours valorisé la prise de risque et le sens de l’aventure et nous nous sentons prêts à nous ouvrir à ce qui nous attend.” Car, depuis vingt ans, Jack McCollough et Lazaro Hernandez se concentrent en effet uniquement sur leur marque.

Pilier de la mode américaine (le duo est récompensé à trois reprises du Prix du designer de l’année aux CFDA Womenswear en 2007, 2011 et 2013), celle-ci souffre néanmoins de son indépendance. N’appartenant à aucun grand groupe, elle vogue au gré des différents investisseurs (dont elle rachète même certaines part en 2018).

Et peine à s’imposer parmi les grandes maisons de mode, en particulier parisiennes. Malgré deux défilés dans la capitale française, Proenza Schouler reste une marque très appréciée par les aficionados de mode. Mais largement méconnue du grand public.

Un défi de taille pour Jack McCollough et Lazaro Hernandez

À peine âgés d’une quarantaine d’années, les créateurs américains espèrent ainsi, avec leur départ, ouvrir un nouveau chapitre. Non seulement pour leur marque grâce à l’arrivée d’un designer, et également pour eux, afin de s’illustrer avec une nouvelle vision et une nouvelle identité.

Prenant la suite de Jonathan Anderson dans les ateliers de Loewe, Jack McCollough et Lazaro Hernandez s’apprêtent à intégrer une entreprise au rythme soutenu. Il leur faudra produire six collections par an et composer avec les lignes de beauté et les nombreuses collaborations…

Mais surtout répondre aux injections de réussites fortes. En particulier dans une ère où les designers semblent ne plus avoir le droit à l’erreur (à l’image du départ de Daniel Lee chez Burberry). Et se doivent de devenir iconique, quoi qu’il en coûte. Surtout lorsqu’il s’agit de succéder à Jonathan Anderson, qui a fait de Loewe l’emblématique et ultra tendance maison de mode espagnole que l’on connaît aujourd’hui.

Nouveau chapitre pour la maison espagnole et pour les créateurs américains

Avec Proenza Schouler, les créateurs ont façonné l’une des marques les plus réputées aux États-Unis, malgré un marché déjà saturé. Continuer de faire briller Loewe ne semble donc pas une mission impossible. D’autant plus si l’on épluche leurs collections pré-pandémie. Plus colorées et playful, leurs créations dessinent un vestiaire sportswear très américain. Tout en injectant une bonne touche de modernité et d’élégance, proche de la mode européenne.

Coïncidence directe des difficultés rencontrées par la marque et de l’essoufflement créatif de ses fondateurs, Jack McCollough et Lazaro Hernandez se concentrent néanmoins depuis 2020 sur un style plus intemporel et épuré. Au travers notamment de silhouettes minimalistes et architecturales. En phase avec la mouvance du quiet luxury, sans céder aux autres tendances plus fantaisistes.

Leur arrivée à la tête des ateliers Loewe laisse ainsi espérer une nouvelle énergie créative. Peut-être plus libérée et inspirée du génie de leur prédécesseur, Jonathan Anderson. Dont ils devront absorber l’ADN, autant que les savoir-faire de la maison espagnole, tout en conservant leur propre touche… Un défi de taille, que tous les professionnels et passionnés du milieu observeront de très près.