Maison Margiela dévoile une collection sombre inspirée par le tango dans un film de Nick Knight
Pour la collection de prêt-à-porter printemps-été 2021 Maison Margiela, John Galliano s’associe une nouvelle fois au photographe Nick Knight et dévoile, dans un film de 45 minutes, un vestiaire sombre et théâtral inspiré par le tango.
Par Séraphine Bittard.
“Le tango est presque comme une rave, tenue dans des bâtiments délabrés sur le point de s’effondrer”. C’est dans un film de 45 minutes – dans le prolongement du projet S.W.A.L.K. initié pour la dernière collection Artisanal – que John Galliano décrypte sa collection de prêt-à-porter Maison Margiela printemps-été 2021. Une vision sombre, cathartique et théâtrale du tango, son inspiration principale, dans un opus réalisé par Nick Knight et découpé en sessions de design en FaceTime, cours de danse à l’atelier parisien et tragédie gothique au clair de lune sud-américain.
Couples fusionnels et silhouettes dramatiques en dichotomie de rouge et noir – parfois rehaussées d’un gris ou d’un blanc mélancoliques—, longues robes drapées à plumes et mary-janes en brocard, vestes chevaleresques, bretelles et bérets du siècle dernier… John Galliano opère ici son talent de conteur dans un vestiaire lugubre à l’imaginaire foisonnant emprunté à la danse. Mais si la collection convoque si bien l’ancien et le merveilleux dans une myriade de personnages grandiloquents, elle est aussi le fruit d’une réflexion technique approfondie tirée des méthodes haute couture de la collection Artisanal.
Les vestes formelles sont lacérées et imprégnées de froufrous qui jaillissent de l’intérieur, ou c’est leurs épaulettes qui se décrochent de leur structure, créant l’illusion d’une coupe 1910 – avec leurs grands cols ronds et leurs doubles croisures. Les robes en mousseline ou tulle sont plaquées au corps dans un effet mouillé – clin d’œil au drapé humide de la sculpture néoclassique –, ou agrémentées d’un imprimé de petits rectangles réalisés avec du ruban adhésif – un grand classique Margiela –, les hauts en dentelle sont fabriqués en patchwork et les jupes en satin sont coupées dans le biais. Le tout, créé sous le label Reclica, qui désigne le recyclage de pièces vintage authentiques, ou upcycling, déjà présent dans la dernière collection de prêt-à-porter. Quant à la mythique Tabi, elle se réinterprète ici en derbies transparentes, révélant des jambières lacées en mousseline de soie rouge — matière qui recouvre aussi les visages, préservant au cœur de cette épopée vestimentaire la signature historique du fondateur Martin Margiela : l’anonymat.