Iris van Herpen, Viktor & Rolf, Alexis Mabille, Rubert Wun… quand la haute couture se fait performance
Alors que la Fashion Week haute couture vient de tirer sa révérence, retour sur quatre défilés exceptionnels, d’Iris van Herpen à Viktor & Rolf en passant par Robert Wun et Alexis Mabille, où les mannequins se font acteurs de performances mode mémorables.
Par Camille Bois-Martin.
Des mannequins sculpture aux robes coutures surréalistes
De la même manière qu’un sculpteur taille sa pierre ou coule son plâtre, Iris van Herpen conçoit la couture comme une forme d’art, moulant un corps au gré de ses matières ou drapant ses robes directement sur les mannequins, semblables à des sculptures. Alors que la créatrice néerlandaise inaugurait à l’automne dernier une rétrospective sur ses seize ans de carrière au musée des Arts décoratifs de Paris, celle-ci présentait, cette semaine, une collection à la lisière de la mode et des arts.
Dans un entrepôt vide, ses dernières créations se retrouvent ainsi sur des cimaises, portées par des mannequins en lévitation au sein de cadres en ciment. Déambulant de murs en murs, les invités découvrent avec stupéfaction ces créatures oniriques qui se meuvent avec grâce, tournant la tête au gré des passages ou arquant leurs bras pour dévoiler un peu plus de leur tenue.
Une exploration de la haute couture qui se poursuit jusque chez Viktor & Rolf, qui présente quelques jours plus tard une collection aux coupes géométriques composant des silhouettes surréalistes. Sur une bande-son toute aussi abstraite (une voix prononce une série de syllabes aléatoires), les mannequins du défilé s’apparentent à nouveau à des sculptures, leurs corps se transformant aux gré de vestes, de robes ou de hauts cubiques, triangulaires ou sphériques.
Démarche lente, bande-son abstraite, accessoires théâtraux…
Des silhouettes atomisées, inspirées par l’avant-gardisme de la collection automne-hiver 1998, au sein de laquelle les créateurs de la maison puisent pour concevoir ces nouveaux looks sculpturaux – et un poil “absurdes”, pour reprendre les mots de leur note d’intention.
Autant de concepts qui se retrouvent également dans les créations du troisième défilé haute couture de Robert Wun. D’une démarche lente et gracieuse, les mannequins laissent apprécier tous les ornements de ces ensembles époustouflants aux mille et un détails.
Ici une ombrelle fixée sur le sommet de la tête, là une multitude de papillons en relief brodés sur un manteau, de délicates pétales sur le torse d’une robe, une immense fleurs recouvrant l’épaule et le haut du bras, un masque argenté façon squelette… sans oublier les capelines ou les traines XXL en strass ou en velours. Bref, une mise en scène et des tenues théâtrales qui laissent, comme en janvier, l’assemblée bouche-bée.
Dita Von Teese, Coco Rocha, Lily Cole… Des performances haute couture de haute volée
Dans le sillage de ces défilés surprenants, la présentation Alexis Mabille, organisée dans la pénombre du Théâtre Lido – dont le créateur signait également le décor –, réservait elle aussi son lot de surprises. Répartis dans les rangs de la salle de spectacle, les invités découvrait une collection jouant avec la lumière des matières, de la brillance du lamé au scintillement des paillettes en passant par l’éclat du satin… et inspirée par une bulle de champagne.
Un univers festif, marqué par un final en apothéose : un strip-tease de la danseuse Dita Von Teese. Perchée dans une coupe de champagne XXL, celle-ci entame alors un spectacle sulfureux, pour finir seins nus, seulement vêtue d’un string et d’un collier en diamants, et entièrement recouverte d’alcool.
La performance remarquée et repartagée en masse sur les réseaux sociaux – autant pour le spectacle en lui-même que pour la présence de la célèbre danseuse américaine – fait ainsi grimper la température du défilé Alexis Mabille autant que les compteurs de sa retombée médiatique.
Les défilés haute couture, entre mode et spectacle
Si la mode mise en effet depuis plusieurs années sur la présence de stars à ses premiers rangs pour s’assurer une couverture évènement, de nombreux créateurs les invitent également directement sur les podiums. Marie-Agnès Gillot chez Charles de Vilmorin, Daphné Bürki chez Jeanne Friot, Jennie chez Jacquemus, Isabella Rosselini chez Pucci, Noah Cyrus chez Avellano…
Ainsi les sculptures de la présentation haute couture d’Iris van Herpen déployaient-ils une ribambelle de célébrités ultra mode, de Coco Rocha à Lily Cole, jouant de leur aura et poussant la performance un cran plus loin.
De leur regard perçant, ces dernières fixent l’audience, les confrontant à leur propre présence et leur rôle d’observateurs, que la créatrice néerlandaise compare à un “processus de réalisation de soi”. Loin des simples présentations, les maisons redoublent ainsi d’inventivité et immergent, le temps de quelques dizaines de minutes, leurs invités dans des univers sur-mesure, où la mode et le spectacle ne font plus qu’un.