24 fév 2021

Bella Hadid, Dua Lipa : les icônes d’aujourd’hui s’invitent dans le premier livre d’Hugo Comte

À peine quatre ans après avoir entamé une carrière dans la photographie de mode, le jeune Français Hugo Comte constitue déjà sa propre archive visuelle dans un premier livre publié aux éditions Nikita Ltd. On y retrouve pêle-mêle, ses clichés les plus forts réalisés pour lui ou pour de grands magazines, mettant en scène les icônes de notre époque, de Bella Hadid à Kendall Jenner en passant par Irina Shayk et Dua Lipa, dans les ambiances froides et les décors épurés qui évoquent distinctement l’esprit des années 90.

Propos recueillis par Matthieu Jacquet.

Si Hugo Comte était une décennie, il serait sans conteste les années 90. De cette période durant laquelle il a grandi, le photographe français semble avoir gardé un amour pour la mode de l’époque, pour ses créateurs et ses magazines où la transversalité entre les arts faisait légion et pour ses projets où musique, cinéma et design s’entrecroisaient dans des démarches aussi libres qu’audacieuses. Entamée il y a à peine quatre ans, sa pratique photographique se fait l’écho esthétique de cet âge d’or de la création, du bleu acier et au blanc froid de ses clichés réchauffés par les teintes des corps et visages juvéniles qu’il capture, de l’épurement de ses décors et mises en scène jusqu’à son grain d’image unique et ses cadrages rapprochés. Les influences d’un Steven Meisel, d’un Craig McDean, d’un Mario Sorrenti ou parfois même d’un Miles Aldridge s’y font sentir, pendant que les cols roulés blancs moulants et jeans taille basse, les débardeurs en maille côtelée et crop-tops portés par les modèles jusqu’à leurs coiffures rappellent à leur tour l’ère qui le fascine tant. Tout cet héritage, toutefois, l’artiste sait se le réapproprier en maintenant un équilibre maîtrisé entre nostalgie assumée et regard tourné vers l’avenir.

 

En seulement quelques années, sa patte visuelle instantanément reconnaissable permet à Hugo Comte de s’imposer comme nouvelle figure de la photographie de mode, travaillant pour des magazines aussi pointus et reconnus que 032c, Carcy Magazine ou encore Vogue Italia. Fort de ces multiples expériences et d’une iconographie florissante, l’architecte de formation compose récemment sa première archive de clichés dans un livre publié aux éditions Nikita Ltd., qu’il décrit lui-même comme “un manifeste de style et de design définissant une période de ma carrière”. Un objet blanc imaginé en collaboration avec le directeur artistique David McKelvey où les images et les mannequins – uniquement féminines – envahissent les pages, de sorte que nul ne se soustrait à leurs regards et leurs postures souvent frontales, tandis que les nombreux code-barres de tailles diverses déroulent au fil des pages un vocabulaire cryptique. Ici, le top-model Irina Shayk fixe l’extérieur à travers les persiennes d’un store, là, Kendall Jenner s’étend sur la pelouse d’un jardin coquet, tandis qu’entre deux pages apparaît la pop star Dua Lipa, dos à la pleine lune et au volant d’une voiture à la fois futuriste et rétro illustrant son album Future Nostalgia, dont Hugo Comte avait réalisé l’intégralité de la direction visuelle – une création taillée pour son regard traversant les époques. Pour Numéro, le photographe revient en quelques points sur sa première publication.

 

 

Numéro : Vous avez commencé officiellement la photographie en 2017, il y a quatre ans. En quoi vous êtes-vous senti prêt à publier votre premier livre ?

Hugo Comte : Récemment, j’ai commencé à explorer différents médiums comme la musique, les films, l’architecture et le design, et ces projets m’ont amené à me replonger dans les trois dernières années de ma carrière photographique. Avoir cette nouvelle perspective m’a permis de voir dans mon travail une identité et un message uniques, que j’ai voulu partager à travers un seul et même support. D’ailleurs, j’ai toujours voulu donner un impact plus physique et matériel à mes images. Avec ce livre, j’ai voulu créer un objet qui symboliserait donc mes trois premières années de travail dans la photographie – car j’ai vraiment senti que c’est à partir de là que l’on a commencé à créer une sorte d’identité autour de moi, et je voulais que le livre soit au croisement de ces idées.

 

 

 

“Pour moi, ce que les images des années 90 expriment le plus, c’est l’énergie.”

 

 

L’influence des années 90 et de leur esthétique visuelle est très assumée dans votre travail. Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans cette période, et pourquoi éprouvez-vous une telle affection à son égard ?

Selon les époques, les images parlent davantage de style, d’autres plutôt de concepts… Pour moi, ce que les images des années 90 expriment le plus, c’est l’énergie : une énergie humaine aussi vitale pour moi qu’elle l’était, j’en suis sûr, pour les personnes évoluant dans ce milieu et ces cultures à l’époque.

Il y a de nombreuses suites de chiffres et code-barres dans votre livre. D’où cette idée vous est-elle venue ?

Le code-barres était dès le départ une manière de donner une dimension physique à mon travail numérique. Je l’utilise comme un objet indépendant qui s’anime plutôt qu’un petit outil. Dans le livre, il apparaît souvent à grande échelle et y devient un véritable leitmotiv : on le voit sur la couverture, sur la tranche, on le retrouve en grand dans de nombreuses pages et il détermine aussi les numéros de pages. Ce symbole imprononçable, qui possède son propre langage, devient un symbole au même titre que le “Love symbol” de Prince.

 

 

“Le code-barres était dès le départ une manière de donner une dimension physique à mon travail numérique.”

 

 

Vous avez photographié beaucoup plus de femmes que d’hommes pour l’instant. Pensez-vous que votre regard sur les hommes serait différent ?

Pour pouvoir tout photographier de la meilleure manière possible, on a besoin d’un regard très personnel. Je dirais que la vision des femmes que je tente d’exprimer est très définie.

 

 

De quels nouveaux projets pouvez-vous déjà nous parler ?

Il y a un projet très excitant que je révèlerai dans quelques mois. Nous travaillons actuellement dessus avec [le styliste et nouveau rédacteur en chef du magazine Dazed] Ibrahim Kamara, mais je ne peux pas en dire plus…

 

 

Hugo Comte (2021), publié aux éditions Nikita Ltd.