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Numéro
10 Paris Photo, jeunes photographes, David Uzochukwu, Fryd Frydendhal

Paris Photo : 5 jeunes photographes à découvrir absolument

PHOTOGRAPHIE

Ce jeudi 10 novembre, la foire Paris Photo ouvre ses portes au public pour dévoiler sa 25e édition, tenue jusqu'au dimanche 13 novembre prochain. L'occasion de découvrir dans l'enceinte du Grand Palais Ephémère les propositions de 183 galeries spécialisées dans la photographie, entre chefs-d'œuvre historiques et innovations contemporaines. De David Uzochukwu à Fryd Frydendhal, focus sur cinq jeunes talents de ce domaine repérés au sein de cette vaste proposition.

  • David Uzochukwu, “Hollow Burn” (2021), série “In The Wake”.

    David Uzochukwu, “Hollow Burn” (2021), série “In The Wake”. David Uzochukwu, “Hollow Burn” (2021), série “In The Wake”.
  • David Uzochukwu, “Burrow” (2022), série “Sunflood”.

    David Uzochukwu, “Burrow” (2022), série “Sunflood”. David Uzochukwu, “Burrow” (2022), série “Sunflood”.
  • David Uzochukwu, “Stake out” (2019), série “Drown In My Magic”.

    David Uzochukwu, “Stake out” (2019), série “Drown In My Magic”. David Uzochukwu, “Stake out” (2019), série “Drown In My Magic”.
  • David Uzochukwu, “Styx” (2020), série “Drown In My Magic”.

    David Uzochukwu, “Styx” (2020), série “Drown In My Magic”. David Uzochukwu, “Styx” (2020), série “Drown In My Magic”.

Courtesy of the artist and Galerie Number 8.

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1. David Uzochukwu

 

 

Photographe précoce, David Uzochukwu a commencé sa carrière dès l’adolescence avec des autoportraits saisissants, à la fois sensuels et oniriques, qui lui ont rapidement apporté une certaine notoriété et l'ont même amené à tirer le portrait de la chanteuse britannique FKA twigs à plusieurs reprises. Baignées de tonalités chaleureuses et telluriques, les clichés de cet artiste austro-nigérian basé à Berlin mettent en scène le rapport viscéral entre l’être humain et la nature et plus particulièrement la place du corps noir dans ces environnements, des déserts arides aux étendues d’eau en passant par les ciels nuageux. Si la galerie Number 8 en montre plusieurs exemples à Paris Photo, à l’instar de ces tableaux presque picturaux mettant en scène des corps nus dans l’immensité du paysage à la manière des grands maîtres du mouvement romantique, ou encore les images plus intimes de deux jeunes hommes s’enlaçant avec sensualité, elle dévoile aussi des tirages d’une série plus récente intitulée Sunflood, encore en cours. Réalisé entre l’Allemagne et l’Espagne, ce projet déploie en images l’idée d’une potentielle apocalypse, entre inondation complète et brûlure solaire de notre planète, au cours de laquelle les corps finiraient par fusionner avec leur environnement. D’un homme nu flottant dans les airs au propre visage du jeune artiste cristallisé dans le sable, ces clichés à la frontière du réel mettent en scène des questionnements existentiels : le jour où la nature reprendra le dessus sur notre espèce, qui seront les véritables gagnants de ce bouleversement ?

 

 

Stand de la galerie Number 8, secteur Curiosa, SC8.

Fryd Frydendahl, “Shoumo” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1. Fryd Frydendahl, “Shoumo” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1.
Fryd Frydendahl, “Shoumo” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1.
Fryd Frydendahl, “Naughty by Nature” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1. Fryd Frydendahl, “Naughty by Nature” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1.
Fryd Frydendahl, “Naughty by Nature” (2021), série “Oddly Satisfying”. Courtesy the artist and V1.

2. Fryd Frydendahl

 

 

Révélée il y a cinq ans par sa série Nephews, dans laquelle elle capture avec tendresse les deux jeunes fils de sa sœur tragiquement disparue, Fryd Frydendahl s’est immédiatement distinguée par ses prises de vue intimes aux tonalités douces voire sucrées, dont attesteront par la suite ses nombreux portraits d'individus de tous âges. Réalisée en 2021, la série Oddly Satisfying présentée sur la foire par la photographe danoise, qui a travaillé à de nombreuses reprises avec la chanteuse MØ, change de thématique tout en conservant des principes esthétiques avec des clichés séduisants et presque sensoriels. Entre pastille de Mentos faisant jaillir le contenu d'une bouteille de Coca Cola, jeune fille décollant délicatement un faux-cil de sa paupière, index se plongeant dans la pulpe juteuse d’une pastèque ou encore bonbon rose écrasé pour être réduit en poudre… Au fil de plusieurs dizaines d'images, dont une douzaine est présentée sur le stand de la galerie V1, l’artiste capture ces moments qui, s’ils peuvent sembler banals, éveillent spontanément chez l'individu des sensations visuelles, tactiles voire gustatives étrangement satisfaisantes. Photographiées en gros plan, ces scènes imprimées sur papier photo puis encadrées et placées sous un verre semi-dépoli émergent du flou de cette paroi au cœur de la silhouette caractéristique d’un smartphone. Une manière d’interroger notre rapport numérique aux images, qui se trouvent désormais à la portée de nos doigts.

 

 

Stand de la galerie V1, B28.

Tommy Kha, “Exchange Place (VI)”, Midtown Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza. Tommy Kha, “Exchange Place (VI)”, Midtown Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza.
Tommy Kha, “Exchange Place (VI)”, Midtown Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza.
Tommy Kha, “Constellations (18), Whitehaven Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza. Tommy Kha, “Constellations (18), Whitehaven Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza.
Tommy Kha, “Constellations (18), Whitehaven Memphis (2019). Courtesy the artist and Vasli Souza.

3. Tommy Kha 

 

Le sujet principal des photographies de Tommy Kha est sa propre image, qu’il dédouble, troue et déforme au fil de ses nombreux autoportraits. Jusque-là, la pratique de l'artiste sino-américain pourrait sembler somme toute assez commune. Mais si les nombreux outils offerts par le numérique pourraient lui permettre aujourd'hui de réaliser aisément ces actions sur son corps et son visage, l’artiste basé à Memphis a opté pour un parti pris original et joyeusement obsolète : celui d'employer exclusivement des procédés matériels et physiques pour créer ces transformations, afin de les rendre parfois très visibles dans ses œuvres plutôt que leur préférer l'illusion d'une certaine crédibilité. C’est ainsi que l’on découvre dans le secteur Curiosa plusieurs déclinaisons de son corps imprimé à échelle humaine sur un carton – dans lequel il a parfois découpé l'intérieur de son visage – avant de le photographier aux côtés d’un potentiel amant ou de sa propre mère. Sur d'autres images, l'artiste a repris ce procédé en décuplant ses propres mains sur des cartons qui s'érigent verticalement sur un paysage rocheux, a décomposé et recomposé son autoportrait sur un puzzle, ou encore doublé ses yeux grâce à l’application sur ses joues de tatouages temporaires à leur effigie. Depuis 2016, l'artiste continue de déployer cette véritable mise en abîme de l’image, brouillant non sans humour les frontières entre le réel et le factice pour tenter finalement de percer les mystères de sa propre identité.

 


Stand de la galerie Vasli Souza, secteur Curiosa, SC15.

Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #15” (2021). Courtesy the artist and Lume. Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #15” (2021). Courtesy the artist and Lume.
Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #15” (2021). Courtesy the artist and Lume.
Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #7” (2021). Courtesy the artist and Lume. Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #7” (2021). Courtesy the artist and Lume.
Mame-Diarra Niang, “Morphologie du reve #7” (2021). Courtesy the artist and Lume.

4. Mame-Diarra Niang

 

 

Certains connaissent peut-être déjà Mame-Diarra Niang pour ses clichés d’un Dakar en ruines et dépeuplé, dont certains quartiers périphériques accueillirent de nombreux projets de construction depuis avortés. Ces paysages saisissants, imprégnés par le rapport de la photographe française à son histoire familiale et notamment le deuil de son père sénégalais, traduisaient déjà sa fascination pour les traces de l’histoire et son effacement progressif avec le passage du temps. A Paris Photo, l’artiste née à Lyon en 1982 explore cette thématique d'une toute autre manière à travers sa série Sama Guent Guii réalisée l’an passé, qui fait apparaître sur la pellicule les fantômes humains du passé et du présent. A l’argentique, Mame-Diarra Niang a tiré le portrait de dizaines de personnes afro-descendantes, jouant sur la mise au point pour faire disparaître leurs traits dans le flou provoqué par l'objectif, sans ajouter aucune retouche par la suite. En résultent des images presques picturales contrastées par des touches de couleurs et de lumières aux contours brumeux, qui anonymisent complètement les modèles photographiés et ouvrent librement à leur appréhension en les rendant inidentifiables. Une façon de prendre le contrepied des codes du portrait, et notamment de ses utilisations à des fins sociologique, ethnographique ou anthropologique pour ces populations encore très stigmatisées en Europe, empêchant par ces simples paramètres de prises de vue de poser sur leurs visages et leurs corps des préjugés découlant d'un discours dominant et parfois très formaté.

 

Stand de la galerie Lume, F09. 

Sabrina Ratté, “Machines for Living. Montigny” (2017). Courtesy the artist and galerie Charlot. Sabrina Ratté, “Machines for Living. Montigny” (2017). Courtesy the artist and galerie Charlot.
Sabrina Ratté, “Machines for Living. Montigny” (2017). Courtesy the artist and galerie Charlot.
Sabrina Ratté, “Radiances V” (2018). Courtesy the artist and galerie Charlot. Sabrina Ratté, “Radiances V” (2018). Courtesy the artist and galerie Charlot.
Sabrina Ratté, “Radiances V” (2018). Courtesy the artist and galerie Charlot.

5. Sabrina Ratté 

 

 

Jusqu’à il y a encore quelques jours, les visiteurs de la Gaîté Lyrique pouvaient se livrer à une véritable expérience immersive en parcourant l’exposition personnelle de Sabrina Ratté déployée au cœur de l’établissement parisien. Sculptures, dispositifs photographiques lumineux, vidéos d’animation de paysages mouvants en 3D ou encore réalité virtuelle… L’artiste française offrait autant de manière de se plonger dans son imaginaire hallucinatoire, où le réel se déforme et se reforme sous les yeux du public pour faire émerger les fondements d’une nouvelle dimension, dont la nature et l'architecture se libèrent joyeusement des contraintes du rationnel. A l’échelle de son stand, la galerie Charlot présente un échantillon de ce travail pluridisciplinaire dont la pratique de la vidéo forme le point d’ancrage. Entre ses films d’animation en 3D où des bâtiments brutalistes revêtent des couleurs pastels et fondent leurs structures dans des coulures liquides, ou ses captures d’écran déployant de façon presque picturale des fresques surréelles d’espèces florales en voie d’extinction, l’univers de la Québécoise invite le spectateur à opérer un pas de côté et à retrouver sa capacité d'émerveillement, notamment face à ceux qui craignent et alertent sur une invasion du réel par le monde virtuel, à l'heure où notre environnement physique se trouve déjà en véritable danger. Sur le stand de la galerie, on aperçoit d’ailleurs une maquette noire de l’une de ses installations architecturales, invitant à se laisser porter dans cette odyssée spatiale, optique et organique.

 

Stand de la galerie Charlot, secteur Curiosa, SC3.

 

 

 

Paris Photo, du 10 au 13 novembre 2022 au Grand Palais Éphémère, Paris 7e.