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29 “Un truc rincé qu’on a déjà vu 1000 fois ne nous intéresse pas !” Rencontre avec Mosaert, le label créatif de Stromae

“Un truc rincé qu’on a déjà vu 1000 fois ne nous intéresse pas !” Rencontre avec Mosaert, le label créatif de Stromae

MODE

Deux ans après avoir transformé Le Bon Marché en usine de conte de fée digne de “Charlie et la Chocolaterie” l’équipe du label belge Mosaert – Luc Junior Tam, Coralie Barbier et Paul Van Haver alias Stromae – repense entièrement son identité visuelle avec sa nouvelle collection capsule. Rencontre.

“Un truc rincé qu’on a déjà vu 1000 fois ne nous intéresse pas !” Rencontre avec Mosaert, le label créatif de Stromae “Un truc rincé qu’on a déjà vu 1000 fois ne nous intéresse pas !” Rencontre avec Mosaert, le label créatif de Stromae

Le label Mosaert fondé en 2009 par Stromae (dont il est l’anagramme) produit aussi bien de la musique que des vidéos et du prêt-à-porter. À l’époque, la styliste Coralie Barbier, compagne du chanteur, n’a pour objectif que de concevoir des vêtements de scène. Mais en 2013, lorsque le deuxième album de Stromae Racine Carrée cartonne et s’écoule à plus de 2,5 millions d’exemplaires, le label décide de lancer sa ligne de prêt-à-porter.

 

Mosaert est une histoire de famille. Le directeur créatif Luc Junior Tam est le frère du chanteur et travaille étroitement avec le duo de graphistes Boldatwork. Paul Van Haver quant à lui, décline à loisir l’univers explosif et multicolore de son personnage de Stromae : des pièces unisexe aux couleurs vives produites en Europe, inspirées du wax africain, et des combinaisons de motifs. L’inspiration principale du trio : des jeux d’optique et des effets de relief popularisés par l’artiste néerlandais Maurits Cornelis Escher (1898-1972). En mai 2018, le label présente sa “Capsule n°5” dans l’enceinte du Bon Marché, transformé pour l’occasion en manufacture merveilleuse, détournant les Escalator noir et blanc du grand magasin en chaîne de montage gigantesque. À côté d’une collection de vêtements aux motifs Art déco et Art nouveau rappelant l’architecture de Bruxelles, le trio s’emballe et appose ses imprimés ludiques et colorés sur toute une série d’objets : linge de maison, papier peint, fauteuils, confitures, carnets, tote bags, jus de fruits… De retour cette année, Mosaert présente une nouvelle collection capsule – plus sobre qu’à l’accoutumée – et repense également son univers visuel dont son logo: un petit nuage tricolore enfantin. Rencontre avec Luc Junior Tam, Coralie Barbier et Paul Van Haver.

Luc Junior Tam, Paul Van Haver et Coralie Barbier. Luc Junior Tam, Paul Van Haver et Coralie Barbier.
Luc Junior Tam, Paul Van Haver et Coralie Barbier.

Numéro: En vous attaquant au domaine du prêt-à-porter, comment avez-vous pensé le vêtement pour qu’il ne soit pas un simple déguisement de Stromae pour Halloween ?

 

Luc Junior Tam: Nous avons toujours cherché à construire notre collection autour de la musique sans tomber pour autant dans le “merchandising”. Au Bon Marché, nous avons fait une exception, cette fois-ci, la musique servait cette fois le vêtement et pas l’inverse.

 

Stromae: Avec cette nouvelle collection nous avons cherché à parler de Mosaert de façon plus poétique. Nous avons aussi remanié le logo, la police de caractère et le site.

 

Coralie Barbier: Elle se détache de ce que nous faisions avant. Les motifs de notre toute première capsule étaient intégralement liés à l’univers de l’album Racine Carrée. Des vêtements très floraux, très colorés, très chargés. Progressivement, nous avons cherché à démocratiser le produit tout en nous détachant de l’image de Paul, justement pour que les gens ne se sentent pas déguisés et puissent s’approprier les pièces. Comment ? En rompant avec le total look emblématique de Stromae dans nos campagnes de pub par exemple. Désormais, les pièces sont plus sobres et les teintes unies.

 

 

Avec cette collection plus sobre, ne cherchez-vous pas à récupérer un nouveau public ?

 

Stromae: Vous savez, être mainstream et atteindre le plus de gens possible est quelque chose de très noble. Et cela s’applique aussi aux vêtements. Toucher des hommes, des femmes, des très jeunes comme des très vieux, c’est notre fantasme.

 

Coralie Barbier: Cette collection est entièrement écoresponsable, une contrainte qui nous a aussi permis de nous canaliser dans le choix des matières et des tissus. Les matières sont devenues de véritable supports créatifs. Le motif du velours côtelé se suffit à lui même par exemple.

 

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Votre quatrième collection capsule était une collaboration avec le label français Repetto dont vous avez repensé l’univers. Envisagez-vous de nouvelles collaborations comme celle-ci ?

 

Stromae: Une collaboration est prévue mais vous vous doutez bien que c’est totalement confidentiel…

 

Luc Junior Tam: Pour le reste, une collaboration par principe ne nous intéresse pas. Ce que nous recherchons avant tout, c’est la singularité. Lorsque nous n’avons rien de pertinent à dire, nous ne disons rien. Un truc rincé qu’on a déjà vu mille fois ne nous intéresse pas. [rires]

 

Stromae: Nous avons toujours cherché la simplicité. C’est ce qui nous fascine, c’est ce qui est le plus jouissif: quand ça a l’air facile mais que la mise en œuvre, elle, est complexe.

 

Coralie Barbier: Contrairement à ce que vous pouvez penser, nous n’avons pas toujours confiance en nous. Revenir à quelque chose de simple nous permet aussi de nous rassurer.

 

Luc Junior Tam: Nous nous considérons davantage comme des artisans que comme des artistes qui créent au gré de leurs fantaisies.

 

En 2013, vous avez tourné une vidéo piège dans laquelle Paul déambule ivre mort dans les rues de Bruxelles. C’était en fait le clip du titre Formidable, mais tout le monde est tombé dans le panneau. Pourquoi n’avez vous pas tiré les mêmes ficelles avec la ligne de prêt-à-porter Mosaert ?

 

Stromae: On nous a souvent collé cette étiquette de “maestros du buzz”… mais ce type de communication n’est pas si facile à maîtriser !

 

Luc Junior Tam: Et puis cette culture du buzz était directement liée au personnage de Stromae. Elle était pertinente. Pour le clip de Formidable, nous souhaitions surprendre tout ceux qui s’attendaient à un clip triste. Souvent c’est une fille qui chouine seule dans son bain… Mais je reste persuadé que faire du buzz pour faire du buzz est une très mauvaise idée. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne le fera jamais…

 

 

Dans une interview précédente, vous évoquiez l’importance pour vous de pouvoir vous extraire de vos projets quand bon vous semble. Vous sentez-vous facilement prisonnier ?

 

Stromae: Par moments, on n’a plus grand chose à dire. Et dans ces cas là, il n’est pas très judicieux de prendre la parole. Le “projet Stromae”, [Paul Van Haver fait toujours référence à son équipe en employant le terme de “projet Stromae”] a suscité une telle effervescence que j’avais vraiment besoin de m’en extraire par moment. Je le porte toujours sur mes épaules. Mais ça fait du bien de pouvoir s’exprimer d’une autre façon. Avec cette collection de prêt-à-porter par exemple.

 

Luc Junior Tam: S’extraire du personnage Stromae c’est aussi produire pour d’autres artistes. Ce que Paul ne dit pas, c’est qu’il n’a jamais cessé de composer. Parfois, il n’a pas envie d’être sous le feu des projecteurs, parfois, ce n’est pas le moment. Pour des raisons privées ou artistiques d’ailleurs.

 

 

La nouvelle collection capsule de Mosaert est disponible.

 

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