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Numéro
14 Bastien Bouillon, La Nuit du 12, Interview, La fête du court-métrage 2023, Juliette Armanet

Rencontre avec Bastien Bouillon, acteur césarisé de La Nuit du 12 et parrain de La Fête du court-métrage

Cinéma

De son rôle de flic sensible et tourmenté dans le film La Nuit du 12, à celui d’écrivain émotif dans le court-métrage Partir un jour, Bastien Bouillon impressionne. Alors qu'il est parrain de l’édition 2023 de la fête du court-métrage qui démarre ce mercredi 15 mars dans toute la France, on a rencontré l'acteur tout juste césarisé.

La bande-annonce du court-métrage Partir un jour (2021) d'Amélie Bonnin

Un jeudi matin, sur les coups de 11h, une silhouette longiligne aux cheveux ébouriffés pousse la porte d’un café dans le 18e arrondissement de Paris. L’homme salue le patron du bar avant de se présenter à nous avec un grand sourire, humblement vêtu d’un sweat imprimé du label du rappeur Jul (D’or et de platine). Son nom ne vous dit peut-être rien mais vous avez sûrement déjà croisé le visage de Bastien Bouillon sur grand ou petit écran. Depuis plus de 15 ans, il se fait remarquer pour ses apparitions dans des séries (R.I.S Police ScientifiqueDétectives ou encore Oussekine), dans des courts-métrages (Jeudi 19Le Locataire) mais aussi plus récemment dans des films salués par la critique (2 automnes 3 hiversSeules les bêtes, Le Mystère Henri Pick). Depuis la cérémonie des César du 24 février dernier, le nom de Bastien Bouillon semble avoir pris une toute autre dimension. Nommé dans la catégorie de meilleur espoir masculin aux côtés de (très) jeunes acteurs comme Paul Kircher (pour son rôle remarqué dans le film Le Lycéen) ou encore Aliocha Reinert (Petite Nature de Samuel Theis), c’est l’acteur originaire de Châteauroux et âgé de 37 ans qui remportera la statuette pour son rôle dans La Nuit du 12. Dans le thriller haletant de Dominik Moll, actuellement en salle, Bastien Bouillon se plonge avec une justesse déconcertante dans la peau d'un jeune commissaire de police tourmenté par une sombre affaire judiciaire. Le film est d'ailleurs devenu un phénomène, remportant plusieurs Césars dont celui du meilleur film de l’année 2022.

 

La reconnaissance sur le tard de Bastien Bouillon avec La Nuit du 12 et son César du meilleur espoir masculin

 

Ce César marque une reconnaissance tardive pour celui qui suivait les classes libres du prestigieux cours Florent en 2007 et qui faisait ses premières apparition à la télévision il y a déjà quinze ans de cela. “J’ai commencé par la télévision car j’avais un agent qui avait des contacts là-dedans à cette époque. J’ai fait de la figuration, des petits rôles dans des court-métrages puis des rôles dans des films. Mais La Nuit du 12 est finalement mon véritable premier grand rôle au cinéma” souligne-t-il. Cette année, Bastien Bouillon est aussi le parrain de La Fête du court-métrage qui se tiendra dans les salles de cinéma de l’hexagone du 15 au 23 mars 2023. Au programme, près de 17 000 projections dans plus de 4 200 communes de France et 66 pays à l’étranger. “Être parrain de La fête du court-métrage, c’est une manière de soutenir l’événement et de le mettre en lumière à mon petit niveau. C’est aussi un domaine dans lequel je me sens assez légitime car j’en ai quasiment autant tourné que des longs. Je suis aussi passé de l’autre côté de la caméra pour la réalisation d’un court-métrage, Moha en 2020, ” confie Bastien Bouillon.

Bastien Bouillon et Bouli Lanners dans le film La Nuit du 12 (2022) © Copyright Haut et Court Bastien Bouillon et Bouli Lanners dans le film La Nuit du 12 (2022) © Copyright Haut et Court
Bastien Bouillon et Bouli Lanners dans le film La Nuit du 12 (2022) © Copyright Haut et Court

Un court-métrage avec Juliette Armanet

 

Lors de la cérémonie des César du 24 février 2023, le petit film Partir un jour de la réalisatrice Amélie Bonnin – dans lequel Bastien Bouillon est l'acteur principal – recevait aussi le prix du meilleur court-métrage de fiction. Aux côtés de l’incandescente Juliette Armanet, dans le rôle d'une caissière, il interprète le rôle d’un jeune écrivain, couronné d’un succès récent, qui rend visite à ses parents en Bretagne. Piquant, drôle et loufoque - les deux compères reprennent notamment le tube de l’année 1999, Tu m’oublieras de Larusso -, ce film d’une vingtaine de minutes explore le sentiment universel de “nouveau départ” dans sa dimension la plus large. Le nouveau départ suite à la fuite d’un microcosme familial à l’adolescence mais aussi celui d’un nouveau départ en tant que parent (les deux acteurs sont sur le point d'avoir un enfant, chacun de leurs côtés, dans le court-métrage). Ces grands moments de vie, Bastien Bouillon les a aussi éprouvés à l’adolescence (la vraie, pas celle des films). Il explique : “Mes voyages ont été mes grands départs. À 19 ans, je suis parti au sud du Sénégal par la terre. En stop, en car, en pirogue. J’y allais avec un but, faire du woofing (travail bénévole sur un terrain agricole en échange du gîte et du couvert, ndlr), sauf qu’il y a presque vingt ans, le concept était encore très peu développé en Afrique. Ce voyage m’a beaucoup marqué. Plus tard, lors de mon deuxième voyage, je n’avais pas de but spécial, à part d’aller au Japon pour rencontrer un maître Butō, une danse japonaise. Je voulais juste voir et voyager. Il n’y avait pas de but spirituel. Peut-être que j’étais simplement doux et romantique, que je voulais me chercher ou me trouver en voyageant. Mais c’était un peu bancal. C’est peut-être une fuite aussi, je ne sais pas. Mais c’est toujours plus dur lorsqu’on revient." 

Portrait de Bastien Bouillon © DR Portrait de Bastien Bouillon © DR
Portrait de Bastien Bouillon © DR

Un film avec Gérard Depardieu prévu pour 2023

 

Aujourd’hui, Bastien Bouillon est père de trois enfants. Ses fantasmes de jeunesse sont derrière lui, mais il ne semble pas avoir perdu le goût du rêve : “Enfant, c’est l’expression écrite que je préférais et dont je rêvais. J’écris encore de la poésie et maintenant je commence à écrire le scénario d’un nouveau court-métrage. Je ne sais pas si j’écrirais un roman un jour. Mais il n’est jamais trop tard." À propos de son avenir en tant qu’acteur, celui qui incarne sensiblement le commissaire Yohan Vivès dans le long-métrage La Nuit du 12 avoue : “Je ne suis pas snob. Je n'ai rien contre la télé. J’aimerais bien continuer à en faire. Je trouve ça bien de ne pas faire que des films à 4 millions d’euros qui s’adressent au même public, sinon les gens finissent par se lasser. En se diversifiant, on peut continuer à trouver de la saveur et de l’exigence dans son jeu.” En attendant de le revoir sur petit écran, Bastien Bouillon jouera aux côtés du monstre sacré Gérard Depardieu dans Umami, un film de Slony Sow qui sortira en salle le 17 mai 2023. “Ça fait des années que je voulais tourner avec Gérard Depardieu, j’en parlais souvent à mon agent. Ça s’est finalement présenté et je joue le rôle de son fils. Cela a vraiment été la raison de mon élan vers ce film. Il est encore très généreux sur le plateau, c’est quelqu’un qui regarde et qui écoute ceux qui jouent avec lui. On est nés au même endroit (à Châteauroux) mais ce n’est pas pour autant que j’ai essayé de faire copain-copain avec lui (rires)."

 

Le fabuleux destin de Bastien Bouillon, neveu de Joséphine Baker

 

Ses succès récents auraient pu monter à la tête à Bastien Bouillon, mais rien n’y fait. Le trentenaire au visage enfantin et au timbre de voix si singulier reste imperturbable. Son arbre généalogique, lui aussi, aurait pu impressionner. Peuplé d’artistes (son père, Gilles Bouillon est metteur en scène de théâtre) mais aussi de (très) grands noms du siècle passé. L'acteur est en effet l’arrière petit neveu de la chanteuse et résistante Joséphine Baker. Au sujet de cette parenté lointaine, l’acteur français nous répond sobrement : “Je ne pense pas que cela ait eu une influence dans ma vie. À part peut-être quelque chose d’intime. Lorsque je vois un documentaire ou que je lis une BD sur Joséphine, je me dis : "C’est marrant qu’elle ait été présente à la naissance de mon père ou à celle de ma tante, que mon grand-père (chez qui j’ai rangé mon César d’ailleurs) ait été son assistant et son neveu." C’est un personnage que j’aime. Elle a eu une carrière politique et artistique très courageuse donc c’est plutôt admirable. J’ai de la fierté mais qui relève un peu de l’illégitime car je ne l'ai hélas pas connue."

 

La Nuit du 12 (2022) de Dominik Moll, en salle. Partir un jour (2023) d'Amélie Bonnin, disponible sur arte.com. La Fête du court-métrage du 15 au 21 mars 2023 partout en France.