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17 7 expositions à découvrir à travers la France pendant les fêtes

7 expositions à découvrir à travers la France pendant les fêtes

Art

En ce mois de décembre, les lieux culturels des quatre coins de la France regorgent de belles expositions. Fidèle à leur mission de soutien à la scène artistique actuelle, les centres d’art et les FRAC jouent un rôle central en matière de diffusion de la jeune création et de décentralisation de l’art contemporain. De Nathaniel Mellors au FRAC Bretagne à Beatrice Celli à la Villa Arson de Nice, Numéro propose son tour de l’Hexagone en sept expositions à découvrir pendant les fêtes.

 

Nathaniel Mellors, Neanderthal Container (capture vidéo), 2014 © Nathaniel Mellors. Nathaniel Mellors, Neanderthal Container (capture vidéo), 2014 © Nathaniel Mellors.
Nathaniel Mellors, Neanderthal Container (capture vidéo), 2014 © Nathaniel Mellors.

1. Rennes : Nathaniel Mellors crée une grotte préhistorique 

 

 

L’homme de Neandertal est-il un sujet contemporain ? Nathaniel Mellors répond par l’affirmative. Depuis 2012, l’artiste – diplômé de la Royal Art School of London –réalise des films pour le moins improbables mettant en scène des Néandertaliens mélancoliques tout droit sortis d’un film d’horreur ou de science-fiction. Images tremblantes prises au Caméscope, 35 mm, esthétique YouTube… Aussi bien fan de Georges Bataille, de Jean Cocteau et de Pier Paolo Pasolini que des sitcoms, le Britannique pioche ses inspirations de tous côtés pour enrichir ses vidéos. Avec leurs visages poilus et leur allure grossière, ces personnages satiriques et grotesques, mi-préhistoriques, mi-futuristes, souvent interprétés par des acteurs et actrices professionnels, dérangent en ce qu’ils pointent avec humour les bizarreries et les incohérences de la société contemporaine. À Rennes, le FRAC Bretagne réunit, pour la première fois, l’ensemble des vidéos issues de cette série initiée il y a une dizaine d’années. Au sein d’une immense exposition immersive, le visiteur pourra également découvrir à cette occasion ses sculptures post-humaines et ses peintures figuratives dont le style naïf rappelle des dessins d’enfant.

 

 

Nathaniel Mellors, “Permanent Presents”, jusqu’au 2 janvier, FRAC Bretagne, Rennes.

Béatrice Celli, Sive mas sive foemina, 2021.

Béatrice Celli, Sive mas sive foemina, 2021.

Vue du Jardin des allégories, 2021, crédits : JC Lett.

Vue du Jardin des allégories, 2021, crédits : JC Lett.

2. Nice : Beatrice Celli déploie un jardin fantasmagorique 

 

 

Jardin de rocaille, cyprès et fontaines baroques… Nous ne sommes pas ici dans le sud de l’Italie mais dans le jardin de la Villa Arson à Nice. Sous la politique de la décentralisation culturelle mise en place par le ministre de la Culture Jack Lang, cette ancienne villa de style italien est devenue une école d’art en 1972. En plus de former les artistes de demain, elle dispose également d’un pôle de soutien et de diffusion de la jeune création contemporaine. Diplômée en 2019, l’Italienne Beatrice Celli fait partie de ses anciens étudiants. Pour sa première exposition personnelle, elle s’inspire de l’histoire de la Villa Arson et de son somptueux jardin tout en puisant dans son histoire personnelle, celle d’une jeune fille née dans les Abruzzes, au centre de l’Italie, qui a grandi au rythme des récits et des légendes qu’on lui racontait. Au contact des femmes de sa famille, l’artiste s’est très tôt initiée aux pratiques artisanales et à toutes sortes de rituels magiques. À Nice, entre les murs de l’école d’art, on découvre aussi bien ses sculptures en céramique que ses compositions florales et ses cabanes en bois, échos directs au jardin que l’on peut apercevoir à travers les fenêtres. La jeune femme transforme ainsi le centre culturel en un lieu foisonnant de rêveries et de songes où se déploie son bestiaire fantastique.

 

 

Beatrice Celli, “Le Jardin des allégories”, jusqu’au 30 décembre, Villa Arson, Nice.

Jill Mulleady, Blood Fog, 2021. Huile sur lin. Courtesy de l'artiste et de la galerie Neu, Berlin. Jill Mulleady, Blood Fog, 2021. Huile sur lin. Courtesy de l'artiste et de la galerie Neu, Berlin.
Jill Mulleady, Blood Fog, 2021. Huile sur lin. Courtesy de l'artiste et de la galerie Neu, Berlin.

3. Dijon : Jill Mulleady nous plonge dans ses tableaux étranges et oniriques 

 

 

Si un centre d’art en France s’est toujours montré à la pointe de l’avant-garde, c’est bien le Consortium de Dijon. Depuis 1977, ce lieu mise sur une programmation internationale pour faire rayonner l’art contemporain au cœur de la Bourgogne. Cindy Sherman en 1982, Richard Prince en 1983… on ne compte plus les expositions qui y ont fait date. En consacrant actuellement un solo show à la peintre helvético-uruguayenne Jill Mulleady, le centre d’art ne fait pas exception. Désormais installée à Los Angeles, la trentenaire réalise des tableaux énigmatiques et inquiétants aux contours sombres. Sa peinture figurative s’inspire autant des romans noirs, qu’elle lit compulsivement, que des tableaux d’Edvard Munch ou des expressionnistes allemands. Lit Napoléon III, lavabo décrépit, tapis chinois mangé par les mites ou encore colonie d’alligators… Au Consortium, elle peint les fragments d’une vie domestique à la fois onirique et symbolique à travers laquelle, telle une héroïne de roman, elle redonne vie aux fantômes disparus dans le labyrinthe de l’histoire.

 

 

Jill Mulleady, “Blood Fog”, jusqu’au 9 janvier, Consortium Museum, Dijon.

Vue de l’exposition Étoiles distantes au Frac des Pays de la Loire, Nantes. De gauche à droite : Flora Bouteille, Les prétendants face à la Roue, 2021 en collaboration avec Sabine Teyssonneyre, Romain Bobichon, Cabine, 2021, Kim Farkas, 21-07, 2021, Camille Juthier, What If I Can See In Your Old Moss I, 2021. Cliché Fanny Trichet.
Vue de l’exposition Étoiles distantes au Frac des Pays de la Loire, Nantes. De gauche à droite : Flora Bouteille, Les prétendants face à la Roue, 2021 en collaboration avec Sabine Teyssonneyre, Romain Bobichon, Cabine, 2021, Kim Farkas, 21-07, 2021, Camille Juthier, What If I Can See In Your Old Moss I, 2021. Cliché Fanny Trichet.
Vue de l’exposition Étoiles distantes au Frac des Pays de la Loire, Nantes. De gauche à droite : Flora Bouteille, Les prétendants face à la Roue, 2021 en collaboration avec Sabine Teyssonneyre, Romain Bobichon, Cabine, 2021, Kim Farkas, 21-07, 2021, Camille Juthier, What If I Can See In Your Old Moss I, 2021. Cliché Fanny Trichet.

4. Nantes : la jeune scène artistique française repense le rôle de la création en 2021

 

 

Comment rendre compte d’une scène artistique émergente sans la réduire ni la survoler ? Alors qu’il vient tout juste de s’installer à Nantes dans de nouveaux locaux, le FRAC Pays de la Loire s’attaque d’emblée à cette tâche ambitieuse. Fidèle à sa mission de soutien à l’art contemporain, le lieu culturel réunit actuellement dans une exposition collective sept jeunes artistes français, dont plusieurs ont été formés au sein des écoles d’art de la Région. Sélectionnée par un jury composé de professionnels de la culture installés dans les Pays de la Loire, cette nouvelle génération d’artistes s’évertue à penser poétiquement le politique. Selon Franck Balland, commissaire de l’exposition, ces artistes émergents ont tous en commun de partager “une certaine idée du rôle de la création dans un environnement cerné par le chaos, ainsi qu’une forme d’obsession poétique et politique”. Intitulée “Étoiles distantes”,  l’exposition regroupe notamment des sculptures sonores de Kim Farkas, une vidéo de Camille Dumond consacrée au désœuvrement des hôtesses de l’air pendant la pandémie, mais aussi les peintures vaporeuses de Romain Bobichon. En parallèle de l’exposition, le FRAC Pays de la Loire s’associe aux lieux culturels de la région – comme le musée des Beaux-Arts d’Angers – afin d’y faire rayonner la création contemporaine pendant tout l’hiver. 

 

 

“Étoiles distantes”, jusqu’au 20 février, FRAC Pays de la Loire, Nantes. 

Nicolas Deshayes, vue de l’exposition Gargouilles au rez-de-chaussée du Creux de l’enfer, fontaines en aluminium et acier inoxydable, 2018. Crédit photo : Vincent Blesbois.

Nicolas Deshayes, vue de l’exposition Gargouilles au rez-de-chaussée du Creux de l’enfer, fontaines en aluminium et acier inoxydable, 2018. Crédit photo : Vincent Blesbois.

Nicolas Deshayes, vue de l’exposition Gargouilles au rez-de-chaussée du Creux de l’enfer, fontaines en aluminium et acier inoxydable, 2018. Crédit photo : Vincent Blesbois.

Nicolas Deshayes, vue de l’exposition Gargouilles au rez-de-chaussée du Creux de l’enfer, fontaines en aluminium et acier inoxydable, 2018. Crédit photo : Vincent Blesbois.

5. Thiers : Nicolas Deshayes réveille les fantômes d’une ancienne usine industrielle

 

 

Dans les années 80, l’heure est à la réhabilitation des sites industriels. Quoi de mieux que de transformer d’anciennes usines en centre d’art ? Dans la vallée des Usines, à Thiers, le Creux de l’enfer – baptisé ainsi en raison des conditions de travail difficiles de ses anciens ouvriers – devient en 1985 un centre artistique dont la façade en béton armé et les intérieurs d’origine ont été partiellement conservés en l’état afin de mettre en valeur l’architecture emblématique de l’usine. Depuis, le centre d’art soutient les pratiques artistiques à la croisée des savoirs techniques, scientifiques et artisanaux. Cet hiver, c’est au tour du jeune Français Nicolas Deshayes, désormais installé à Londres, d’y organiser sa première exposition personnelle. Tuyauteries domestiques, systèmes circulatoires, expérimentations en fonderie et thermoformage… En introduisant des techniques artisanales, Nicolas Deshayes cherche à altérer les moyens de production industriels en introduisant des accidents au sein des processus de création. En écho avec la puissance de ce site historique, il présente une série de fontaines en fonte d’aluminium aux formes organiques semblables à des lombrics ondulants. En parallèle, le FRAC Grand Large à Dunkerque propose une rétrospective complète des dix premières années de sa pratique artistique.

 

 

Nicolas Deshayes, “Gargouilles”, jusqu’au 6 février, Le Creux de l’enfer, Thiers.

Nicolas Deshayes, “Glissements”, jusqu’au 13 mars, FRAC Grand Large – Hauts-de-France, Dunkerque.

Pharmakon, Antoine Renard, Crac Occitanie Sète 2021 « The Large Crypto-Pharmacopoeia Archive Project », 2018-2021. Pharmakon, Antoine Renard, Crac Occitanie Sète 2021 « The Large Crypto-Pharmacopoeia Archive Project », 2018-2021.
Pharmakon, Antoine Renard, Crac Occitanie Sète 2021 « The Large Crypto-Pharmacopoeia Archive Project », 2018-2021.

6. Sète : Antoine Renard fusionne technologies numériques et guérison par les plantes 

 

 

Il y a deux ans, les sculptures olfactives d’Antoine Renard peuplaient le Palais de Tokyo à Paris. Au sous-sol du centre d’art, on y découvrait des dizaines de reproductions 3D de La Petite Danseuse de 14 ans d’Edgar Degas, dont les corps miniatures dégageaient des odeurs envoûtantes. Depuis cette exposition consacrée à la jeune scène française, Antoine Renard a fait du chemin. Entre 2018 et 2020, il a séjourné à plusieurs reprises en Amazonie péruvienne pour étudier la manière dont les thérapies par l’odorat guérissent des jeunes atteints d’addictions graves. À l’issu de sa résidence à la Villa Médicis, le CRAC Occitanie à Sète, fidèle depuis 1997 à sa mission de diffusion de la jeune création, lui offre une première exposition personnelle où les cinq sens sont mis à l’épreuve. Tandis qu’une bande sonore hypnotique diffuse des vocalises enregistrées dans une église romaine, chaque sculpture – issue de scans 3D  – est semblable à un ex-voto religieux dégageant une fumée odorante réalisée à partir de diverses plantes et résines. À travers des procédés techno-chimiques, leurs fragrances sont également transposées à l’univers numérique où leurs formes abstraites donnent lieu à des vidéos. Baptisée “Pharmakon” [“remède” ou “poison” en grec], cette exposition lyrique perturbe ainsi les technologies numériques pour en souligner le haut potentiel mystique.

 

 

Antoine Renard, “Pharmakon”, jusqu’au 6 février, CRAC Occitanie, Sète.

Nina Childress, Triptyque Oneguine, 2006, Collection Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA © Adagp, Paris, 2021, Crédit photo : Jean-Christophe Garcia. Nina Childress, Triptyque Oneguine, 2006, Collection Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA © Adagp, Paris, 2021, Crédit photo : Jean-Christophe Garcia.
Nina Childress, Triptyque Oneguine, 2006, Collection Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA © Adagp, Paris, 2021, Crédit photo : Jean-Christophe Garcia.

7.  Bordeaux : Nina Childress dépeint la société de consommation et les icônes des années 80

 

 

“Parce que je le vaux bien” : ce fameux slogan de L’Oréal Paris a fait le tour de la planète, mais il a aussi beaucoup inspiré Nina Childress. Dans une de ses rares vidéos, la peintre réunit et recoupe des extraits de publicité de shampoing. Subvertissant les images de la société de consommation, sa peinture – non dénuée d’humour et de provocation – emprunte ses modèles à la culture populaire. Des icônes du cinéma comme Catherine Deneuve à celles de la chanson comme France Gall, les femmes peuplent ses portraits réalisés dans les années 70 et 80. Revenue sur le devant de la scène grâce deux expositions successives – au Palais de Tokyo, puis à la Fondation Pernod Ricard –, l’ancienne chanteuse du groupe post-punk Lucrate Milk et ex-membre du collectif parisien Frères Ripoulin aux côtés de Pierre Huyghe et de Claude Closky, deux ténors de l’art contemporain, la peintre de 60 ans n’a connu que tardivement la notoriété. Pendant des décennies, alors qu’elle consacrait ses journées à la peinture, ce médium n’était plus prisé par les musées ni par le marché, contribuant largement à son manque de visibilité. Réunissant plus d’une centaine de tableaux de l’artiste et quatre vidéos, son exposition personnelle au FRAC Nouvelle-Aquitaine permet d’entrer dans une œuvre prolifique qui s’étale sur des décennies. Des stars de Dallas aux boîtes Tupperware, la période qui suit les Trente Glorieuses n’a aucun secret pour cette peintre inclassable.

 

 

Nina Childress, “Body Body”, FRAC Nouvelle-Aquitaine – MÉCA, Bordeaux.