Zoe Kazan, l’actrice qui excelle en journaliste causant la chute de Weinstein dans « She Said »
À 39 ans, l’actrice prodige Zoe Kazan est passée de « petite fiancée du cinéma américain indépendant » à « héroïne du film dont tout le monde parle » : She Said, qui retrace l’enquête, parue en 2017, qui a abouti à la chute d’Harvey Weinstein. Elle y incarne une journaliste du New York Times à la fois courageuse et intrépide, qui a mis à jour, avec sa collègue Megan Twohey (excellente Carey Mulligan) l’un des plus grands scandales de ces dernières années. Elle a ainsi aidé à briser le silence autour des agressions sexuelles et à initier le mouvement #MeToo. Portrait de l’un des visages les plus attachants d’Hollywood.
par Violaine Schütz.
1. Une famille prestigieuse
Zoe Kazan a le cinéma dans le sang. Elle a grandi à Los Angeles, dans une famille qui ne connaît presque rien d’autre que le septième art. Sa petite sœur, Maya Kazan est aussi actrice, son compagnon, Paul Dano, un acteur très prisé et ses parents sont tous les deux scénaristes, à l’origine de très belles histoires. Nicholas Kazan, le père, est l’homme derrière les récits de Matilda (1996) et du Mystère von Bülow (1990) tandis que la mère de Zoe, Robin Swicord a travaillé sur Mémoires d’une geisha (2005) et L’étrange histoire de Benjamin Button (2008). Acharnés de travail, ces cinéphiles écrivaient toute la nuit quand Zoe n’était qu’une petite fille et lui ont montré très tôt les grands classiques d’Hollywood.
Mais la figure la plus mythique de la famille, c’est le grand-père, qui n’est autre que l’oscarisé Elia Kazan. On doit à ce réalisateur et écrivain de légende, disparu en 2003, des chefs-d’œuvres tels qu’Un tramway nommé Désir (1951), À l’est d’Éden (1955) ou encore L’Arrangement (1969). Membre du parti communiste dans les années 30, il en sera ensuite exclu et trahira “les siens” en participant à une véritable chasse aux sorcières. Il a en effet dénoncé ses amis du cinéma ayant des idées de gauche à la commission des activités anti-américaines pendant le maccarthysme. Rempli de regrets, il fera son mea culpa dans Sur les Quais (1954). Une scène poignante montre Marlon Brando essayant d’expier ses fautes en suivant un long chemin de Croix.
2. Des films ambitieux
Le mot « prodige » est si galvaudé qu’on hésite toujours à l’employer. Mais pour l’actrice-dramaturge-productrice-scénariste, il n’est pas exagéré. Diplômée de Yale section théâtre, Zoe Kazan a fait ses armes à Broadway. Mais son visage espiègle et sa silhouette gracile séduisent vite le cinéma. L’actrice a beau ne pas se trouver assez jolie pour décrocher certains rôles hollywoodiens, son minois atypique proche de celui d’une Carey Mulligan ou d’une Anya Taylor-Joy lui permet d’être castée dans des projets souvent passionnants. Elle tourne dans The Savages (2007) aux côtés de Philip Seymour Hoffman, Les Noces rebelles (2007) de Sam Mendes avec Kate Winslet et Leonardo DiCaprio, Les Vies privées de Pippa Lee, aux côtés de Blake Lively et Winona Ryder ou encore dans Pas si simple (2009) de Nancy Meyers, avec Meryl Streep.
3. L’héroïne farouche de « She Said », le film coup-de-poing sur l’enquête qui a détruit Harvey Weinstein
Elle s’est longtemps spécialisée dans les films indés au charme décalé. Mais de plus en plus, on la voit dans des séries. Exigeante, elle ne choisit que des shows ambitieux acclamés par la critique tels que Bored to Death, The Deuce, The Plot Against America… Jusqu’à son apparition dans son projet le plus “mainstream” à ce jour : la série Clickbait, en 2021. Le show haletant qui a trusté pendant plusieurs semaines le top 10 de Netflix lui offre un rôle en or. Elle incarne la sœur du héros assassiné qui se bat pour savoir la vérité à son sujet. Rebelle, charismatique, fragile et forte à la fois, elle dégage une aura rare. Ce mercredi 23 novembre, on la verra dans le puissant film d’investigation She Said (qui s’inscrit dans la lignée du long-métrage Les Hommes du président, sorti en 1976) aux côtés de Carey Mulligan. Elle y incarne une journaliste du New York Times, Jodi Kantor, qui, accompagnée de sa collègue, Megan Twohey, va mener l’enquête (publiée en 2017) qui va aboutir à la chute d’Harvey Weinstein (et dans la foulée, au mouvement #MeToo). Ce rôle de femme farouche, persévérante et habile, qu’elle interprète avec une sobriété impressionnante, devrait lui valoir des contrats en rafale dans les mois – et les années – à venir.