WandaVision : que faut-il penser de la dernière production Marvel ?
Cette série en neuf chapitres met en vedette deux super-héros de l’univers des Avengers. Ils débarquent à chaque épisode dans une époque différente sans que le spectateur ne sache pourquoi… jusqu’à ce que les pièces du puzzle s’assemblent au fil du récit. Une production Marvel inventive et réjouissante.
Par Olivier Joyard.
Il faut une bonne dose de persévérance pour s’intéresser à toutes les ramifications de l’univers Marvel. La firme de comics a pris le pouvoir sur l’entertainment depuis une quinzaine d’années, blockbusters mondialisés à la clé. La lassitude guettait sérieusement, à force de répétition des mêmes pyrotechnies numériques. Un certain retour au calme était souhaitable, et c’est comme si les responsables de Disney+ – le nouveau service de streaming du géant californien – avaient compris le message avant les autres. WandaVision en est l’illustration captivante et surtout, étonnante. Cette série en neuf chapitres met en avant deux personnages secondaires de l’univers des Avengers, Wanda Maximoff (Elizabeth Olsen) et Vision (Paul Bettany), pour leur donner la chance d’exister sur un temps plus long, au-delà des contraintes afférentes au genre des super-héros sur grand écran.
Cela n’arrive pas n’importe comment, ni n’importe où : le couple débarque au premier épisode dans… une sitcom des années 50. On pense à I Love Lucy, l’une des plus célèbres, avec Lucille Ball. L’image est carrée, en noir et blanc. Des rires enregistrés ponctuent chaque gag. Wanda et Vision dissimulent leurs pouvoirs à leurs voisins et mènent une vie en apparence rangée, même si les fans du “MCU” (Marvel cinematic universe) savent que le second est censé être mort dans Avengers – Infinity War en 2018. Une tension affleure donc discrètement. Et dès le deuxième épisode, un autre décor s’impose, celui d’un feuilleton sixties type Ma sorcière bien-aimée. Dans le troisième, rebelote, nous avançons cette fois jusqu’aux années 70 fleuries, théâtre d’une grossesse pour le moins atypique. À chaque fois, la série réussit à faire exister un ton et un rythme spécifiques, des couleurs différentes, sans que cela n’altère son mystère central : pourquoi sont-ils là ?
Les réponses viennent peu à peu – nous n’en dirons rien, spoiler oblige – mais il se pourrait que cette vie sous cloche soit observée de loin, dans une autre dimension. Cela donne à la série WandaVision son caractère et sa singularité : elle se révèle à la fois comme une expérimentation pop et un mélodrame amoureux dont les pièces s’assemblent lentement. On a assez déploré la tendance parodique à l’œuvre dans le cinéma (et parfois les séries) pour ne pas relever qu’ici, le pastiche se met au service de l’incarnation des personnages. On peut voir WandaVision comme un clin d’œil vibrant à la forme populaire et historique des sitcoms, devant laquelle nous redevenons des spectateurs et spectatrices innocents. L’équipe créative ne se sert pas de l’univers télévisuel pour le tourner en dérision, mais comme d’une matière malléable et contemporaine. Quand, dans la seconde partie de la saison, des motifs plus typiques de l’univers Marvel actuel surgissent, ces derniers n’occupent pas toute la place. L’hybridation entre une forme artistique ancienne et des images ultra contemporaines prend vie. C’est peu dire qu’on ne s’attendait pas à un spectacle aussi réjouissant, tordu et inventif.
WandaVision (2021), une série créée par Jac Schaeffer, disponible sur Disney+.