Rencontre avec Marie Colomb, l’une des plus belles promesses du cinéma français
Elle impressionnait dans le crop top et les talons hauts de la bimbo vulnérable Loana dans la série Culte, l’an dernier. Aujourd’hui, l’actrice Marie Colomb reçoit une récompense au festival Canneseries pour l’ensemble de sa jeune carrière. L’occasion de rencontrer, sur la Croisette, l’un des plus beaux espoirs du cinéma français.
propos recueillis par Violaine Schütz.
Publié le 25 avril 2025. Modifié le 30 avril 2025.
Elle a été comparée à Béatrice Dalle et à Jane Birkin. Et Marion Cotillard a dit d’elle qu’elle ferait de grandes choses. À seulement 30 ans, la comédienne française Marie Colomb compte déjà dans sa filmographie des rôles marquants.
Entre celui de la fille de Marina Foïs dans le puissant As bestas (2022), sa performance sensible dans la production Laëtitia (2020) et son incarnation touchante de la bimbo au grand cœur et très fragile Loana dans la série Culte (2024), l’actrice est bien partie pour être l’une des stars du cinéma hexagonal de demain.
Alors qu’elle vient de recevoir un prix au festival Canneseries, on a rencontré cette étoile montante – très solaire et parée d’une petite robe Chanel blanche – sur la Croisette.
L’interview de Marie Colomb, star de la série Culte et du film As bestas
Numéro : Vous venez de remporter le Rising Star Award au festival Canneseries, succédant ainsi à Sydney Sweeney et Daisy Edgar-Jones…
Marie Colomb : Je suis très heureuse de ce prix. Surtout que c’est une récompense particulière car je ne suis pas en compétition avec d’autres actrices. C’est juste un prix signifiant que l’on a pensé à toi. Et je le prends vraiment comme un encouragement parce que c’est un début de carrière. C’est ultra gratifiant et ça donne confiance, ainsi que de la force. Ce métier est incroyable, mais il est aussi dur parfois. Ça fait quand même 10 ans que je suis à Paris (Marie Colomb a grandi dans la campagne bordelaise, ndlr) pour pratiquer ce métier-là et ça s’est vraiment réalisé marche par marche. Quand il arrive un truc bien comme ça, c’est important. J’essaie d’apprendre à profiter pleinement de ce type de moment parce que ça remplit un peu la jauge pour tous les moments plus difficiles où il n’y a pas de travail et que les demandes diminuent un peu. Il n’y a rien de compliqué dans cette récompense-là. C’est hyper touchant.
J’ai lu qu’enfant, vous filmiez votre famille avec une webcam, puis vous montiez ces images. Vous étiez une réalisatrice en herbe. Mais avez-vous toujours rêvé d’être une actrice ?
Oui, dès l’âge de six ans, je voulais être actrice. Ma mère m’a inscrite au théâtre à cet âge-là. Je suis montée sur scène et dès que j’en suis sortie, je lui ai dit : “Ça, je veux que ça soit toute ma vie.” Je me sentais tellement à ma place et si bien. J’avais l’impression d’avoir une petite utilité. Ça a toujours été mon truc. Je n’ai jamais pensé à un autre métier. Pour les petits films de ma famille, c’est arrivé quelque temps après. La première fois que j’ai eu mon ordi, vers 11 ans ou 12 ans. Je filmais avec la webcam de mon laptop donc je le déplaçais partout.
“Depuis l’âge de 6 ans, je veux être actrice.” Marie Colomb
Que ce soit avec la série Laëtitia, qui évoque un féminicide, ou avec le show Culte, qui parle des coulisses de Loft Story et qui rend justice à Loana (en la dépeignant dans toute sa complexité), vos projets semblent dévoiler un réel engagement…
Oui, à 100%. Même si, à la base, on ne m’a pas proposé ces rôles : j’ai passé un casting. Évidemment, après, je lis le scénario et si ça ne me plaît pas, je n’y vais pas. Même si je suis prise. Mais c’est vrai que ça constitue une forme d’engagement à petite échelle. Faire partie d’un projet qui a du sens, c’est important. D’autant plus que je trouve qu’on ne fait jamais mieux notre métier que dans ces conditions-là. En tout cas, on est dans les meilleures dispositions pour le faire.
La série Laëtitia, inspirée du meurtre de la jeune Laëtitia Perrais survenu en 2011, a eu beaucoup de retentissement après sa diffusion sur France 2 et sur HBO. Avez-vous reçu beaucoup de messages de femmes victimes de violences depuis ?
Non, je n’en ai pas reçu un seul. C’est assez étonnant, car je sais que beaucoup d’actrices qui ont joué des rôles de femmes victimes de la violence des hommes ont reçu des messages d’autres femmes. Après, je pense que peut-être qu’elles n’osent pas, car j’étais jeune au moment du tournage de la série. Et je fais plus jeune que mon âge. J’avais 23 ans à peu près mais j’ai l’air d’avoir 17 ans. Donc peut-être que les femmes se sont dit qu’elles n’allaient pas déposer leur histoire sur les épaules d’une petite nénette.
“Je ne vais pas mentir, je ressentais une pression énorme avant d’entrer dans la peau de Loana. ” Marie Colomb
Vous avez joué le rôle de Loana dans la série Culte. Comment vous êtes-vous préparée à incarner une personne aussi symbolique des années 2000 ?
Franchement, je ne vais pas mentir, je ressentais une pression énorme avant d’entrer dans sa peau. J’avais tellement peur que ça ne marche pas. Mais du coup, pour contrer cette pression et pour essayer de faire mieux, j’ai beaucoup bossé. Je ne l’ai pas rencontrée, mais j’avais tellement de matière. Son livre, Elle m’appelait Miette, est très riche. Il permet de comprendre son enfance, notamment. Elle s’est fait réécrire, mais il y a des passages de lettres qu’elle a écrites quand elle avait 13 ans dans lesquels on peut choper un peu son essence. Et puis il y a eu plein d’interviews données à l’occasion du Loft. Ça m’a beaucoup aidée. J’ai essayé de la comprendre intérieurement, d’abord, parce qu’imiter, c’est un truc, mais si on ne comprend pas un peu le fond, c’est compliqué.
J’imagine qu’il y a eu beaucoup de préparation physique car vous êtes vraiment métamorphosées en Loana dans la série…
Oui, il y a eu tout un travail sur la voix, le corps… L’équipe HMC (Habillage, maquillage, coiffure), a réalisé tout le super boulot sur l’aspect extérieur. Ça aide énormément. C’est bête, mais j’ai commencé à me tenir différemment dès que j’ai porté des prothèses. Tu ne tiens pas de la même manière quand tu as une grosse poitrine et que tu es grande (perchée sur des talons). Parce que Loana mesure plus de 10 centimètres de plus que moi (c’est-à-dire 1m73). Ce n’est pas du tout mon gabarit naturel et ça change complètement comment tu te comportes. Le regard des autres sur toi est différent, donc tu te comportes différemment.
“Je me donne à fond pour mes rôles mais j’essaie de protéger ma santé mentale.” Marie Colomb
Avez-vous eu du mal à sortir de ce rôle ?
Non. C’est un truc qui me fait toujours peur, en amont. Donc, je me donne énormément pour un rôle, mais je ne suis pas team “Actors Studio”. Je ne me perds pas dans le personnage. J’essaie de me protéger un peu et de protéger ma santé mentale. Avant de tourner la série, j’ai rêvé comme si j’étais Loana. Et là, je me suis dit : “Ok, on va se calmer un peu Marie.” Mais sinon, j’arrivais à me déconnecter entre les prises pour redevenir moi-même. Je ne restais pas toute la journée en Loana. Le fait d’avoir beaucoup travaillé avant de tourner me permettait de faire ce switch on/off. Par contre, si on ne travaille pas assez avant, c’est plus compliqué, je pense.
On va vous voir dans de nombreux films et séries très prochainement tels que Les Misérables (avec Noémie Merlant et Vincent Lindon), Génération Alpha ou encore Eldorado avec Jérémie Rénier et Karim Leklou…
Là, je suis en train de tourner Eldorado à Bruxelles, à Melun et en Côte d’Ivoire (mais qui est censé être le Ghana). C’est la troisième série que je fais avec le réalisateur Louis Farge (Follow, Culte). Ça parle des Avions renifleurs, un scandale qui a eu lieu dans les années 70, en France. Deux hommes – un aristocrate belge et un savant italien – ont fait croire qu’ils avaient inventé une machine qui pouvait détecter le pétrole sous le sol. Ce qui était faux. Ils ont escorté des millions à Elf Aquitaine. Je joue un second rôle, celui d’une géologue. C’est quelqu’un de scientifique et de très carré, presque autiste. Mais de l’autisme féminin. Donc c’est encore une autre forme d’autisme différente de l’autisme des hommes.
Vous avez joué dans de nombreuses productions tragiques. Mais vous venez enfin de tourner dans une comédie : Tout va bien…
Oui, c’est une comédie réalisée par Patrick Cassir (on lui doit Premières Vacances avec Jonathan Cohen et Camille Chamoux, ndlr). Et j’espère que ça va aller. C’était un gros challenge. Parce que c’est vrai qu’on m’associe plutôt aux drames (rires). En tout cas, je me suis éclatée à jouer dedans. Il faut dire que j’ai tourné avec des acteurs hyper forts en comédie (Hakim Jemili, Noémie Lvovsky). Ça facilite les choses.
Culte, créée par Matthieu Rumani et Nicolas Slomka, disponible sur Prime Video.