19 avr 2023

Rencontre avec Niels Schneider, acteur engagé à l’affiche du film Avant l’effondrement

Ce mercredi 19 avril sort dans les salles de cinéma Avant l’effondrement, un premier film de l’écrivaine Alice Zeniter aussi touchant qu’essentiel, interrogeant la place et le rôle d’un homme tourmenté par la thématique du réchauffement climatique, merveilleusement incarné par Niels Schneider. Juste avant que le monde ne s’effondre, Numéro est allé à la rencontre de l’acteur franco-canadien. 

propos recueillis par Nathan Merchadier.

L’acteur Niels Schneider © Arno Lam / @arnolamphoto et @charlette_studio

Après avoir été révélé au grand public en 2009 – dans le premier film de Xavier Dolan, l’émouvant J’ai tué ma mère – Niels Schneider, 35 ans, ne cesse de poursuivre son ascension dans le monde du cinéma jusqu’a recevoir en 2017 un César, celui du « meilleur espoir masculin » pour son rôle de truand dans Diamant noir d’Arthur Harari. Ce mercredi 19 avril, l’acteur franco-canadien au timbre de voix éraillé et à la gueule d’ange s’illustre avec brio dans la comédie dramatique Avant l’effondrement, un film aussi touchant qu’essentiel mettant en lumière les limites de notre société face au dérèglement climatique. En se muant en dans le rôle de Tristan, un directeur de campagne aux élections législatives, Niels Schneider confirme le goût qu’on lui connaît pour les premiers films aux univers forts. À travers ce long-métrage, Alice Zeniter, auteure du roman L’Art de perdre (récompensé en 2017 par le prix Goncourt des lycéens) explore l’univers de la politique locale parisienne et critique avec subtilité la frénésie qui s’empare parfois des hommes lorsqu’ils sont confrontés à leur propres contradictions.

 

Niels Schneider, héros engagé d’Avant l’effondrement

 

Plongé dans un Paris caniculaire, Tristan découvre un matin un test de grossesse positif dans une enveloppe anonyme qui lui est adressée. Frappé depuis sa naissance par la chorée de Huntington, une maladie neurodégénérative et héréditaire, le jeune homme voit sa vie bouleversée lorsqu’il prend conscience qu’en devenant père, il pourrait transmettre un gène potentiellement mortel à sa descendance. S’ensuit une série d’événements qui le conduiront jusqu’à la ferme autogérée dans laquelle une de ses amantes, Pablo (Souheila Yacoub) s’est retirée, loin du tumulte de la capitale. En mobilisant une narration largement théâtrale, Alice Zeniter confronte Tristan à ses propres contradictions, celles d’un homme agissant parfois avec les femmes sans estimer les conséquences de ses actes, mais aussi celles d’un trentenaire profondément anxieux face aux enjeux climatiques de son époque. Pour incarner ce héros complexe, Niels Schneider fait preuve d’une intensité et d’un talent hors-norme. Rencontre un acteur aussi sensible qu’engagé.

Niels Schneider et Ariane Labed dans le film Avant l’effondrement (2023) © Pyramide Distribution

Numéro : Qu’est-ce qui vous a séduit dans le film Avant l’effondrement

Niels Schneider : Je connaissais déjà le travail d’Alice Zeniter, notamment son roman l’Art de perdre (2017) que j’avais adoréJ’ai été séduit par cette idée d’allier l’intime, le politique et le romanesque pour jouer sur plusieurs registres, plusieurs tonalités. J’ai aussi aimé me plonger dans la peau d’un personnage avec des préoccupations qui ressemblent aux miennes. Il y avait enfin une réelle envie de cinéma, avec des dialogues profonds. En découvrant le scénario, j’ai senti une vitalité dans ce film. 

 

Comment s’est déroulé le tournage avec Alice Zeniter avec le rythme du film et cette narration qui reprend parfois les codes du théâtre… 

Avant d’accepter le projet je ne le savais pas trop mais Alice (Zeniter) est aussi metteuse en scène au théâtre. On a eu un parcours assez proche finalement puisque j’ai aussi pris des cours de théâtre à mes débuts. Nous nous sommes beaucoup vus pour discuter du texte, de ce que représentait chaque scène, de préciser les intentions et d’interroger l’intériorité des personnages. Après ça, nous avons beaucoup répété, peut-être même plus que sur d’autres films. Alice avait une idée très précise de ce qu’elle voulait mais il y avait quand même toujours de la place pour la spontanéité sur ce tournage. 

 

“Je me lasse assez vite et je n’aime pas me répéter.” Niels Schneider

 

Vous jouez maintenant aussi bien un chef de gang dans le film Apaches (2023) qu’un directeur de campagne tourmenté dans Avant l’effondrement. Dans quel registre vous sentez-vous le plus à l’aise? 

Je me lasse assez vite et je n’aime pas me répéter. Quand je sors d’un film, ça laisse forcément des traces et je ressens souvent le besoin de faire totalement autre chose. Dans Sentinelle Sud, j’incarnais un soldat blessé et tourmenté au sein d’un film très intimiste. J’ai ensuite joué dans Totemsune grosse série d’espionnage dans une veine un peu hollywoodienne. Aujourd’hui, avec Avant l’effondrement je m’essaie à un tout autre registre. J’essaie de choisir des rôles les plus différents possibles : c’est là que je m’amuse le plus.

Niels Schneider dans le film Avant l’effondrement (2023) © Pyramide Distribution

Numéro : Qu’est-ce qui vous a séduit dans le rôle de Tristan et dans ce projet ? 

Niels Schneider : Je connaissais déjà le travail d’Alice Zeniter, notamment à travers son roman l’Art de perdre (2017) que j’avais adoréJ’ai été séduit par cette idée d’allier l’intime, le politique et le romanesque pour jouer sur plusieurs registres, plusieurs tonalités. J’ai aussi aimé me plonger dans la peau d’un personnage avec des préoccupations qui ressemble aux miennes. Il y avait enfin une réel envie de cinéma, avec des dialogues profonds. En découvrant le scénario, j’ai senti une vitalité dans ce film. 

 

Comment s’est déroulé le tournage avec Alice Zeniter ? Dans le rythme du film et dans la narration qui reprend parfois les codes du théâtre … 

Avant d’accepter le projet je ne le savais pas trop mais Alice (Zeniter) est aussi metteuse en scène au théâtre, on a eu une préparation assez proche finalement. Nous nous sommes beaucoup vu pour discuter du texte, de ce que que représentait chaque scènes, de préciser les intentions et d’interroger l’intériorité des personnages. Après ça, nous avons beaucoup répété, peut-être même plus que sur d’autres films. Alice avait une idée très précise de ce qu’elle voulait mais il y avait quand même toujours de la place pour la spontanéité sur ce tournage. 

 

Dans Avant l’effondrement, vous interprétez un directeur de campagne. Êtes-vous politisé dans la vraie vie ? Y-a-t’il un engagement politique derrière ce choix de rôle ?

Je ne suis pas spécialement engagé politiquement, je n’ai pas de carte au sein d’un quelconque parti politique. Mais je me sens concerné par les questions environnementales, climatiques et sur l’avenir plus globalement. Je me politise de plus en plus parce que j’ai l’impression que la politique prend un bord dangereux. On se sent malheureusement parfois bien impuissant face à tout cela. 

 

Vous jouez maintenant aussi bien un chef de gang dans le film Apaches (2023) qu’un directeur de campagne tourmenté dans Avant l’effondrement. Dans quel registre prenez-vous aujourd’hui le plus de plaisir à jouer ? 

Je me lasse assez vite et je n’aime pas me répéter. Quand je sors d’un film, ça laisse forcément des traces et je ressens souvent le besoin de faire totalement autre chose. Dans Sentinel Sud, j’incarnais un soldat blessé et tourmenté au sein d’un film très intimiste. J’ai ensuite joué dans Totemune grosse série d’espion dans une veine un peu hollywoodienne. Aujourd’hui, avec Avant l’effondrement je m’essaie à un tout autre registre. J’essaie de choisir des rôles les plus différents possibles, c’est là que je m’amuse le plus.

Niels Schneider dans le film Avant l’effondrement (2023) © Pyramide Distribution

“En prenant du recul, c’est vraiment l’inconnu qui me plaît, le fait de ne pas savoir quel homme je serais dans 10 ans. » Niels Schneider

 

Dans Avant l’effondrement, vous interprétez un directeur de campagne. Êtes-vous politisé dans la vraie vie ? 

Je ne suis pas spécialement engagé politiquement et je n’ai pas de carte au sein d’un quelconque parti politique. Mais je me sens concerné par les questions environnementales, climatiques et par l’avenir plus globalement. Je me politise de plus en plus parce que j’ai l’impression que la politique prend un bord dangereux. Mais on se sent malheureusement parfois bien impuissant face à tout cela. 

 

Dans Avant l’effondrement, on voit une masculinité différente de celle très souvent vue au cinéma. Elle est moins héroïque… 

Totalement. Ça donne l’occasion de s’intéresser plus globalement à la place de l’homme dans la société. À travers le prisme de la maladie du personnage de Tristan, mais aussi à travers les bouleversements de mœurs et l’éveil des consciences vis-à-vis des rapports hommes-femmes. Il y a aussi la question de cette masculinité qu’on ne voit pas beaucoup représentée. Le personnage que j’incarne n’est pas du tout un dominant, il n’incarne pas le patriarcat. Il a toujours un temps de retard, il a toujours des angles morts. Il ne se rend pas compte qu’il existe des endroits de domination, des situations d’inéquité. J’ai aimé le décalage entre son discours et ses actions, sa manière de s’adresser aux autres personnages dans un rapport qui ne semble pas totalement naturel pour lui. 

 

Dans vos interviews, vous évoquez votre ressenti vis-à-vis de la figure d’éphèbe au cinéma, un rôle qui vous a longtemps collé à la peau…

Oui j’ai l’impression mais je m’en suis finalement détaché, il me semble… Aujourd’hui j’ai 35 ans et l’univers de la comédie m’attire, même si j’ai envie de continuer à m’illustrer dans un vaste panel de registres cinématographiques. Depuis mes débuts, je n’ai jamais cherché à prévoir ce qui pouvait m’arriver et je n’ai jamais eu de plan de carrière. Il y a souvent des vases communicants entre les rôles que l’on joue et les événements qui peuvent nous arriver dans la vie. En prenant du recul, c’est vraiment l’inconnu qui me plaît, le fait de ne pas savoir quel homme je serais dans 10 ans, ni l’acteur que je vais devenir.

Niels Schneider et Souheila Yacoub dans le film Avant l’effondrement (2023) © Pyramide Distribution

Dans ce film, vous entretenez un rapport très distant avec votre demi-frère lorsque votre père est sur le point de mourir. Dans la vraie vie, vous êtes très proche avec vos trois frères… 

C’est vraiment une chance que l’on soit proches mes frères et moi. Je sais que ce n’est pas le cas pour beaucoup de gens pour qui le terme de fratrie n’a même aucun sens. Je n’émets aucun jugement à ce sujet car je pense que c’est parfois normal qu’il y ait des rancunes qui viennent de l’enfance, des souffrances aussi. L’important est de pouvoir se reconstituer une famille à l’âge adulte. C’est quelque chose qu’on l’on ne voit pas beaucoup au cinéma et ça m’a plu de défendre cette idée dans Avant l’effondrement. Il y a beaucoup de gens qui doivent partager ce sentiment, mais l’exprimer comme ça, à travers la voix off du personnage qui dit tout haut ce qu’il n’ose pas dire à son frère, j’ai trouvé ça très fort. 

 

Votre frère Aliocha est actuellement à l’affiche de la série Salade grecque de Cédric Klapisch sur Prime Video. Avez-vous vu la série ?

Je n’ai pas encore terminé la série mais j’approche de la fin pour tout vous dire (rires). Je suis hyper fier de lui. Je trouve qu’il joue divinement bien, qu’il est remarquable ainsi que tous les autres acteurs. J’ai beaucoup aimé la série dans l’idée qu’elle traite des préoccupations de sa génération sans tomber dans les clichés. J’ai trouvé ça émouvant et drôle. 

 

Donnez-vous des conseils d’ordre cinématographique à vos frères ? 

Ce ne sont pas vraiment des conseils et ça ne constitue pas l’essentiel de nos discussions, mais parfois on en parle. Je n’ai pas tant de conseils à leur donner, ils sont grands et intelligents et ils n’ont pas besoin de moi pour avancer dans ce milieu. Il m’arrive toutefois qu’ils m’appellent pour me demander mon avis sur un rôle, comme parfois je peux le faire avec eux d’ailleurs. 

 

Votre compagne, Virginie Efira, vient de recevoir un César. Quel effet cela vous a-t-il fait ? 

C’était super joyeux. Cela doit faire six ou sept ans qu’elle est nommée chaque année et je suis finalement très heureux qu’elle soit récompensée pour tout son travail. D’autant plus pour célébrer un rôle comme celui qu’elle joue dans Revoir Paris qui était très touchant. 

 

Avant l’effondrement (2023) d’Alice Zeniter et Benoît Volnais avec Niels Schneider, actuellement en salle.