6 avr 2020

Yung Lean rappe en live dans un camion

Personnalité émergente du mouvement cloudrap, le Suédois de 23 ans s’est produit en live le jeudi 2 avril… depuis l’arrière d’un camion.  Garé dans le port de Stockholm, rempli de bougies et de babioles ésotériques, l’espace étroit s’est fait la scène de 45 minutes d’un concert millimétré, reprenant les titres phares de Yung Lean, “Boylife in EU”, “Agony” ou encore “Red Bottom Sky”.

Un éternel clown triste

 

À seulement 23 ans, Yung Lean s’est forgé un nom auprès des rappeurs américains les plus influents du moment. Ses collaborations avec Frank Ocean et Kid Cudi l’ont fait connaître sur la scène internationale, mais c’est surtout son esthétique de clown triste et sa nonchalance qui font de lui une personnalité étonnante. A la tête d’une mouvance de hip-hop mélancolique, trois albums (Unknown Memory, Warlord et Stranger), trois mixtapes (Unknown Death 2002, Frost God et Poison Ivy) et de très nombreux singles en poche, le suédois semble avoir déjà tout vécu. Fort d’un imaginaire mystique profondément morose, il chante tout autant ses addictions et son combat contre la dépression que ses penchants candides pour le thé glacé ou les jeux vidéo.

 

En pur produit d’Internet, le rappeur semble connaître les ficelles du succès 2.0 comme sa poche : pas besoin pour lui de faire de promotion tapageuse ou d’interviews trop polies, il se contente de surprendre ses admirateurs avec des morceaux inattendus, éparpillés entre les sorties régulières de ses albums. Depuis l’arrière d’un camion, jeudi dernier au soir, il s’est produit devant un public virtuel, en direct du port désert de Stockholm. Son objectif, “chanter pour toutes les personnes enfermées”, a fait mouche : 286 657 personnes se sont connectées à son live, qui a duré une cinquantaine de minutes.

 

 

Paysage brumeux pour coeur désenchanté

 

Le bruit du moteur en fond sonore, une nuit bleutée et un grand sucre d’orge en plastique, des dizaines de bougies rougeoyantes, un arbre noueux et des figurines étranges : voilà le décor envoûtant parfait pour faire naître les émotions à vif de Yung Lean. En initiant le concert avec Friday the 13th (12:33), morceau en forme de crise existentielle tiré de sa mixtape Ivy Poison (2018), le rappeur annonçait un live en bonne et due forme, riche de ses titres les plus poignants. Entre son morceau Benzo, –coproduit avec Död Mark–, le titre tiré de son projet Jonatanleandoer 127 intitulé Hotel in Minsk, et après avoir chanté les louanges de la Smirnoff Ice, le point d’orgue de son show culmine alors qu’il chante Agony (40:35), certainement le titre le plus sombre de tous.

 

Les influences du Suédois percent de toute part. Yung Lean se fait le jeune compère de Post Malone, King Krule ou Lil B, abandonnant désormais ses buzz adolescents pour des productions brumeuses pleines d’originalité. Dans le clip de son récent titre Boylife in EU (18:06), on le voit évoluer dans un univers à la Tim Burton tout en rayures et couleurs criardes, aux côtés de ses fidèles acolytes de Sadboys, son précédent groupe. A défaut de pouvoir partir en tournée, l’éternel garçon triste devrait faire l’objet d’un documentaire intitulé In My Head, prévu initialement pour être projeté au Tribeca Film Festival, pour l’instant reporté.

 

 

Yung Lean, live @ the truck, disponible sur Youtube.