8 juin 2020

Tout ce qu’il faut savoir sur “Chromatica”, le nouvel album de Lady Gaga

Le sixième album de Lady Gaga, Chromatica, caracole en tête des ventes dans plus de 70 pays dont la France et les États-Unis. Premier blockbuster pop de l’ère post-confinement, est-il à la hauteur de l’épique B.O de A Star Is Born ?

1. Des tubes réjouissants

 

L’attente a été longue pour les “little monsters”, le surnom donné à l’armée de fans de la diva pop. Le nouvel album de Lady Gaga était prévu pour mars avant d’être décalé pour cause de crise sanitaire. Il arrivera finalement, après avoir fuité sur Internet, fin mai. Et il a de quoi surprendre. On avait laissé la chanteuse dépouillée d’artifices dans la fresque lacrymale A Star is Born (2018). Sa bande originale, écoulée à plus de 7 millions d’exemplaires, permettait à toutes les facettes vocales de Gaga d’impressionner sur fond de rock classique. Ceux qui ont apprécié la performance de Stefani Germanotta (son vrai nom) dans son tube Shallow, primé aux Oscars, pourraient être déçus par les nouvelles couleurs de la Mother Monster. Chromatica délaisse les guitares et l’acoustique pour la joie simple et libératrice de la piste de danse. Une piste de danse à l’esthétique Mad Max teintée de manga qui fait la part belle aux références 80’s et 90’s, et surtout, au kitsch. Pop et ultra efficace, les tubes Rain On Me et Stupid Love renouent avec le côté le plus excentrique et théâtral de la Gaga qui peut se draper dans une robe de viande ou rameuter tout le monde sous la boule à facettes en un seul « doo-doo-mmm » (Just Dance). Après des mois de confinement, cette énergie électro maximaliste manque un brin de finesse mais fait un bien fou au corps et à l’esprit.

2. Un disque cathartique

 

Mais si l’heure est, musicalement, à la dance et aux tubes de l’été, Stefani n’a pas oublié ce qui fait sa force : sa sincérité dans sa façon d’aborder de manière intime ses vieux démons et les épreuves de la vie. On retrouve ainsi l’artiste sans fard de Joanne, disque country sorti en 2016 et dédié à sa tante décédée d’un lupus, dans les paroles de Chromatica. Sur Free Woman, elle revient sur un viol qu’elle a subi dans sa jeunesse. Elle a confié à son sujet dans une interview accordée à Apple Music : “C’est important pour moi que ce titre s’appelle Free Woman parce que j’ai été sexuellement agressée par un producteur de musique. Ce texte concentre tous mes sentiments sur la vie, le monde, sur l’industrie, les compromis que j’ai du faire pour parvenir là où j’en suis.”

 

Déjà dans la confession, la chanteuse avait évoqué ses problèmes de santé mentale dans le documentaire Netflix Five Foot Two. Sur Chromatica, elle continue cette conversation en parlant de ses doutes, de son besoin d’être écoutée, de sa solitude, de ceux qui profitent de son succès, d’amour compliqué ou encore de ses imperfections. Sur 911, titre qui rend hommage au médicament antipsychotique qui a changé sa vie (l’Olanzapine), elle avoue même :“Ma pire ennemie, c’est moi ».  A la manière de Kanye West faisant part de sa bipolarité et de Selena Gomez s’ouvrant sur sa dépression, Gaga a le mérite d’ouvrir la discussion sur des sujets importants trop longtemps restés tabous dans la pop commerciale.

3. Une artiste transgénérationnelle

 

Les 16 chansons de Chromatica devraient plaire au plus grand monde. Celle qui a toujours su soigner ses collaborations (Beyoncé, Tony Bennett, Bradley Cooper, Mark Ronson), a fait appel à des stars issues de plusieurs génération pop pour assurer des records d’audience. L’un des morceaux les plus réussis du disque reste le duo avec Elton John : Sine From Above. Loin de la ballade folk qu’on aurait pu attendre de la part du génie responsable de Candle In The Wind, c’est un hymne techno pétaradant que nous proposent les deux caméléons aux voix puissamment émotionnelles. Lady Gaga, 34 ans, tend également la main à des idoles des millennials comme le groupe de k-pop BLACKPINK (sur Sour Candy) ou Ariana Grande (Rain on Me). Mais on retrouve les moins connues Morgan Kibby de M83 (à l’écriture) et Maya Jane Coles (samplée) sur d’autres titres. Lady Gaga multiplie aussi les références à d’autres stars qui ne sont pas présentes au générique. Sur Babylon, on pense fortement à la Madonna de Vogue, tandis que certaines intonations de voix évoquent Katy Perry ou Dua Lipa. Aussi séduisant que peut l’être le résultat, on regrette cependant de ne pas toujours entendre la folie de Gaga dans ce qu’elle a de si unique sur ce rouleau compresseur pour dancefloors moites qui en fait voir de toutes les couleurs.

 

Lady Gaga – Chromatica (Insterscope), disponible.