Qui est Calcutta, superstar débraillée de la pop italienne ?
Nouveau poulain de l’écurie Columbia Records/Sony, le chanteur et compositeur italien Calcutta vient de dévoiler son quatrième disque Relax, après quatre années d’absence. Véritable star de la Botte, le musicien compose une pop indépendante ultra mélodique. Pour l’occasion, Numéro s’est envolé à Rome, à la Villa Médicis, pour une interview rare.
Par Camille Bois-Martin.
Edoardo d’Erme, alias Calcutta, n’a rien d’une rockstar. Simple, drôle, accessible, look très décontracté, voire débraillé (casquette, chemise fluo, short à imprimé improbable) : si vous le croisez dans la rue, peu de chance que vous vous rendiez compte qu’il s’agit de l’un des plus grands artistes de la pop italienne du moment. Pourtant, le chanteur de 34 ans remplit des stades à guichets fermés, enchaîne les tubes chantés à tue-tête dans les rues du sud de Rome ou en soirée dans toute la Botte. “J’essaie de rester discret. Je suis content de mon succès, mais je serai toujours mal à l’aise que certaines personnes s’intéressent plus à moi qu’à ma musique” explique-t-il humblement. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles l’ancien serveur dans une pizzeria new-yorkaise n’accorde que très peu d’interviews, ne sachant jamais trop quoi dire ou comment bien trouver les mots pour décrire son travail.
Edoardo d’Erme alias Calcutta, star de la pop indépendante italienne
Depuis tout petit, Calcutta baigne dans un univers infusé de musique en tout genre. Porté par sa famille, il touche à tout, écoute de tout, commence à se produire un peu partout : “Il n’y a rien de spécial qui m’a conduit à devenir chanteur. Sûrement un enchaînement d’heureux hasards. » Des hasards qui l’ont fait grimper en tête des charts italiens, poussé par son label Bomba Dischi, très en vogue dans son pays, avec le succès de ses albums Mainstream (2015) et Evergreen (2018) puis de ses tubes qui tournent encore en boucle en soirée tels que Cosa mi manche a fare (2015) et Paracetamolo (2018). Mais, après la sortie de deux singles en 2019, silence radio. Enfin, presque… Les titres du chanteur passent encore sur toutes les ondes, mais lui disparaît de la scène musicale. Tandis que ses chansons cumulent les millions d’écoutes, Calcutta se concentre en effet sur l’écriture, et produit des textes pour de nombreux artistes italiens tels qu’Ariete ou Marracash. “Je préfère écrire pour les autres car ça me retire ce stress permanent lié au succès. Je fais ce que j’aime, je travaille avec des personnes sympas, je suis payé pour : que demander de plus ?”
Calcutta : l’aternative pop à Måneskin
De toute façon, Edoardo d’Erme ne recherche pas la notoriété. C’est un passionné, et puis c’est tout. De son nom de scène à sa démarche, tout est très simple et abordé de manière décontractée – il ne faut pas chercher plus loin que ses chansons, infusées d’un talent limpide et évident. La preuve : lorsqu’on lui demande pourquoi il a choisi le pseudo “Calcutta”, ce dernier répond en riant : “C’était un nom qu’il y avait sur l’interphone de l’immeuble de mes grands-parents. Je n’ai jamais su si c’était un surnom ou un nom de famille, mais la sonorité me plaisait. Alors je l’ai pris !”
Simple. Tout comme la démarche qui l’a mené à signer en France avec le label Columbia Records/Sony Music (qui produit parmi des pointures de l’industrie musicale telles qu’Alicia Keys, Harry Styles, Rosalía, Doja Cat) : “Pour que les Français puissent écouter de la musique qu’ils ne comprennent pas forcément” explique le chanteur. “Moi, j’adore les artistes anglophones, alors que je ne comprends rien à ce qu’ils disent !” Et puis, il faut dire qu’en France, les stars italiennes d’un « autre temps » ont la peau dure : Andrea Bocelli, Mina, Zucchero, Adriana Celentano, Lucio Battisti… Ces artistes éclipsent encore aujourd’hui les jeunes chanteurs qui peinent à s’exporter de leur pays, à l’exception du groupe Måneskin, qui connaît un succès phénoménal. Il semble ainsi légitime de demander à Calcutta ce qu’il espère apporter comme image de la variété italienne avec la sortie de son album Relax en France : “qu’elle existe, tout simplement”. Et comment la décrirait-il ? “Italienne.” Simple, on vous l’avait dit. D’ailleurs, pourquoi ce titre, Relax ? “Parce que tout le monde me pressait à sortir un nouveau disque, et je pense que c’est la meilleure des réponses.”
Relax, le nouvel album pop réussi de Calcutta avec Myd et un membre de Phoenix
Annoncé en mai 2023 avec une tournée de onze dates en Italie, le retour de Calcutta avait déjà fait trembler les foules : en quelques jours, les 80 000 billets ont tous été vendus. Avec, en amont, deux soirées exclusives organisées entre les murs de la Villa Médicis à Rome les 14 et 15 octobre dernier. De 16h à minuit, des petits groupes de trente personnes (assez chanceuses pour avoir réussi à acheter leurs places) se sont succédés toutes les trente minutes pour l’observer chanter, en compagnie de ses musiciens et de l’artiste-performeur italien Nico Vascellari. Enfermés dans un salon de l’Académie Française, ces derniers ne sont visibles qu’au travers de quelques portes perforées des lettres “R”, “E”, “L”, “A”,“X”. Calcutta y joue alors ses plus gros tubes, et dévoile de temps à autre des titres de son prochain album, dont la date de sortie prévue quelques jours plus tard n’a pas encore été annoncée. Les fans chantent, dansent, et enregistrent avec leur téléphone ces nouveaux inédits, enjoués par le retour du chanteur italien.
Et quelque chose nous dit que le succès de Relax sera aussi au rendez-vous dans l’Hexagone. Les indices ? La collaboration, notamment, des artistes français Myd et Laurent Brancowitz (Phoenix), le premier ayant produit l’entièreté de l’album et le second ayant écrit son premier titre, “Coro”, une chanson a capella enregistrée à quatre voix que Calcutta nous décrit comme “la plus difficile” de son disque. “On a littéralement passé toute une journée en studio pour l’enregistrer, on a du tester au moins 20 000 voix.(Rires)” Outre ces participations, les Français tomberont assurément sous le charme du chanteur italien, dont le refrain pop et envoûtant du titre Giro con te ou le rythme grisant de Controtempo nous font déjà regretter les soirées estivales baignées par une lumière lunaire.
Calcutta – Relax (Columbia Records/Sony), disponible.