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Mais qu’écoutait Étienne Daho en juin 2004 ?
Alors que le très attendu nouvel album d'Etienne Daho, Blitz, sort le 17 novembre, Numéro revient sur la playlist que la légende vivante de la pop française partageait avec le magazine en juin 2004. Souvenirs souvenirs…
Propos recueillis par Eglée de Bure.
The Beach Boys – Smile (Capitol)
Je connaissais leurs tubes, comme tout le monde, et puis, il y a un an et demi, j’ai eu envie de tout redécouvrir. Il y a des albums qui correspondent à ce que vous vivez; et là, c’est comme la BO de cette année de ma vie, je ne m’en lasse pas! Cet album inachevé n’est jamais sorti. Il est sublime et dingue, c’est carrément une œuvre classique, le classique qui rencontre la pop. Brian Wilson a chanté avec un orchestre de vingt personnes (cuivres, cordes, etc.) à l’Olympia, il y a trois mois. C’était exceptionnel. J’y étais avec Marianne Faithfull, et on était comme deux gosses.
VanessaDaou – Zipless (MCA)
C’est son premier disque, sorti en 1995. Il n’a pas vieilli. Je l’écou- tais quasiment tous les jours quand j’habitais à Londres. Et puis on s’est rencontrés, on a fait un duo sur l’un de mes albums, on a fait de la scène. Vanessa est comme une sœur, on est très proches. Daho/Daou… Peter –son mari– et elle ont vraiment inventé un sty- le. Avec eux, le sexe devient un art. Il n’y a rien de racoleur, de vilain, c’est vraiment la beauté de l’expression sexuelle. Elle est d’ailleurs, sans le vouloir, sans le fabriquer, dans son attitude, très sexuelle, dans le joli sens du terme. C’est une véritable artiste avec un véritable point de vue, et c’est ce que j’aime en elle.
Suicide (Mute)
Alan Vega et Martin Rev, les deux membres du groupe, sont des précurseurs. Avec cet album, ils ont vraiment changé la musique en créant quelque chose de très particulier. Ils étaient les premiers, fin seventies-début eighties à avoir mélangé rockabilly et préelec- tro. Avec eux, on pénètre dans un monde de tension doux et magique. Peu de gens connaissent, mais c’est une référence pour beaucoup d’artistes. Un disque culte.
Dusty Springfield – Dusty in Memphis (Philips)
LA plus belle voix de la pop et de la soul. S’il y a un disque à avoir, c’est celui-là. J’ai mis trois ans à l’ouvrir après qu’on me l’a conseillé. Je n’aimais pas la pochette. Mais le jour où je l’ai écouté, je suis devenu compulsif. Quand j’aime un disque, je n’écoute que ça en boucle. Comme tout le monde, je connaissais The Look of Love, Song of the Preacher Man, le côté travelo, archimaquillé avec des perruques. Il n’y a que les Anglais pour produire ce genre de personnages excentriques et atypiques, les Bowie, les Boy George, les Elton John. Cet album a été enregistré à Memphis et arrangé de manière géniale par Jerry Wexler et toute la bande de gens qui produisait Otis Redding, Aretha Franklin, etc. Magnifique.
Blondie – Parallel Lines (Crysalis/Capitol)
J’aurais pu choisir n’importe lequel de leurs albums. C’est le groupe de pop parfait, il y a l’énergie, l’intelligence, et tout cela fonctionne sans aucun compromis. Devant, il y a Debbie Harry, cette icône qui chante génialement bien, qui a une attitude sexy, mais sans pour autant jouer à la poupée victime de sa sexualité. Je suis allé les voir au Casino de Paris et j’ai adoré le concert à un point tel que je suis retourné les applaudir en Belgique! Et puis c’est New York, c’est festif, c’est blindé de références qui m’interpellent. Ils ont bossé avec Warhol, elle a fait un film avec John Waters, tout se recoupe finalement. Chez tous les gens qu’on aime bien, il y a forcément des affinités, c’est comme des familles d’esprit.
Velvet Underground (Verve)
Le troisième album du Velvet, peut-être le moins connu. C’est une œuvre maîtresse, incroyable et poétique. Une atmosphère très cotonneuse, très new-yorkaise. On a l’impression d’être en 1968 ou 69. C’est le premier groupe qui m’a donné envie d’acheter des disques. Un truc s’est déclenché, l’imagerie de Warhol, tout ce côté mystérieux et très fort, archicopié aujour- d’hui. John Cale, Nico, Lou Reed, m’ont vraiment marqué à vie. C’est la base. Il existe une phrase qui dit que tous les gens qui ont écouté le Velvet ont fait un groupe ou de la musique…
Pluramon – Dreams of Top Rock (Kalkfee)
Je ne sais rien d’eux, juste que c’est un groupe de Cologne. J’aime bien ce mystère. L’ambiance est très chargée. J’adore les gens qui ont une identité forte, un univers bien à eux. Ici, c’est de la noisy pop extrêmement inquiétante. En même temps, il y a un paradoxe intéressant que l’on retrouve dans tous les disques que j’ai choisis. Un côté à la fois très sombre et très contine enfantine. Et la voix complètement éthérée de Julie Cruise est magnifique! C’est elle qui chantait toute la BO de Twin Peaks. Absolument génial!
Phoenix – Alphabetical (Virgin)
J’étais déjà fan de leur premier album. Ils font quelque chose qui n’appartient qu’à eux. Le fait qu’ils soient français ajoute sûrement quelque chose à leur musique, une petite touche classique, bien que cela ne s’entende pas forcément. Ça les ferait peut-être bondir! Ce sont des chansons avec une véritable énergie, de celles qui t’élèvent. C’est mon camarade Hedi Slimane qui a fait la pochette.
Stinky Toys (Vogue)
Le groupe de rock français le plus chic possible et imaginable. Déjanté, unique. Il capte très bien l’énergie et la vibe de cette époque-là [1979]. Un mélange de colère, de rage, de fun et d’in- fluences multiples – latino, rock anglo-saxon– très identifiables. C’est un disque que j’adore, qui compte énormément pour moi. Jacno a d’ailleurs produit mon premier album. Elli Medeiros en a été la muse et a signé la pochette.
TorchSong – Towards the Unknown Region (Discovery)
Le groupe de William Orbit avec qui j’ai travaillé dans les années 80. On a fait des chansons comme Epaule Tattoo ensemble, bien avant qu’il ne produise Madonna. Lui, c’est vraiment le “surpape” de l’électronique romantique. Il a un son qui est reconnaissable et le même depuis vingt ans. Avec ce groupe, il a apporté une pierre assez importante à l’édifice. Ici, on entre dans un univers doux, planant, et en même temps très inquiétant et névrotique. Parfait de bout en bout,comme une œuvre. Je le recommande violemment. Et puis c’est le meilleur album pour baiser !
Étienne Daho, Blitz, disponible dès le 17 novembre.