Le Saut Hermès, une compétition sportive au prestige inégalé
Le vendredi 17 mars 2023 et pour trois jours, le Grand Palais Éphémère accueillait la 13e édition du Saut Hermès. Numéro revient sur les coulisses de cette compétition internationale de saut d’obstacles devenu un spectacle époustouflant de beauté et de technicité.
par Léa Zetlaoui.
Le vendredi 17 mars 2023, à l’occasion d’un rare moment d’accalmie dans le monde de la mode et du luxe, le Grand Palais Éphémère accueillait la 13e édition du Saut Hermès. Trois jours durant, cinquante-cinq cavaliers parmi les meilleurs au monde, accompagnés de leurs cent-trente chevaux de concours, ont transformé cette compétition internationale de saut d’obstacles en un spectacle époustouflant de beauté et de technicité. Numéro revient sur les coulisses de cet événement sportif exceptionnel, organisé par la maison Hermès depuis 2010.
La maison Hermès et la tradition équestre depuis 1837
À l’évocation de la maison Hermès, viennent naturellement à l’esprit les célèbres carrés de soie ornés de dessins exclusifs aux couleurs chamarrées, les parfums aux noms poétiques et aux effluves incomparables et, bien sûr, les sacs à main, notamment les modèles Birkin et Kelly dont l’élégance intemporelle n’a d’égale que la qualité de leur confection. Pourtant avant de devenir l’une des plus prestigieuses maisons de mode et de luxe au monde, Hermès doit sa réputation d’excellence à son activité initiale de maître harnacheur-sellier.
Au sein de son atelier ouvert en 1837 à deux pas de la Madeleine (rue Basse-du-Rempart dans le 9e arrondissement, qui a aujourd’hui disparu), le fondateur Thierry Hermès réalise des harnais qui réunissent déjà les caractéristiques qui deviendront emblématiques du savoir-faire Hermès, notamment un artisanat remarquable, une esthétique intemporelle et un esprit d’innovation. En 1880, sous l’impulsion de Charles-Émile Hermès, le fils du fondateur, développe l’activité et installe la maison, qui connaît un grand succès avec sa sellerie, au 24, rue du Faubourg-Saint-Honoré. Aujourd’hui encore, les selles Hermès, ainsi que les commandes spéciales, sont réalisées dans les étages de cette adresse historique devenue célèbre dans le monde entier. Un savoir faire qui a inspiré l’emblème d’Hermès : un cavalier debout devant son cheval attelé à une calèche, dont l’emploi systématique depuis 1950 rappelle les origines de la maison.
Les ateliers de sellerie d’Hermès, artisanat et excellence
Au sein des ateliers de sellerie d’Hermès, au 24 rue du Faubourg-Saint-Honoré, règne une ambiance paisible, une quiétude presque surannée offrant un contraste saisissant avec l’effervescence de l’époque actuelle. Comme l’explique Vincent Leopold, responsable d’atelier qui a débuté chez Hermès en 1994, les selles fabriquées par la maison répondent à une double exigence : accompagner le cavalier mais aussi assurer le confort de sa monture. Chaque selle Hermès se reconnaît à la pureté de ses lignes, la qualité exceptionnelle de ses cuirs et l’intensité remarquable de ses couleurs. Un sens de l’esthétique dont fait preuve la maison quelle que soit son activité.
Comme souvent quand il est question d’un objet de luxe réalisé sur commande, la création d’une selle Hermès débute par un rendez-vous avec un expert sellier qui, pendant une demi-journée, prend les mesures de jambes et de l’assise du cavalier, ainsi que celles de sa monture grâce à l’Equiscan (un outil de pointe qui mesure avec une grande précision le dos du cheval), et observe le duo en action. Puis au cœur de la capitale française, la vingtaine d’artisans spécialisés, parmi les plus qualifiés au monde, réalise à la main, grâce aux informations recueillies, l’intégralité des opérations nécessaires à la fabrication d’une selle en cuir (hormis la coupe des peaux), accordant une attention identique aux modèles destinés à des cavaliers professionnels qu’aux commandes privées. Cette promesse de qualité se compte en heures – chaque selle exige en effet entre trente et trente-cinq heures de travail – et se prolonge par un second rendez-vous avec l’expert sellier pour la livraison. Depuis 1909, la maison répertorie soigneusement dans ses registres chaque selle qui sort des ateliers (ainsi que l’artisan qui l’a conçue). Grâce à ces grimoires, la maison Hermès sait ainsi avec exactitude que, depuis cette date, plus de 54 000 selles ont vu le jour, mais aussi est capable de garantir le suivi et la réparation de ses modèles, même les plus anciens.
Des partenariats avec des cavaliers de haut niveau qui nourrissent l’innovation
Mais la quête d’excellence d’Hermès ne s’arrête pas à son savoir-faire technique hors pair. Si aujourd’hui la maison française est reconnue pour la qualité incomparable de ses selles, c’est aussi grâce à des partenariats qu’elle noue depuis des décennies avec quelques-uns des meilleurs cavaliers au monde. Auprès d’eux, elle développe, améliore et perfectionne cet objet indispensable à la performance et au bien-être du duo équestre. Et comme toujours chez Hermès, tout est une question de qualité et non de quantité. Fidèle à sa vision d’excellence, c’est avec soin que la maison choisit ses cavaliers partenaires, tissant des liens avec des athlètes qui partagent des valeurs communes d’accomplissement et d’éthique, comme le souci du bien-être et l’amour du cheval.
Depuis son premier partenariat avec le cavalier brésilien Nelson Pessoa dans les années 60 (dont le fils, Rodrigo Pessoa, est toujours partenaire de la maison aujourd’hui), Hermès a collaboré avec de nombreux cavaliers de haut niveau. Elle a ainsi collaboré avec le champion olympique William Steinkraus sur l’élaboration d’une selle développée en 1968 – se rapprochant de la selle d’obstacles Vivace, mais aussi avec le cavalier français Simon Delestre en 2013 sur la selle d’obstacles Cavale, ou encore avec la cavalière allemande de dressage Jessica von Bredow-Werndl, qui a perfectionné la selle de dressage Arpège, conçue pour faire corps au maximum avec son cheval. Enfin, en 2022 a vu le jour la Selle Rouge d’Hermès, une création légère, ergonomique et somptueuse conçue avec le cavalier belge de saut d’obstacles Jérôme Guéry, incarnant la quintessence du savoir-faire sellier de la maison. En 2023, ce sont au total quatorze cavaliers, de huit nationalités différentes et couvrant les trois disciplines olympiques (saut d’obstacles, dressage et concours complet) qui sont partenaires de la maison Hermès. Quatre d’entre eux participent à cette 13e édition du Saut Hermès, organisée du 17 au 19 mars 2023 à Paris.
Le Saut Hermès : un concours international exceptionnel à Paris
Le jeudi 16 mars 2023, alors qu’un doux soleil de début de printemps illumine Paris, le Champ de Mars voit se succéder de longs vans à la cargaison peu commune, puisque chacun d’eux achemine quelques-uns des cent-trente chevaux venus concourir pour la 13e édition du Saut Hermès. Dès le lendemain, et durant trois jours, le Grand Palais Éphémère accueillera cette compétition internationale de saut d’obstacles, initiée par la maison française en 2010 et, devenue depuis, un événement équestre prestigieux. Pour Geoffroy de Thoisy, le chef des écuries qui assure avec son équipe de dix personnes le bien-être des chevaux, le Saut Hermès est une compétition équestre atypique non seulement parce qu’elle a lieu dans un endroit historique situé au cœur de la capitale française (habituellement le Grand Palais et, en attendant sa rénovation, au Grand Palais Éphémère situé sur le Champ de Mars), mais également parce qu’elle réunit des spectateurs moins habitués à ce type d’événement.
Il est vrai que la vision de cette piste de 2100m2, installée à deux pas de la tour Eiffel, laisse sans voix. D’autant plus que l’intégralité de l’espace, obstacles compris, se voit habillé d’un décor féérique inspiré de Pégase, le célèbre cheval ailé de la mythologie grecque, tandis que des artisans Hermès montrent l’étendue de leur savoir-faire sellier, présentant quelques-unes des plus belles selles réalisées par la maison. Loin d’éclipser le parcours d’obstacles savamment orchestré par Santiago Varela Ullastres et Grégory Bodo, (les chefs de piste du Saut Hermès qui concevront également les parcours des Jeux olympiques de Paris 2024), cette mise en scène attrayante transforme la performance des cinquante-cinq cavaliers et de leurs montures en un spectacle époustouflant de beauté et de technicité.
Durant les trois jours de cette compétition composée de sept épreuves Jumping CSI 5* (Concours de Saut International de difficulté 5, la plus haute), qui a notamment consacré le cavalier luxembourgeois Victor Bettendorf et son cheval Big Star des Forêts, le Saut Hermès a également mis en lumière vingt jeunes cavaliers et leurs montures qui ont concouru pour les épreuves Talents Hermès. Au cours de cette 13e édition du Saut Hermès, un moment d’émotion a accompagné l’hommage rendu au cheval Hermès Ryan, le fidèle compagnon (parti à la retraite en 2022) ayant accompagné la carrière de Simon Delestre, cavalier partenaire d’Hermès (avec lequel la maison a développé la fameuse selle Cavale). Un cheval grâce auquel le cavalier a décroché un très beau palmarès : notamment, la médaille de bronze individuelle des championnats d’Europe 2015, trois victoires en grand prix Coupe du monde FEI (2015, 2017, 2021) ainsi qu’en grand prix 5* d’Anvers (2015) et de Paris (2019), sans oublier ses doublés lors des grands prix Hermès de 2018 et 2019.