Hugo Marchand et Hannah O’Neill dansent au milieu des toiles d’Anselm Kiefer
Alors que son exposition consacrée à Anselm Kiefer au Bourget garde pour l’instant porte close, la galerie Gagosian propose sur sa chaîne Youtube de la découvrir sous un jour inédit. En plus d’une interview inédite de l’artiste allemand par l’historien de l’art James Cuno, on découvre une interprétation chorégraphique de ses quatre paysages monumentaux et mélancoliques par les jeunes danseurs du Ballet de l’Opéra de Paris Hugo Marchand et Hannah O’Neill.
Par Matthieu Jacquet.
Quatre immenses toiles, deux danseurs étoiles et un air de Steve Reich. Voilà le tableau que nous offre la galerie Gagosian, depuis une semaine, sur sa chaîne Youtube. Si l’établissement inaugurait le 7 février une nouvelle exposition d’Anselm Kiefer dans son vaste espace du Bourget, en région parisienne, elle fut contrainte de fermer ses portes au public il y a deux semaines face aux nouvelles restrictions sanitaires. Mais la méga-galerie ne manque pas de ressources. Afin de plonger les internautes dans les œuvres inédites du plasticien allemand, elle dévoile un film d’une vingtaine de minutes dans le cadre de son programme “Gagosian Premieres”, taillé spécifiquement pour le virtuel, qui permet de faire vivre les œuvres et les expositions au rythme de discussions, performances et autres projets à travers la vidéo.
Ici, le nouvel épisode consacré à Anselm Kiefer dévoile une interview exclusive de l’artiste par James Cuno, président et directeur du J. Paul Getty Trust, où tous deux explorent les origines et les secrets de ses nouvelles peintures monumentales. Sur près de 5 mètres par 8, ces quatre toiles offrent des panoramas mélancoliques et denses d’une nature dévastée, rehaussés de brins de paille et de feuilles d’or qui enveloppent les champs d’une parure mordorée dans les ténèbres de la nuit. Une occasion pour l’artiste et l’historien de l’art d’évoquer ensemble la tradition du paysage pictural mais aussi l’empreinte prégnante de l’Histoire, transmise par divers récits et poèmes, que les œuvres souvent apocalyptiques de l’artiste allemand s’attachent à illustrer depuis cinq décennies.
Mais cet entretien très vivant, ponctué par la déambulation d’Anselm Kiefer devant ses propres pièces et des focus de la caméra sur leurs fascinants détails, s’agrémente d’une autre surprise. Au milieu de la vidéo, deux jeunes danseurs entrent en scène au cœur de la galerie déserte : entre les quatre murs habillés par les peintures de l’artiste, ils entament au son de deux violons et d’un octuor à cordes une chorégraphie signée Florent Melac, où leurs corps déployés dans l’espace semblent animer les paysages dépouillés à taille humaine qui les entourent. Devant ce spectacle, on reconnaît la grâce de Hugo Marchand et Hannah O’Neill, tous deux membres du Ballet de l’Opéra de Paris, qui se prêtaient récemment à un autre duo chorégraphique pour Numéro sous l’objectif de Koto Bolofo. Pendant les cinq minutes du Duet de Steve Reich, le danseur étoile français et la danseuse néo-zélandaise donnent toute leur poésie aux œuvres qui dessinent autour d’eux, comme le titre de l’exposition l’indique, “le champ d’un tissu d’or”.