Qui est l’ex-trader devenu compositeur qui se cache derrière le générique de Succession ?
À l’image d’Hans Zimmer, qui a écrit les bandes originales grandioses d’Interstellar et de Dune, Nicholas Britell est devenu le compositeur versatile et virtuose que tous les studios de cinéma s’arrachent. Alors que la quatrième et ultime saison de la série Succession, dont il a signé le générique entêtant, est disponible sur Prime Video, portrait d’un artiste aussi discret que sa musique est grandiloquente.
par Violaine Schütz.
Nicholas Britell, l’homme derrière le générique culte de la série Succession
Et si, derrière chaque grand film, se cachait toujours une grande bande-son ? Le nom de Nicholas Britell est quasiment inconnu du grand public mais la musique qu’il a composée pour de nombreux longs-métrages et séries en font une figure de l’ombre très prisée. Il se murmure même qu’il pourrait bientôt faire de l’ombre au monstre sacré du genre, Hans Zimmer. On doit à ce New-Yorkais de 42 ans le génial thème orchestré, sombre et épique, de la série Succession (2018), mais aussi des morceaux remarqués pour Twelve Years a Slave de Steve McQueen (2013), Le Roi (2019) avec Timothée Chalamet ou encore l’oscarisé Moonlight (2016) de Barry Jenkins. L’artiste peut aussi se targuer d’être adulé par son ancienne amie d’université Natalie Portman – il signera d’ailleurs bientôt la BO du premier film du compagnon de l’actrice, Benjamin Millepied, intitulé Carmen – et le cinéaste Adam McKay qui a fait appel à lui pour The Big Short (2015), Vice (2018) et le très attendu Don’t Look Up (2021). Et à chaque fois, ses partitions jouent un rôle aussi important que les acteurs des œuvres.
La plus grande force de ce compositeur virtuose ? Savoir exactement quelle cadence doit rythmer une scène. Est-ce un fa majeur ou un si mineur qui correspondrait mieux à ce regard intense montré à l’écran ? Faut-il une clarinette enjouée, un violon lyrique ou un piano déchirant pour que le spectateur comprenne, même sans un mot, les sentiments du héros et les enjeux de l’action ? Fin psychologue, l’artiste nous plonge dans des montagnes russes émotionnelles à travers un dédale d’arpèges souvent empreints d’une certaine violence et d’une grande poésie. La légende veut que dans son studio new-yorkais où trône un poster des Chariots de feu (son premier coup de cœur musical à l’âge de 5 ans) ainsi qu’un écran géant, le musicien imagine le plus souvent ses cavalcades sonores les lumières éteintes. Comme si le film se jouait avant tout dans sa tête…
Natalie Portman en amie fidèle
Si Nicholas Britell sait si bien magnifier les images des réalisateurs, c’est sans doute grâce à son parcours étonnant. Le compositeur jouait déjà du piano enfant puis a pris, adolescent, des cours au réputé conservatoire Juilliard à New York. Il décide ensuite d’oublier quelque peu la musique pour suivre un cursus de psychologie à Harvard où il rencontre Natalie Portman. Une fois diplômé, il rejoint les loups de Wall Street, gagnant beaucoup d’argent en endossant le rôle d’un trader sans pitié. Mais la gestion de fonds ne lui fait pas totalement perdre de vue ses premières amours. Influencé par Rachmaninoff, Gershwin, Philip Glass, Quincy Jones et Dr. Dre., le golden boy imagine, d’abord rien que pour lui, des BO de films inexistants qui puisent autant dans le classique que dans le hip-hop (dans sa façon de triturer les sons). Rapidement, ce seront de vrais longs-métrages qui bénéficieront de son sens du rythme aussi utile dans l’univers de la finance qu’à Hollywood. C’est d’ailleurs sûrement parce qu’il a été trader que l’artiste a réussi à retranscrire aussi bien en musique l’ivresse de l’ultra-richesse et du pouvoir dans l’entêtant thème de Succession… Si l’argent avait une odeur, il possède désormais sa propre mélodie.
La saison 4 de Succession est disponible sur Prime Video (avec le pass Warner).