28 mai 2020

L’héroïne de la Traviata au cœur d’un court-métrage pour l’Opéra de Paris

La metteuse en scène Julie Deliquet, à qui l’on doit la superbe adaptation théâtrale d’“Un Conte de Noël” d’Arnaud Desplechin, passe derrière la caméra avec son premier court-métrage, Violetta. Le film explore la relation ténue entre représentation théâtrale et réalité, en exposant les parcours parallèles de deux femmes malades, l’une à l’Opéra Bastille, l’autre à l’hôpital Gustave-Roussy de Villejuif.

Fanny Ardant, Bret Easton Ellis, Apitchapong Weerasethakul, Jhon Rachid… Voici un petit extrait des artistes que l’Opéra de Paris a convié à réaliser des films pour sa plateforme de création numérique 3e Scène. Créée en 2015, celle-ci invite des personnalités de tous horizons – aussi bien écrivains, cinéastes, architectes que photographes ou YouTubeurs  – à créer un lien entre leur univers personnel et celui de l’Opéra. Ainsi, tandis que les réalisateurs Gordon et Béziat invitaient Pierre Bergé à se livrer sur sa relation à l'Opéra Bastille dans leur documentaire Le Crépuscule des Dieux, la réalisatrice Valérie Donzelli, elle, a suivi le soliste Jonas Kaufmann dans un roman photo expérimental intitulé Suivez donc la mesure. Films d’animation, performances, motion capture… La 3e Scène offre un vaste espace de création privilégié et permet de pénétrer le monde de l’Opéra par différentes portes, accessibles à tous puisque ces films sont disponibles gratuitement sur Youtube.

 

Entre fiction et réalité

 

En mars dernier sortait Clinamen, un magnifique court-métrage de l’artiste numérique Hugo Arcier. Ce mois-ci, la 3e scène offre le tout premier film de Julie Deliquet, Violetta. La metteuse en scène et directrice du théâtre Gérard Philippe, habituée des pièces de Tchekov et de Brecht, fait ici s’entremêler les mondes, jusqu’à ce que l’on ne puisse plus les distinguer.

 

Dans ce court-métrage, la maladie prend des airs de passions théâtrales. On y voit deux femmes. L’une est la cantatrice Aleksandra Kurzak, interprète du rôle de Violetta Valery, fatale héroïne de La Traviata. L’autre, fictive, est atteinte d’un cancer. Au travers du dédale des couloirs de l’Opéra Bastille et de ceux de l’hôpital, les deux personnages se confondent, jusqu’à ne faire plus qu’un. Si l’une est réellement malade, l’autre doit mourir sur scène. À travers un habile montage en parallèle, le film interroge la représentation, il brouille les frontières entre théâtre et cinéma, entre fiction et réalité. Long de 18 minutes, Violetta est, sans jamais tomber dans la complaisance, un subtil regard sur la tragédie et ses différentes incarnations. La dernière scène, superbe, offre notamment un clin d’œil à la dernière adaptation au théâtre de Julie Deliquet, Un conte de Noël.

 

Violetta (2020), de Julie Deliquet. Disponible sur le site Internet de la 3e Scène et sur Youtube.